Al-Ahram Hebdo,Invité | Mahmoud Hamdi Zaqzouq

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 Semaine du 8 au 14 septembre 2010, numéro 835

 

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Invité

A l’occasion de la fin du mois du Ramadan, Mahmoud Hamdi Zaqzouq, ministre des Waqfs, répond aux critiques sur le projet d’unification de l’appel à la prière et juge infondées certaines nouvelles pratiques des croyants.

« La piété ostentatoire oublie le fond et les valeurs »

Al-Ahram Hebdo : Le projet de l’appel unifié à la prière a été appliqué récemment après des années de préparation. Certains cheikhs le critiquent puisqu’il supprime une tradition remontant à l’époque du prophète et mettra au chômage des centaines de muezzins. Qu’en pensez-vous ?

Mahmoud Hamdi Zaqzouq : L’idée est de mettre fin à la cacophonie et à l’anarchie qui accompagnent l’appel à la prière. Beaucoup de gens se plaignent du bruit que dégagent les mégaphones, surtout les personnes âgées, les malades et les étudiants qui ne parviennent ni à se reposer ni à se concentrer. Tout cela va à l’encontre des préceptes de la religion musulmane. Après une période d’étude, nous avons pris la décision d’appliquer l’appel unifié à la prière dans les mosquées du Grand-Caire. De peur d’être confrontés à des objections religieuses, nous avons présenté le projet à l’Académie des recherches islamiques d’Al-Azhar et à Dar Al-Iftaa (instance chargée d’émettre des avis religieux). Les oulémas étaient tous d’accord sur le fait que rien dans la jurisprudence islamique n’interdit l’application de ce projet. Ils ont simplement affirmé qu’il ne fallait pas utiliser d’enregistrement, donc l’appel du muezzin doit être retransmis en direct. L’appel à la prière est alors lancé à travers le réseau de la radio du Grand-Caire et capté dans les mosquées qui font partie de la première phase d’application du projet. L’appel unifié est déjà appliqué à Héliopolis, à Madinet Nasr ainsi que dans le quartier d’Al-Haram. A la fin de l’année 2010, tous les quartiers du Grand-Caire seront inclus. Ce projet ne signifie pas que les muezzins, dont le nombre est de 728, se retrouveront au chômage, pas du tout. Parce que parmi les responsabilités du muezzin, il y a celle de diriger la prière à la place de l’imam en l’absence de ce dernier.

— Le voile s’est largement répandu dernièrement en Egypte. Est-ce le signe d’un réveil religieux ou plutôt une simple habitude sociale ?

— Lors de l’inauguration d’un établissement religieux à Alexandrie, l’ex-grand imam d’Al-Azhar, feu cheikh Mohamad Sayed Tantawi, a exprimé sa surprise en voyant des enfants de 6 ans porter le voile. Les responsables lui ont alors expliqué que ce sont les parents qui le leur imposaient. A mon avis, à cet âge, le voile ne doit pas être porté. Les jeunes filles doivent avoir l’occasion de jouer et le voile ne doit être porté qu’une fois l’âge de la puberté atteint. Il y a un courant salafiste qui rend obligatoire le port du voile pour les enfants ... c’est une ignorance de l’esprit de l’islam.

— Et que pensez-vous du port du niqab ?

— Je considère le niqab comme une nouveauté en Egypte. Les femmes portaient autrefois la burqa, c’était la façon traditionnelle de s’habiller, mais elles le faisaient tout en observant les codes de beauté et d’esthétique vestimentaires ... c’était très féminin. Aujourd’hui, par contre, les femmes en niqab sont toutes vêtues de noir et rien n’apparaît d’elles à part les yeux. Cela n’a rien à voir avec les enseignements de l’islam. Rien ne justifie de telles pratiques qui entravent la communication entre les personnes. Ces femmes savent très bien que l’islam dicte à la femme de dévoiler son visage pendant le pèlerinage, et ceci en la présence de millions d’êtres humains sur les lieux saints. Nombreux également sont les versets du Coran qui évoquent l’illégitimité du niqab.

— Comment est-il possible de modifier l’image déformée de l’islam à l’étranger ? Pensez-vous que les médias des pays islamiques n’accomplissent pas leur rôle à ce niveau ?

