Madinaty
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L’annulation par le Conseil des ministres de la vente du
terrain destiné à cette nouvelle ville provoque des remous
juridiques. Une nouvelle loi est exigée pour réglementer la
cession des terrains publics.
La forme à revoir
L’issue
juridique est finalement trouvée. L’Etat a décidé de
récupérer le terrain vendu en 2005 au géant immobilier
Talaat Moustafa Group (TMG) pour
la construction de la nouvelle ville
Madinaty, pour le revendre ensuite au même groupe,
selon les mêmes conditions stipulées dans l’ancien contrat.
La semaine dernière, la Haute Cour administrative a invalidé
la vente en 2005 de ce terrain de 33 km2, situé à l’est du
Caire, selon le motif que, contrairement à la loi, la
transaction a été conclue en vertu d’une allocation directe,
sans recourir à un appel d’offres.
Le gouvernement a ainsi formalisé la proposition d’une
commission officielle chargée de trouver une solution à
cette impasse. La décision de la Cour est donc respectée :
l’ancien contrat a été bel et bien annulé et un autre «
comprenant les mêmes conditions et régulations » sera signé
entre l’Organisme des nouvelles agglomérations urbaines et
le groupe immobilier. La différence ? Elle est purement
procédurale.
L’ancien contrat était conclu selon les règlements de
l’Organisme des nouvelles communautés urbaines qui donnaient
le droit de conclure des allocations directes, or la Cour
s’est basée sur une loi plus générale selon laquelle toute
vente de terrain public doit faire l’objet d’un appel
d’offres. Le nouveau contrat tirera sa légitimité d’un
amendement de la loi des appels d’offres datant de 2006 et
qui permet le recours à l’allocation directe « si l’intérêt
public l’exige ».
Les actions de TMG ont chuté de 16 % pendant les trois jours
suivant le verdict de la Haute Cour administrative. La
situation fut d’autant plus inquiétante que ce verdict
touchait à un secteur qui représente l’un des principaux
moteurs de la croissance en Egypte. Le risque de voir ses
répercussions s’étendre à d’autres grandes réalisations
immobilières en cours exigeait une réaction rapide. Sans
tarder, le gouvernement s’est voulu avant tout rassurant,
aussi bien vis-à-vis des partenaires du projet que des
milliers de personnes ayant déjà acheté un logement à
Madinaty. « La stabilité du
statut légal de toutes les parties du projet impliquait sa
mise en œuvre avec elles », affirmait déjà, au lendemain du
verdict, le porte-parole du gouvernement,
Magdi Radi. Le cabinet a déclaré
que le ministère du Logement finaliserait à une date
ultérieure les détails du nouveau contrat, ajoutant que le
prix du terrain ne serait pas inférieur à 9,98 milliards de
L.E., ce qui finalement pourrait représenter un avantage
pour la compagnie TMG, étant donné que l’ancien contrat
situait la valeur du terrain entre 14 et 15 milliards.
Aucune intention donc d’imposer une charge financière
supplémentaire au groupe immobilier, puisque la polémique ne
portait pas sur le prix du terrain, mais plutôt sur les
procédures de la vente. Déjà avant la décision du Conseil
des ministres, la compagnie TMG a fait savoir qu’elle
n’avait « aucune intention de revoir à la hausse le prix du
terrain ». D’après Hamdi
Lachine, conseiller juridique du groupe, le prix que le
groupe devrait payer au gouvernement en espèces, soit 7 %
des logements du projet, « était supérieur à la plus haute
estimation du terrain en 2005 », date de la signature du
premier contrat. Les responsables du groupe immobilier
rappellent que le bureau du procureur général a classé la
partie du procès relative au gaspillage de fonds publics. «
Le prix convenu est donc correct », affirme-t-on à TMG.
Des lois contradictoires
Pour le gouvernement, souvent accusé de pratiquer un
favoritisme à l’égard des hommes d’affaires proches du
régime, le procès de Madinaty a
tiré une sonnette d’alarme. Aujourd’hui, plusieurs
organismes dont ceux des agglomérations urbaines et de
développement touristique essayent tant bien que mal de
coexister dans un domaine régi par des lois contradictoires.
Le premier ministre, Ahmad Nazif,
a reconnu le besoin d’une nouvelle législation pour
harmoniser et régulariser leur fonctionnement. Il a ordonné
le recensement de tous les terrains, vides et utilisés, pour
pouvoir ensuite mettre en place un nouveau système plus
cohérent permettant l’estimation de leur valeur réelle et
leur allocation « en toute transparence ».
Ce nouveau système que prépare le gouvernement et qui
concernerait les terrains destinés aux logements aussi bien
qu’aux projets agricoles, touristiques ou de services
publics, aura ses implications — positives, selon le premier
ministre — dans tous les secteurs de l’économie, « puisque
les investisseurs recherchent avant tout la transparence ».
Chérif
Albert