Négociations Palestino-Israéliennes.
Après un début mi-figue, mi-raisin à Washington, une
rencontre est prévue les 14 et 15 septembre à
Charm Al-Cheikh, en Egypte. Il
sera un test fondamental. Etat des lieux.
Ça passe ou ça casse
Lors
du dialogue qui a eu lieu entre le président Hosni Moubarak
et le chef de l’exécutif américain
Barack Obama à la Maison
Blanche avant l’ouverture de la nouvelle phase des
négociations directes entre Palestiniens et Israéliens, le
chef de l’Etat égyptien a transmis un message direct, à
savoir que c’est l’engagement américain d’agir pour réaliser
du progrès qui l’a poussé à participer à ce sommet. Et c’est
le contraire de ce qui s’est passé à Annapolis il y a trois
ans. Les Américains, de leur côté, relèvent la contribution
égyptienne à la relance du nouveau processus. Une réunion
jeudi dernier au Département d’Etat américain s’est
focalisée sur l’encouragement des Palestiniens sous la
direction du président Mahmoud Abbass
à reprendre les négociations là où elles s’étaient arrêtées
il y a deux ans. Il s’agissait aussi d’encourager les
Palestiniens à faire preuve du maximum de souplesse dans
leur façon de traiter avec le premier ministre israélien
Benyamin Netanyahu.
En dépit du pessimisme qui a prévalu avant cette réunion,
les sources diplomatiques américaines ont fait état de
l’importance de tirer profit de l’expérience égyptienne dans
les négociations avec Israël qui s’étend sur une période de
plus de 30 ans. Ce que d’autres administrations américaines
n’ont pas fait, et à titre d’exemple celle du président Bill
Clinton lors des négociations de Camp David II en 1999. La
diplomatie égyptienne non invitée n’a pu donc contribuer à
réduire le fossé entre les deux parties.
Quoi qu’il en soit, ce sont Charm
Al-Cheikh, la ville jordanienne d’Aqaba et Jérusalem qui
vont jouer à présent le rôle principal, du moins un rôle
très important dans le suivi des négociations bilatérales
entre Abbass et Netanyahu. De
quoi confirmer l’importance de l’expérience arabe, celle de
l’Egypte et de la Jordanie notamment, en matière de
négociations. Ceci d’autant plus que, comme l’a affirmé le
président Obama, cette chance
qui se présente actuellement serait la dernière.
Et
c’est à Charm Al-Cheikh, les 14
et 15 septembre, que se tiendra la deuxième journée de ce
processus qui a débuté à Washington. En dépit de cette
initiative, les dirigeants arabes mettent en avant la
nécessité d’une extrême méfiance quant à ces négociations.
C’est ce que relève de manière évidente la déclaration du
principal négociateur palestinien
Saëb Erakat
selon laquelle « il est prématuré de parler d’un optimisme
palestinien ».
Quoi qu’il en soit, c’est une sorte de flou qui règne. Les
médias américains dans l’ensemble sont plus optimistes. Ils
trouvent des signes encourageants dans le langage du
dialogue entre Abbass et
Netanyahu à la Maison Blanche et au Département d’Etat. Cela
a reflété une forme de souplesse de la part des deux
parties. Et pour la comparaison avec d’autres exemples, ils
remontent à bien loin, la réunion à la Maison Blanche entre
Arafat et le premier ministre israélien
Ytzhak Rabin il y a 17 ans. Arafat ne souhaitait
guère serrer la main à Rabin au vu et au su de tout le monde
et devant le président Clinton. Cette fois-ci, la poignée de
main a eu lieu. Des gestes symboliques. Ont-ils une
signification, face à d’éventuelles difficultés dans le
prochain round ?
