Théâtre.
Agayeb
(bizarreries) retrace l’histoire des différents régimes
politiques en Egypte et leur impact sur la société et les
intellectuels.
Des scènes qui dénoncent
Entre
la raison et la passion, l’équilibre s’établit
difficilement. Pourtant, impossible de séparer l’une de
l’autre. Elles vivent souvent en conflit et parfois en paix.
Tel est le point du départ dans la pièce de théâtre
Agayeb (bizarreries), écrite par
l’écrivain et le journaliste Atef
Al-Nemr et mise en scène par le
jeune Sameh
Bassiouny.
Il s’agit de l’histoire d’un écrivain qui a subi différentes
crises faute d’équilibre entre sa raison et sa passion. La
raison le guide toujours à écrire, à adopter le rôle d’un
vrai intellectuel visant la gloire et la célébrité au
détriment de sa passion et ses sentiments qui lui rappellent
de temps en temps l’urgence de vivre ses rêves. La pièce
évoque alors la vie de cet intellectuel et ses conflits
internes depuis la monarchie jusqu’à présent. A chaque
régime son pouvoir, son injustice ou encore son côté
dictatorial. Les conflits à l’intérieur du héros
s’aggravent. Pendant la monarchie, il abandonne sa
bien-aimée, fille d’un aristocrate, afin de ne pas perdre sa
liberté et ses rêves et s’adonne à l’écriture. Après la
révolution, il fut détenu pour ses idées «
anti-révolutionnaires » et ses
ouvrages favorisant le régime communiste. Quelque temps
après, il est accusé d’être contre la politique d’ouverture
et s’exile. Il devient un expatrié, faute de démocratie et
de liberté d’expression. De retour, il est ce modèle type
d’un écrivain engagé, assassiné par un extrémiste. Un sort
traumatique. En fait, le dramaturge souligne tous les
aspects négatifs des régimes politiques et leur impact sur
l’intellectuel.
Le spectacle est basé alors sur une relation triangulaire :
l’intellectuel, la raison (interprétée par un homme) et la
passion (interprétée par une femme). La pièce débute par un
coup de feu qui cible le héros principal. Une série de
flash-back se déchaînent alors opposant la raison à la
passion d’où le jeu du théâtre à l’intérieur du théâtre.
Les scènes se défilent rapidement et donnent au spectacle un
rythme et un enchaînement intéressants. N’empêche que les
détails de chaque régime politique ont mené à certaines
digressions non nécessaires. Le personnage du pacha (père de
la bien-aimée) est introduit juste pour semer un peu
d’humour. A l’exemple d’un
Zaki Rostom
(comédien des années 1960 jouant parfaitement le rôle du
pacha avec outrance), il a pu déclencher quelques éclats de
rire malgré un jeu de déjà-vu.
Bassiouny
a bien manipulé la disposition de la petite salle de Salah
Abdel-Sabour afin de bien
souligner la relation triangulaire. Ainsi la scène prend la
forme d’un triangle qui divise les rangs du public. Toute
une scénographie riche de détails reflète la perplexité et
le conflit du héros principal. L’arrière-fond se compose de
pancartes noires sur lesquelles s’inscrivent des lettres
dispersées en anglais et en arabe. Les motifs métalliques
utilisés relèvent une statue d’un homme errant, des formes
géométriques compliquées et imparfaites … Des symboles
riches de significations.
Les couleurs de l’éclairage ajoutent aussi d’autres
connotations : le bleu dans les scènes de perplexité et de
la mort. Des scènes figées pour quelques instants qui
provoquent. Le rouge dénonce aussi des situations flagrantes
d’injustice et de conflit.
Les scènes sont souvent commentées par des chansons
interprétées alternativement par
Mounira Mohamad et Samir Azmi.
Des chansons qui s’interrogent sur le sort de l’homme en
général et qui expriment un grand étonnement de ces
incidents en répétant comme dernier refrain « bizarreries ».
Une
autre
condamnation.
May
Sélim