Palestine.
L’échec de la tournée de l’émissaire américain George
Mitchell au Proche-Orient coïncide avec le début des travaux
de la commission de l’Onu sur « les droits inaliénables du
peuple palestinien ».
Un
fiasco américain
La
tournée que George Mitchell a entamée jeudi dernier au
Proche-Orient a été un fiasco. L’émissaire américain a
multiplié les navettes entre Tel-Aviv, Ramallah et Jérusalem,
en plus d’une visite à Amman et au Caire sans parvenir à
débloquer le processus de paix.
Rien de
surprenant. Après tout, qu’est-ce qui aurait pu faire
réussir cette nouvelle tentative américaine ? En l’absence
de toute pression à l’encontre de l’Etat hébreu, le premier
ministre israélien est resté intransigeant, refusant de
faire une quelconque concession. Toujours fidèle aux
déclarations vagues et ambiguës, il a déclaré dimanche
dernier avoir trouvé certaines idées américaines «
intéressantes ». En même temps, il multiplie les
provocations. Quelques heures à peine, après un entretien
avec Mitchell, Benyamin Netanyahu s’est rendu à Gush Etzion
et Maale Adoumim, deux blocs de colonies en Cisjordanie qui
encerclent Jérusalem-Est, pour planter un arbre. « Notre
message est clair : en plantant un arbre ici, nous
signifions que nous resterons ici, que nous construirons ici
et que ce lieu sera pour toujours une partie inséparable de
l’Etat d’Israël », a-t-il lancé. Un message aux colons,
certes, mais il s’agit surtout d’un message dirigé aux
Palestiniens et à la communauté internationale : Israël n’a
pas l’intention de reprendre le chemin de paix. Plus encore,
le gouvernement israélien ne respecte même pas le gel
partiel des constructions de colonies dans les territoires
occupés, à l’exception de Jérusalem. Ainsi en dépit du gel
décrété et malgré un arrêt de la Haute Cour de justice
israélienne, prononcé il y a un an, les constructions se
poursuivent à Kyriat Netafim, une colonie de Cisjordanie.
Les
Palestiniens, de leur côté, continuent de refuser le retour
à la table de négociations avant l’arrêt total des activités
de colonisation et ce dans tous les territoires palestiniens,
Jérusalem inclus. Pour eux, il ne s’agit pas d’une condition
qu’ils émettent mais de la simple application de la feuille
de route qui engage Israël à mettre fin à sa politique de
colonisation.
« Ce qui
entrave en réalité les efforts du sénateur Mitchell et du
président Obama, c’est Israël avec ses colonies, ses
incursions et ses assassinats. Quand nous disons qu’Israël
doit cesser de construire des colonies, cela n’est pas une
condition palestinienne. Il s’agit d’un engagement israélien
qui doit être respecté », a déclaré Saëb Ereqat, chef
négociateur palestinien. L’Autorité palestinienne est
d’autant plus consciente que si elle abandonne cette
revendication, sa popularité, voire même sa légitimité
vis-à-vis de la population palestinienne, sera
définitivement compromise au profit du Hamas.
Or face
à cette impasse, certains craignent que le gouvernement
américain ne finisse par délaisser le volet
israélo-palestinien. L’entretien du président américain
publié jeudi dernier dans l’hebdomadaire Time semble
confirmer ces craintes. « Je pense que nous avons surestimé
nos possibilités de les convaincre (Israéliens et
Palestiniens) d’engager des négociations de paix », a
déclaré Obama. « Les divisions au sein des deux sociétés
(palestinienne et israélienne) rendent très difficile aux
uns et aux autres le retour à des négociations », a-t-il
ajouté. Washington menace-t-elle de jeter l’éponge ?
Possible, mais en tout cas, les propos d’Obama sont loin de
rassurer le côté palestinien qui espérait qu’avec l’élection
du président Barack Obama, une nouvelle politique américaine
sera plus équilibrée et moins partielle.
Mais la
réalité est tout autre : les administrations américaines
changent mais le soutien de Washington envers Israël reste
indemne.
Les
droits du peuple palestinien
Etrange
coïncidence : le début de la tournée de Mitchell au
Proche-Orient intervient le même jour de l’ouverture jeudi
dernier à New York des travaux de la Commission de l’Onu sur
les « droits inaliénables du peuple palestinien ». Et le
secrétaire général de l’Onu, Ban Ki-moon, semble avoir une
opinion sans équivoque sur la politique israélienne.
« La
communauté internationale est opposée à la présence
israélienne et à la poursuite des constructions à
Jérusalem-Est. L’activité de colonisation est un obstacle à
la réalisation d’une paix fondée sur l’existence de deux
Etats. Tout ceci n’est dans l’intérêt de personne — et
surtout pas d’Israël. La colonisation sape la confiance
entre les deux parties et semble préjuger du résultat des
négociations sur le statut permanent », a-t-il déclaré.
Face à
ces critiques, le gouvernement israélien n’a pas hésité à
accuser Ban Ki-moon de tenir des propos « déséquilibrés et
unilatéraux ». Il s’agit là de la même rhétorique utilisée
par l’Etat hébreu il y a quelques mois contre le juge juif
sud-africain Richard Goldstone, qui avait osé accuser le
gouvernement israélien d’avoir commis des crimes de guerre,
voire des crimes contre l’humanité à l’encontre des
Palestiniens lors de la guerre contre Gaza, l’hiver dernier.
Ceci
dit, les critiques du secrétaire général, qui viennent
réconforter la position palestinienne tant qu’elles ne sont
pas assorties de pressions, ne risquent pas de convaincre
les Israéliens d’abandonner leur politique expansionniste
dans les territoires palestiniens. L’impuissance de la
communauté internationale et les récentes déclarations du
président américain laissent peu de place à l’optimisme. Il
semble que comme toujours et en dépit du constat
international du « droit inaliénable du peuple palestinien »
à la souveraineté et à la liberté, le peuple palestinien
reste livré à son sort.
Heba
Zaghloul