Al-Ahram Hebdo, Opinion | La paix trompeuse au Moyen-Orient

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 Semaine du 8 au 14 septembre 2010, numéro 835

 

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Opinion
 

La paix trompeuse au Moyen-Orient
Abdallah Al-Achaal

L’une des méthodes qui étaient courantes dans les recherches relatives au conflit arabo-israélien est de partir du fait qu’il a connu de nombreuses chances perdues. Parfois, d’aucuns l’appelaient la paix trompeuse. Pour dire que la paix fait signe de loin, mais une fois qu’on s’y attache, elle se dérobe à la dernière seconde. Certains estimaient que si Nasser avait consenti à ce que Sadate avait approuvé plus tard, avant 1967, ou même après, la confrontation militaire de 1973 n’aurait pas eu lieu. Mais cette théorie ne s’applique qu’à la paix égypto-israélienne. Le discours politique égyptien a eu l’habitude d’affirmer, à chaque occasion, que Sadate avait bien assimilé les dimensions du dossier ainsi que ses complications, raison pour laquelle il a pu saisir la chance, à un moment où les autres n’avaient pas de vue d’ensemble et leurs visions étaient en retard de plus d’une décennie et demie. Pour appuyer leurs propos, ils avançaient comme preuve que les concessions faites par Arafat, lors des négociations de Mena House en 1980, celui-ci a pu les récupérer à un prix plus élevé à Oslo 1993. Les Israéliens, quant à eux, estiment qu’ils ont payé cher le prix de la paix avec les Egyptiens, alors qu’ils pouvaient avoir mainmise sur le Sinaï sans le restituer, d’autant plus qu’ils ont vu dans la soumission de la volonté de l’Egypte une clé pour faire passer le projet sioniste. Certains analystes affirment que l’absence de la paix dans la région revient à l’accession de l’extrême droite en Israël. Alors que c’est cette droite qui a conclu tous les accords de paix depuis Begin jusqu’à Rabin, en passant par Netanyahu, qui s’engage dans les négociations avec les Palestiniens, en vue de liquider toute la cause, pour en faire autant sur les fronts syriens et libanais et à Gaza, pour que le projet reprenne son cours en toute quiétude.

En réalité, la logique des chances perdues s’étend à tous les détails se rapportant à l’historique du conflit. Les tenants de cet avis ont tendance à croire que les Arabes ont perdu les chances qui s’offraient à eux lorsqu’ils n’ont pas accepté immédiatement la résolution du partage. Et si les Arabes avaient accepté à l’époque cette résolution, la superficie d’Israël aurait été la moitié de la terre. A ce moment-là, un Etat palestinien voisin à l’Etat hébreu aurait vu le jour, et la décision de la judaïsation de Jérusalem serait restée lettre morte.  Je pense qu’afin d’analyser la logique des chances perdues, il faut déterminer la signification du terme « chances » au sens propre, et de définir la perte. Cette logique, dans sa totalité, repose sur une hypothèse incorrecte. Selon laquelle les groupes juifs ont immigré en Palestine à la recherche d’un refuge. Alors que la logique du partage se réfère à un fondement similaire, quoique plus atroce et plus proche d’un projet organisé et planifié, selon lequel il existe un peuple juif détenant le droit de partage de la terre avec le peuple palestinien. Ceci veut dire que la relation des juifs avec la Palestine est passée par trois phases. La première, les juifs étaient en quête de refuge. Dans la deuxième, ils prétendaient qu’ils détenaient un droit similaire, voire même plus grand que celui des Palestiniens. Ensuite, ce fut la troisième phase, où les juifs niaient tout droit palestinien sur la Palestine.

Y a-t-il jamais eu une occasion pour une paix réelle, et une cœxistence entre les nouveaux arrivés et les propriétaires de la terre, et les Arabes l’ont perdue ? Les Arabes ont-ils regretté certaines occasions offertes à eux et que d’aucuns ont estimé comme propices à la réalisation de la paix ? Est-il vrai que la paix réclamée est un point de rencontre à un moment donné entre deux parties, mais ce point n’a jamais vu le jour et le moment n’est jamais venu ? Le résultat a été le recul des Arabes devant l’avancée du projet.

Dans le passé, nous étions éblouis par les théories des chances perdues. Mais « la paix trompeuse » a revêtu plus tard sa signification réelle. Selon laquelle, il s’agit d’une paix solide brandie pour anesthésier la partie qui s’affaiblit de plus en plus. Telle est la leçon que nous avons apprise de l’Histoire, disant que le fort est celui qui crée la paix qu’il désire et qui l’impose à la partie faible. Sur ce, avons-nous toujours une chance de faire revenir cette paix qui s’évadait pour ne jamais plus revenir ?

Je crois que ceux qui ont écrit sur la notion de « paix trompeuse » ou sur les chances perdues de la paix se fiaient à la méthode descriptive, et certains ont même pu voir que la paix s’approchait puis s’éloignait, tantôt du côté d’Israël, tantôt du côté arabe. Le fait de faire échapper le fantôme de la paix fut l’accusation que l’Egypte a collée, à maintes reprises dans les années 1980 du siècle dernier, à la résistance. Le plus récent de ces épisodes fut les accusations échangées entre le Fatah et le Hamas d’un côté et entre l’Egypte, la Syrie et le Hamas de l’autre. L’Egypte accusait parfois la Syrie d’encourager la résistance au côté de l’Iran, afin de servir des objectifs n’ayant rien à voir avec les intérêts du peuple palestinien. Comme si le fait de repousser la résistance serait à l’origine d’une paix équitable pour ce peuple. Mais nous sommes tous conscients qu’Israël veut toute la paix, toute la terre et que le peuple palestinien recherche la vie et le droit légitime. Alors que les autres parties sont en quête de leurs intérêts, qu’elles s’accordent avec les intérêts du peuple palestinien ou qu’elles soient en harmonie avec le plan israélien. L’important est que le point de rencontre entre les données de la paix, quelle que soit sa signification, ne porte pas préjudice aux intérêts des autres.

Enfin, je pense que Mohamad Ibrahim Kamel, ancien ministre égyptien des Affaires étrangères, qui a démissionné à cause de Camp David en 1978, et avant lui Ismaïl Fahmi en 1977, à cause de la visite de Sadate à Jérusalem, était influencé par ces concepts, lorsqu’il a titré ses mémoires sur Camp David : « La paix perdue ». Peut-être a-t-il voulu dire qu’à Camp David, il a été affirmé qu’il n’y avait pas d’espoir réel dans ces arrangements et ces négociations, parce qu’ils représentaient, d’un point de vue israélien, une défaite des Arabes et une soumission à la logique d’Israël ?

 

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