Négociations Palestino-Israéliennes.
Le locataire de la Maison Blanche a voulu parier sur une
nouvelle approche du conflit palestino-israélien, mais il
semble désormais condamné au même sort que ses prédécesseurs
: un processus de paix sans fin.
Les paris risqués d’Obama
«
Faiseur de paix au Proche-Orient », c’est en portant cette
veste qu’Obama a entamé sa vie
présidentielle. Et le processus de paix était un dossier de
« grande priorité » pour la nouvelle politique étrangère
américaine. Tout le monde aspirait alors à ce que le nouveau
président apporte un nouvel esprit de paix au Moyen-Orient,
et qu’il réalise ainsi ce qui a été manqué par la plupart
des administrations précédentes.
Avant son investiture, Obama
promettait de mettre en place une équipe qui puisse
s’engager « immédiatement » dans le processus de paix au
Proche-Orient. Cette équipe « s’adressera à toutes les
parties prenantes. Elle travaillera à mettre sur pied une
approche stratégique qui garantisse que les Israéliens et
les Palestiniens puissent satisfaire leurs aspirations »,
soulignait-il.
Elu, Obama s’est tout de suite
attelé à cette tâche. Son entrée a été même très remarquée
sur la scène internationale. Le 21 janvier 2009, le
lendemain de son investiture, Obama
appelle Mahmoud Abbass. Une
rencontre qui a pris comme titre « Le règlement du différend
arabo-israélien ». Le jour d’après, le 22 janvier,
Obama nommait son nouvel envoyé
spécial au Moyen-Orient en la personne de l’ancien sénateur
démocrate George Mitchell, homme qui avait mené avec succès
les négociations sur la question d’Irlande du Nord, qui
aboutirent au fameux accord politique du Vendredi Saint
(1998), où les leaders historiques de l’IRA abandonnèrent
définitivement la lutte armée.
Dans son administration, beaucoup de gens se sont aussi
investis dans ce dossier, en multipliant les mises en garde
en direction de Tel-Aviv. Rahm
Emanuel, le directeur du cabinet présidentiel, a ouvert le
feu devant l’Aipac : « L’heure
de vérité a sonné pour Israël ». Le principe des deux Etats,
« l’unique solution », ne saurait être abandonné. La
secrétaire d’Etat, Hillary Clinton, puis le vice-président,
Joe Biden, ont martelé des
propos similaires. Le général James Jones,
conseiller à la Sécurité
nationale, a eu ces mots : « Nous n’allons pas pousser
Israël sous les roues d’un autobus, mais nous serons fermes
».
Des rencontres ont été organisées entre Netanyahu et
Abbass séparément à la Maison
Blanche afin de maintenir des pressions sur eux pour les
amener sur table.
D’autres indices favorables, c’était qu’Obama
a ouvert la Maison Blanche pour recevoir le lobby israélien
J-Street dont la pensée contredit celle d’Aipac.
D’une façon générale, les discours d’Obama
ont été caractérisés en ces moments par un ton très
optimiste. Mais c’est seulement de la rhétorique, dit-on.
Un recul obligé
Un an et demi plus tard, le bilan est plus modeste que ce
que l’on pouvait espérer. Et une vague de critiques se
dressaient envers Obama. Il est
jugé être très loin de ses discours. Même plus loin que tous
ses prédécesseurs.
« Le président américain, en dépit des espoirs qu’il a
suscités au début de son mandat, s’est montré capable, comme
tous les autres présidents américains, d’un recul rapide sur
tout ce qu’il dit », dit Ossama
Mégahed, politologue.
Il s’agit seulement des déplacements inauguraux. Il n’a pas
touché le fond du conflit. Une des conditions « non
négociable » du président Obama
pour entamer le processus de paix, à savoir « le gel des
colonisations », a été balayée
par Israël qui poursuit toujours sa politique.
Obama change aussi de terme,
l’expansion des colonies doit être « limitée ».
L’intransigeance israélienne n’a même pas trouvé de honte de
donner à maintes fois des camouflets diplomatiques à
Washington. La veille de la visite de Mitchell, Israël a
entamé un nouveau plan de colonisation.
La politique de la main tendue et sa volonté de surmonter
les impasses politiques se heurtent à de vieilles rivalités.
Ce qui pousse le président américain à avouer qu’il a mal
évalué le dossier. « Devant, d’un côté, un différend
interpalestinien, des ingérences
régionales qui s’opposent aux négociations, comme celles de
la Syrie et de l’Iran. Et d’un autre côté, un gouvernement
de droite israélien qui refuse tout gel de colonisation,
Obama devient le président
américain le plus affaibli », dit
Ossama Mégahed.
Obama
est obligé alors de changer sa stratégie vis-à-vis du
Proche-Orient. Selon Saïd Okacha,
politologue au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques
(CEPS) d’Al-Ahram, il y a toute
une différence entre la première rencontre froide d’Obama
avec Netanyahu et celles chaleureuses qui l’ont suivie.
Selon Saïd Okacha,
Obama réalise à l’avance l’échec
de ce sommet. « L’administration d’Obama
qui a conditionné l’arrêt de la colonisation pour une
sérieuse négociation a échoué à y parvenir. Il a réussi un
gel des colonies, temporaire de 10 mois. Mais après la fin
du moratoire, rien n’a jusqu’à maintenant été précisé »,
explique-t-il. Et d’ajouter : « Devant son incapacité à
prendre des mesures sévères contre l’Etat hébreu,
Obama a exercé de fortes
pressions sur le côté palestinien et arabe pour participer
au sommet. Il est alors évident qu’Obama
cherche maintenant plus de succès diplomatique qu’un
règlement du conflit ».
En fait, ce sommet a constitué un grand risque pour
Obama. Il intervient à
l’approche d’élections de mi-mandat qui menacent sa majorité
au Congrès, et sa quête de remporter un second mandat en
2012. Les Démocrates doivent répondre d’une situation
intérieure difficile, avec un chômage élevé (9,5 % en
juillet) et une reprise économique poussive.
Alors, l’absence d’un accord de paix d’ici à l’été 2012
constituerait un lourd handicap pour
Obama, dans sa campagne de réélection à la Maison
Blanche. Car autant les élections législatives de mi-mandat
aux Etats-Unis sont traditionnellement tournées vers
l’économie et les thèmes de politique intérieure, autant les
campagnes présidentielles comportent toujours un important
volet diplomatique.
Devant ce statu quo, le président Obama
reviendrait à la stratégie qui a déjà échoué : celle
d’Annapolis, un processus de paix sans fin à l’abri duquel
Israël continue sa politique de conquête et de colonisation.
Aliaa
Al-Korachi