La Palestine en 2010 et le rôle
égyptien
Hassan
Abou-Taleb
A
mon arrivée
à Beyrouth,
l’officier des
passeports, en
voyant ma profession
à Al-Ahram,
m’a
interrogé sur la mort
du soldat
égyptien
sur les frontières avec
Gaza. Il m’a
demandé si
les tirs
provenaient vraiment de
la bande de Gaza et d’un
membre du
Hamas ou
bien d’une
partie
enrôlée pour augmenter les
pressions entre
l’Egypte et Gaza. La question a
été une
surprise pour deux raisons. La
première est
que les affaires
internes et
externes de l’Egypte
ne
préoccupent pas seulement
les Egyptiens
mais de
nombreux frères
arabes qui
suivent les nouvelles de
l’Egypte, les
analysent, les
critiquent,
posent des questions et
attendent des réponses
convaincantes. La
seconde raison
est que
la question portait un
doute ou
du moins
une non-conviction
sur la version
égyptienne relative
à la mort
du soldat. En
effet, la question
portait une
vision implicite
sur la
présence d’une tierce
partie
voulant augmenter les pressions
entre
l’Egypte et le mouvement
du Hamas
qui domine la
bande de Gaza et
joue le
rôle de gouvernement
du fait accompli
jusqu’à ce
que
changent les circonstances.
Par conséquent, le
Hamas n’est
pas responsable et
il ne
faut pas
être sévère avec
lui. Le cas
de l’officier
libanais
n’est pas le seul. A
chaque
endroit où
une question
arabe est
soulevée, la question
logique qui se pose
est : Qu’a
fait l’Egypte ?
Que
peut-elle faire ? Dans
certains
cas, nombreux se portent
volontaires pour dire
que
l’Egypte n’a
rien fait et pour
pleurer le temps
où Le Caire
dirigeait la nation
arabe,
déterminait les priorités,
les plans d’action et les
alternatives et prenait les
décisions qui
satisfont les ambitions et le
prestige des Arabes.
La critique de
l’Egypte et de
ses
politiques est
devenue chose courante
dans tout le monde
arabe. Dans
chaque
colloque, conférence,
regroupement
ou même
émission
télévisée, discutant d’un
sujet
culturel, intellectuel,
scientifique,
ou
politique concernant la
totalité des
Arabes, tout le monde fait
retomber la
responsabilité sur
l’Egypte.
L’aspect positif de
ces critiques
est une
reconnaissance implicite
que le monde
arabe ne
peut changer les
équilibres et
réaliser les ambitions
arabes sans le
rôle de leadership de
l’Egypte.
L’aspect négatif
est que
l’on rend
l’Egypte seule
responsable de la
détérioration des
conjonctures
arabes,
alors que les
autres parties
ayant une
relation directe avec la
question sont
représentées
comme
impuissantes. On ne
peut alors
pas leur demander un
quelconque
rôle dans
l’intérêt
arabe car tout simplement,
elles ne
possèdent pas le
même leadership
que Le
Caire.
Je
m’étais
rendu au Liban pour
participer
à un atelier autour de
l’avenir de la cause
palestinienne au
cours de la nouvelle
année à
la lumière de
l’expérience de 2009.
L’organisateur
est le Centre Al-Zaytouna
pour les recherches et les
consultations à
Beyrouth.
Ses rapports sont
devenus une
référence
importante et fondamentale
pour tous
ceux qui veulent
suivre la cause
palestinienne. La
principale question de
l’atelier
portait sur les
conceptions probables et les
rôles que
peuvent
jouer les parties liées
à la cause
palestinienne, qu’il
s’agit de parties
arabes,
régionales ou
internationales. Les
académiciens, les
chercheurs et les
personnes en
étroite relation avec les
diverses factions
palestiniennes
ou avec le
mouvement du
Fatah ont
présenté
différentes analyses, critiques et visions.
Cinq choses
ont attiré
mon attention.
Premièrement,
il y avait
une
unanimité que la cause
palestinienne
est dans
son plus mauvais
état et
qu’elle connaîtra des
dégradations
dangereuses
si les divisons
palestiniennes persistent,
si le
processus politique
continue à
reculer et si
nous ne
trouvons pas de
programme
politique mêlant
l’action
politique à la
résistance.