— Les musulmans ont contribué en quelque sorte à cette image déformée. Beaucoup d’attentats terroristes sont menés par des musulmans et au nom de l’islam. Les médias jouent un rôle important dans ce contexte quand — au lieu d’aider à expliquer le vrai message de l’islam — ils décident de publier des caricatures diffamant cette religion. Il est indispensable d’aborder l’islam avec raison afin de montrer à l’Occident que l’islam est une religion de paix et de tolérance, loin de tout extrémisme ou terrorisme.

— Existe-t-il une contradiction entre la piété et la modernité ?

— Cette contradiction est inexistante, car la piété est une attitude et un comportement. Par conséquent, la véritable piété diffère totalement de l’ostentatoire. La première est un respect des préceptes de la religion qui se voit dans les comportements de la personne et son attitude envers autrui. Quant à la piété ostentatoire, elle s’attache à l’aspect extérieur et aux questions marginales, et oublie le fond et les valeurs.

— Que pensez-vous des émissions télévisées consacrées aux fatwas sur les chaînes satellites ?

— C’est un phénomène malheureux et ses effets sont négatifs sur une large tranche de la population. D’ailleurs, la propagation du niqab est l’un de ces effets. La grande majorité de ces chaînes dépendent d’organismes étrangers et échappent complètement au contrôle des instances religieuses égyptiennes. Elles prêchent un message salafiste et rigide. Certains ont pensé fonder d’autres chaînes, plus modérées, pour contrer ce courant, comme la chaîne Azhari que je considère modérée et qui a recruté parmi les prédicateurs du ministère des Waqfs.

— Le dialogue des civilisations a-t-il apporté des résultats tangibles ?

— Le dialogue des civilisations et le dialogue des religions sont importants pour assurer la communication et construire des ponts de confiance entre les peuples. Mais le problème est que le dialogue est effectué à huis clos et au niveau des élites. Ses résultats n’atteignent pas la large base populaire, que ce soit ici ou en Occident. Par conséquent, les résultats sont limités. Il faut donc trouver des moyens pour faire parvenir ce message et cet esprit aux gens ordinaires.

— Que pensez-vous de la politisation de la religion ?

— Je refuse ce mélange de la politique et de la religion. La religion est un ensemble de préceptes et de recommandations divins dont l’objectif est de promouvoir la vie spirituelle des croyants. Il ne nous est pas permis de souiller la vie spirituelle par les aspects négatifs de la politique. L’islam tout au long de son histoire n’a jamais connu ce qu’on appelle l’Etat religieux, c’est pourquoi en Egypte, nous adoptons la devise « La religion pour Dieu et la patrie pour tous ».

— Certains députés pensent que les prêches du vendredi sont préparés à l’avance par le ministère et que les prêcheurs se contentent de les lire comme un communiqué. Est-ce vrai ?

— Ces propos sont infondés. Il n’est pas logique d’unifier le prêche du vendredi dans toutes les mosquées. Comment est-il possible que l’imam d’une mosquée dans un bourg du Delta ou de la Haute-Egypte prononce le même prêche que l’imam d’une mosquée à Zamalek ? Le public est différent et le niveau culturel aussi.

— Est-il vrai que le ministère de l’Intérieur surveille de près ce qui se passe dans les mosquées ?

— Cela est complètement faux. Pensez-vous que le ministère de l’Intérieur possède les dizaines de milliers de détectives nécessaires pour accomplir cette mission ?

— Certains ont approuvé et d’autres ont contesté votre récent appel aux musulmans à se rendre à Jérusalem en pèlerins afin d’affirmer l’identité islamique des sites religieux. Cet appel contredit la position du patriarche copte qui, lui, invite ses fidèles à ne se rendre dans la Ville sainte qu’une fois libérée de l’occupation. Qu’en dites-vous ?

— Je respecte les avis de tout le monde. Mon appel reflète ma position personnelle et non pas celle du ministère des Waqfs. J’ai réalisé qu’Israël avance à grands pas sur la voie de la judaïsation de Jérusalem et fait tout pour effacer l’identité arabe de la ville de Jérusalem-Est à travers notamment la construction des colonies et les travaux sous la mosquée d’Al-Aqsa. Nous nous contentons dans le monde musulman de communiqués de dénonciation et de refus. En appelant les musulmans à se rendre en grand nombre à Jérusalem, je voulais sensibiliser l’opinion publique internationale et montrer au monde entier que la mosquée d’Al-Aqsa appartient à tous les musulmans et n’est pas simplement une affaire palestinienne ou arabe.

Propos recueillis par Magda Barsoum

 




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