Confessionalisme .
Les coptes ont suspendu jusqu’au 13 juin leur sit-in entamé
à Maspero après les incidents d’Imbaba, qui ont fait
plusieurs morts et des dizaines de blessés. Mais ils ne
renoncent pas à leurs revendications.
Les coptes décident une trêve
Après
près de deux semaines de chambardement, la vie est revenue à
la normale dans le quartier de Maspero au Caire, où se
trouve la Radio-télévision publique. Les manifestants coptes
qui campaient devant le bâtiment ont mis fin à leur sit-in
de 13 jours. « Nous avons décidé de mettre fin à notre
mouvement après la réouverture d’un nombre d’églises et la
libération des détenus coptes dans les événements d’Imbaba
», explique Mina, un des manifestants. Dès que le père
Mathias, un des leaders du sit-in, ait appelé les
manifestants à quitter les lieux, samedi soir, un groupe de
jeunes a commencé à nettoyer la zone et à débarrasser les
bannières. L’armée et la police ont enlevé les fils barbelés
posés par les manifestants à l’entrée et à la sortie de la
Corniche du Nil. Pour le père Mathias, cette décision vise à
donner du temps aux responsables pour étudier les demandes
des coptes. « Certaines de nos demandes ont été satisfaites
tandis que d’autres sont encore à l’étude. Nous attendons
que les responsables tiennent leurs promesses faites pendant
les 30 derniers jours », assure le père Mathias.
Le sit-in devant le bâtiment de la Radiotélévision à Maspero
avait commencé il y a deux semaines après les incidents
interconfessionnels d’Imbaba qui ont fait plusieurs morts et
des dizaines de blessés, et durant lesquels une église a été
incendiée. Les coptes exigent notamment la promulgation
d’une loi unifiée sur la construction des lieux de culte,
ainsi qu’une autre contre la discrimination. Les coptes
réclament aussi la réouverture des églises fermées,
l’arrestation des instigateurs des incidents d’Imbaba et la
libération des coptes arrêtés au cours de ces mêmes
incidents. Les autorités ont libéré cette semaine 41 coptes
arrêtés dans les événements d’Imbaba et durant le sit-in de
Maspero. Cependant, les organisateurs du sit-in affirment
qu’ils reviendront si l’intégralité de leurs revendications
n’est pas satisfaite. « Nous avons seulement décidé de
suspendre le sit-in jusqu’au 13 juin. Nous avons eu une
réunion avec la Coalition des jeunes de la révolution, qui
nous ont promis que nos revendications seraient satisfaites
», lance le père Philopateer Gamil, de l’archevêché de Guiza.
Chérif Doss, chef de l’Organisation des coptes d’Egypte,
estime, lui, que l’Etat a montré sa bonne volonté en
libérant les détenus coptes. « Mais il doit à présent
répondre aux autres revendications », dit-il.
Le 19 mai, les coptes qui campaient devant Maspero avaient
décidé de quitter les lieux lorsqu’ils ont appris que
l’église de la Vierge à Aïn-Chams allait être ouverte. Mais
ils sont revenus et ont décidé de poursuivre leur mouvement
lorsque des heurts ont éclaté entre musulmans et chrétiens
dans le quartier, quand des salafistes ont essayé d’entraver
la réouverture de l’église, fermée depuis deux ans suite à
des affrontements confessionnels. Cette église est l’un des
édifices religieux dans le quartier de Aïn-Chams dont les
autorités avaient promis la réouverture pour calmer les
manifestants de Maspero. Mina Sabet, coordinateur des médias
à l’Union des jeunes coptes de Maspero, explique : « Nous
avons décidé d’annuler la suspension du sit-in après avoir
reçu des nouvelles sur l’arrestation de plusieurs chrétiens
dans les événements de l’église de la Vierge de Aïn-Chams ».
Diocèse de Maghagha reconstruit
Cet incident a incité les manifestants à continuer leur
sit-in, malgré l’appel du pape Chénouda III à l’arrêter. Les
manifestants ont décidé de continuer leur sit-in devant le
bâtiment de la télévision d’Etat jusqu’à ce que l’église de
la Vierge et de l’évêque Abram à Aïn-Chams soit à nouveau
ouverte et que le diocèse de Maghagha soit reconstruit.
Finalement, avec la libération des détenus et la réouverture
de deux églises, une à Assiout et une autre à Béni-Soueif en
Haute-Egypte, les manifestants ont suspendu leur sit-in.
Une délégation de coptes s’est réunie cette semaine avec des
membres du Conseil militaire, dont l’avocat de l’Eglise,
Naguib Gobraïl. Les coptes réclament le jugement des
criminels qui ont commis des violences contre les coptes, à
Saul à Guiza, à Alexandrie, à Imbaba et à Aïn-Chams.
Samedi, une réunion entre des hommes de religion chrétiens
et musulmans dans le quartier de Aïn-Chams a vu apparaître
des divergences au sujet de l’église de Aïn-Chams. Celle-ci
était à la base une usine de prêt-à-porter que l’église a
rachetée avant de la transformer en lieu de culte. Le
bâtiment avait alors été fermé après que des heurts aient
éclaté à son sujet entre coptes et musulmans. Lors de la
réunion de samedi, les musulmans ont proposé que le bâtiment
soit transformé en hôpital au service des coptes et des
musulmans ou bien en usine comme il était dans le passé.
Mais les chrétiens ont refusé. Finalement, il a été décidé
de recourir à la justice pour déterminer le destin du
bâtiment. Le père Gamil, qui a assisté à la réunion,
explique : « La réunion a vu des altercations et des
négociations qui ont pris beaucoup de temps. A la fin, on a
pris la décision de fermer l’église pour le moment jusqu’à
ce que la justice dise son mot ».
Yvonne Mossaad, militante et conseillère juridique de
l’Union des jeunes coptes de Maspero, pense que ces réunions
de réconciliation n’ont aucune importance et ne résoudront
pas les crises. « On perd notre temps dans ce genre des
réunions qui ne sert à rien. On en a fait plusieurs et le
résultat est que nos droits sont perdus. La seule solution
c’est l’application de la loi et la justice pour atteindre
nos droits », affirme-t-elle. « Nous avons suspendu notre
mouvement jusqu’au 13 juin pour donner la chance au
gouvernement de répondre à nos revendications. Si non, nous
retournerons en sit-in », affirme Yvonne Mossaad.
Ola
Hamdi