La question des colonies
Le
New York Times a publié un article du président Moubarak qui
a confirmé que l’acceptation par les Arabes de toute
solution est basée sur la nécessité d’arrêter la
colonisation de manière totale, l’établissement d’un Etat
palestinien sur les territoires de juin 1967 sans la moindre
présence militaire israélienne et le déploiement de forces
internationales ou de l’Otan. Celles-ci auraient pour tâche
de faire le suivi d’une application de l’exécution des
accords de sécurité suite à l’accord final. Sur le plan
politique, il s’agit de s’attacher à l’initiative de paix
arabe comme base d’un règlement global et d’une
normalisation avec Israël. Un des points forts de l’article,
c’est le fait que Jérusalem deviendrait la capitale des deux
Etats dans le cadre d’un accord final.
Le porte-parole présidentiel, Soliman
Awad, a, lui, tenté de
minimiser l’obstacle que constitue la colonisation dans la
mesure où dans le cadre d’un règlement final, il sera
automatiquement question d’établir un statut de
Jérusalem-Est et des colonies. Celles qui seront à
l’intérieur des frontières de l’Etat palestinien seront
considérées comme illégales. Cela dit, pour les Palestiniens
à l’heure actuelle, il faut tester le sérieux du premier
ministre israélien quant à poursuivre les négociations par
la fin de ses discours sur un nouveau cadre des pourparlers,
par la formation de comités spécialisés. C’est une perte de
temps, soulignent à juste titre les Palestiniens. Il faut
reprendre les négociations au point où elles se sont
arrêtées en 2008. Et le test, sans doute principal, est
celui de prolonger le moratoire du gel des colonies qui se
terminera le 26 septembre. A cet égard, Netanyahu doit
convaincre les partis religieux extrémistes qui font partie
de la coalition au pouvoir d’accepter une formule souple à
cet égard. Entre autres, autoriser la construction dans les
grands blocs de colonies situées dans les régions qui
seraient à l’avenir dans la partie israélienne dans le cadre
d’un échange des territoires. Ce qui est prévu dans le cadre
d’une solution basée sur la création de deux Etats.
Les radicaux israéliens et autres
La
diplomatie américaine œuvre à cet égard avec celle
israélienne à mettre au point des conceptions concernant le
gel des colonies dans le cadre de réunions continues à
Washington et Tel-Aviv. Ce qui est craint du côté américain,
c’est qu’un gel des colonies aboutisse à l’effondrement du
gouvernement de Netanyahu, mettant en échec les
négociations. C’est ce que soulignent les éléments radicaux
en Israël et le lobby pro-israélien en Amérique. Ces
derniers avancent un autre argument contraire, celui de la
division entre Palestiniens, d’autant plus que le Hamas
s’est engagé à mettre en échec les négociations. Mais les
plus optimistes à Washington donnent pour exemple les
réalisations du gouvernement de Soliman
Fayad à Ramallah, sur lesquelles il faut rapidement
investir. La situation sécuritaire s’est améliorée de
manière qui n’a pas été précédée. Le nombre d’attaques en
Israël à partir de la Cisjordanie a beaucoup baissé.
Sur ce point précis, le président Moubarak a souligné dans
l’article du New York Times que l’Egypte est disposée à
intervenir pour résoudre les questions en rapport avec Gaza
et le blocus imposé au Hamas par Israël par les
négociations. Du côté pratique, les sources politiques
égyptiennes soulignent l’existence de grandes difficultés
dans les négociations avec le Hamas. Le point de vue de ce
mouvement est qu’il n’est pas nécessaire de négocier avec
Israël, que le conflit peut durer des dizaines d’années et
que le facteur temps est dans l’intérêt des Palestiniens. Et
si Israël veut parvenir à un règlement, c’est pour éviter le
problème démographique qui constituera un véritable
traquenard pour lui.
Le point de vue égyptien s’oppose à ce genre d’analyse. Le
porte-parole Awad, dans une
conférence de presse à Washington, a critiqué les
organisations palestiniennes établies à Damas et financées
par Téhéran pour saboter les négociations à travers des
opérations militaires. De quoi imbriquer l’Iran et son
dossier nucléaire, principal alibi israélien, dans la chose.
Les deux principales semaines constitueront ainsi l’une des
phases les plus importantes de la question palestinienne. Un
échec, au cas d’une reprise de la colonisation, aura pour
l’Amérique des conséquences graves face aux ambitions
iraniennes.
Ezzat
Ibrahim