Deuxièmement,
le pessimisme
domine
toutes les factions
palestiniennes. Bien
que les
personnes proches
du Hamas
parlaient de la résistance et de
la victoire,
elles n’ont
présenté
aucune alternative à la
situation actuelle.
Bien plus,
elles s’y
attachent plus
que jamais.
Elles
semblaient attendre
une nouvelle
agression
envisagée par Israël
durant
cette année. Quant aux
personnes
proches du
Fatah,
leurs demandes
étaient
claires : il
n’y a pas
d’alternatives à la
réconciliation et au
réaménagement de la
maison
palestinienne car les dangers
sont grands et
personne ne
peut les assumer
seul.
Troisièmement,
il y avait
un choc du
recul américain et
notamment
du recul de
l’administration
d’Obama de
jouer un quelconque
rôle
effectif capable de changer la
conjoncture actuelle qui
peut être
résumée en
quelques termes : le gel
qui précède
l’explosion. Puis
sont
survenues les déclarations
de Hillary Clinton après la visite
des ministres
égyptien et
jordanien des Affaires
étrangères à Washington,
disant que
son pays préférait les
négociations sans conditions
préalables,
comme si
elles
adressaient le message de
n’attendre rien de
nouveau de Washington qui n’obtienne
pas le consentement
d’Israël.
Quatrièmement,
toute
l’assistance était
convaincue
qu’Israël dans
ses
conjonctures actuelles,
dominé par la
droite et par les colons avec
leur
idéologie basée
sur la
judaïsation de tout ce
qui peut
être judaïsé et
l’expulsion des
Palestiniens de
leurs
terres, n’est
disposé à
aucun
règlement pacifique
dans
l’avenir proche.
Cinquièmement,
de nombreuses questions se
sont posées
autour des
répercussions de la fermeture
des frontières
égyptiennes. Le plus
étonnant
est qu’une
personne, qui suit de
près ce
qui se passe
à Gaza, a
déclaré que la situation
dans la
bande a engendré
une structure
sociale et
politique qui n’acceptera
pas la réconciliation et le
retour à
l’Autorité
nationale palestinienne
et qui préfère
que la situation
reste telle
quelle en raison des
nombreux
avantages qu’elle
récolte.
Les discussions
étaient riches et
ont
également abordé le
rôle
égypto-palestinien. Certains
interlocuteurs
n’avaient pas
d’informations
suffisantes
sur les interventions
égyptiennes au Soudan, au
Yémen, en Iraq
ou en
Turquie. D’autres
répétaient les
mêmes critiques
diffusées par les
chaînes satellites.
Bien que
j’aie
essayé de transmettre les
informations
correctes, la critique des
positions égyptiennes
ne s’est
pas arrêtée. Les critiques
adressées à
l’Egypte
n’émanent pas des conjonctures
détériorées
à Gaza, du
trébuchement de la
réconciliation
ou du
gel des négociations
entre
l’Autorité palestinienne
et Israël,
mais plutôt de
certaines conceptions,
selon
lesquelles il
incombe à
l’Egypte
d’assumer toute la
responsabilité
exactement
comme dans les
années 50 et 60
du siècle passé. Il y a
aussi
d’autres raisons comme
l’absence de
renseignements
sur ce
que fait
effectivement l’Egypte
dans de
nombreuses questions arabes,
ainsi que
des préjugés qui
considèrent
que tout ce
que fait
l’Egypte est
l’exécution de
recommandations
américaines et
sionistes au service des
ennemis, aux
dépens de
tous les frères. Le plus
dangereux
est que
ces critiques
acerbes ne
sont plus
l’expression d’un différend
politique
ou idéologique,
elles se
sont développées au point
de déformer
l’image des Egyptiens.
Ce
comportement paraît
même
intentionné et planifié
de la part d’institutions
politiques et
médiatiques.
Dans
ce contexte,
il est
indispensable d’élaborer
une
stratégie médiatique
influente à
laquelle
nous assurerons les
ressources
matérielles et humaines
nécessaires pour faire face aux
déformations
dont est
victime
l’Egypte avec le plus grand
degré de professionnalisme,
sinon
l’image de l’Egypte
restera
exposée à de
nombreuses
déformations et de nombreux
malentendus.