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 Semaine du 27 janvier au 2 février 2010, numéro 803

 

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Egypte

Education. Nommé la semaine dernière à la tête du ministère, Ahmad Zaki Badr doit poursuivre la réforme du système engagé par ses prédécesseurs. Trois grands dossiers sont à l’étude.

La réforme a la peau dure

« Je ne suis pas satisfait du niveau de l’enseignement en Egypte », a déclaré le nouveau ministre de l’Education, Ahmad Zaki Badr, après sa nomination la semaine dernière. Du pain sur la table, il en aura. « Le secteur de l’enseignement souffre de problèmes chroniques et d’une incohérence dans les politiques. Ainsi on a supprimé et rétabli à plusieurs reprises la sixième année primaire et l’enseignement secondaire est devenu lui aussi un champ d’expérimentation », explique Hamed Ammar, pédagogue. Et d’ajouter que dans de telles conditions, il est impossible d’amorcer une réforme efficace de l’enseignement. En l’espace de cinq ans, trois ministres se sont succédé au ministère de l’Education, mais il n’y a eu aucune amélioration réelle dans ce secteur. Selon Hamed Ammar, trois grands défis attendent désormais le nouveau ministre, à savoir la réforme des méthodes d’enseignement, l’insuffisance des infrastructures et la formation des professeurs. D’abord, les cursus scolaires. Le ministère de l’Education a créé, il y a 4 ans, un nouveau système baptisé « l’évaluation globale ». Ce système implique une augmentation de l’espace consacré aux activités et une diminution des matières. Objectif : lutter contre le parcœurisme, développer les diverses facultés des élèves et les aider à développer leur propre créativité. Or selon Hamed Ammar, ce système qui a déjà fait ses preuves dans de nombreux pays, n’a pas bien fonctionné jusqu’à présent en Egypte. Pourquoi ?

Enseignants non formés

« Essentiellement parce que les enseignants n’ont pas été préparés à ce système de manière adéquate. Et aussi parce que les anciennes méthodes étaient très ancrées au point qu’il n’était pas facile de les changer. Beaucoup d’enseignants sont restés confinés dans l’ancien système basé sur l’apprentissage par cœur. Simplement, ils ne savaient pas comment apprendre aux élèves à être créatifs », affirme Hamed Ammar. Et d’expliquer que le système éducatif égyptien fonctionne d’une manière comparable à celle d’une banque. « L’enseignant a un capital d’informations qu’il transmet aux élèves un peu comme se transmet l’argent au comptoir d’une banque. Et au moment de l’examen, les élèves doivent réciter ce capital d’informations pour être admis », affirme le pédagogue. Résultat : la qualité de l’enseignement en Egypte ne répond toujours pas aux normes mondiales. L’Egypte figure en mauvaise place dans les rapports de la Banque mondiale sur la qualité du système éducatif dans le monde, loin derrière les pays du Golfe. Hamed Ammar souligne que les manuels scolaires renferment toujours énormément de bourrage. « Ces manuels doivent être changés. C’est une nécessité. Il faut former un comité pour mettre à jour les manuels scolaires au moins une fois tous les trois ans », propose Ammar.

Durant des années, le système éducatif égyptien a souffert d’une grande négligence. Ce n’est qu’au début des années 90 qu’une attention a été accordée à ce secteur, lorsque le gouvernement a pris conscience qu’une modernisation de l’enseignement était impérative pour développer l’économie.

Collaboration

Cependant, les tentatives sont restées isolées et manquaient d’une vision globale. Ce n’est qu’en 2002-2003 qu’une vision globale a été élaborée en collaboration avec des organisations internationales, comme l’Unesco et la Banque mondiale, et une coopération bilatérale avec certains pays dont les Etats-Unis, la France, l’Allemagne et le Canada. Objectif : améliorer la qualité de l’enseignement afin d’être au niveau des normes mondiales.

Si le changement des méthodes d’enseignement paraît la voie vers une réforme réussie du secteur, la formation des enseignants semble être l’autre pilier de cette réforme. « Durant des années, les enseignants n’ont bénéficié d’aucune formation continue en Egypte. Résultat : leur niveau est loin de répondre aux critères de qualité internationaux », constate Rachad Abdel-Latif, vice-directeur du Centre des recherches éducatives. C’est l’autre grand problème auquel le nouveau ministre sera confronté. Le ministère de l’Education avait créé, il y a deux ans, une académie professionnelle pour former les 1,25 million d’enseignants que compte l’Egypte dans les différents cycles scolaires. Les enseignants sont appelés à passer les examens élaborés par l’académie afin d’obtenir des permis d’enseignement de cinq niveaux différents déterminés par le ministère. Tout enseignant qui remplit ces critères obtient une augmentation de salaire de 50 à 150 %. Mais cette formation ne sera pas efficace, selon certains, si elle est formelle et manque de fonds. « Les enseignants vont apprendre des méthodes pédagogiques difficiles à appliquer sous les conditions lamentables dont souffrent les écoles publiques, surtout celles qui sont dans les provinces », souligne Mohamad Abdel-Zaher, un autre pédagogue.

Manque d’infrastructures

Le troisième grand dossier est celui des infrastructures scolaires. Le nombre d’écoles ne suffit pas pour absorber la croissance démographique. C’est ce qu’affirme Moustapha Abdel-Samie, ancien ministre adjoint. Et d’expliquer que toute réforme de l’enseignement pourrait s’avérer vaine si ce problème n’est pas résolu. « Dans la plupart des écoles, la densité dans les classes se situe entre 50 et 70 élèves », indique Abdel-Samie. Le gouvernement a annoncé un plan visant à construire 3 500 écoles en 6 ans et à ouvrir 8 000 nouvelles classes tous les ans pour diminuer la densité dans les classes et pour combler le manque dans certaines régions. Mais le gouvernement a besoin de fonds s’il veut augmenter le nombre d’écoles. Une des solutions consiste à engager davantage le secteur privé dans la construction des écoles. Selon Hamed Ammar, il est impératif que le gouvernement mette plus de fonds dans le processus éducatif notamment pour la construction des écoles. « La hausse dans le budget de l’éducation doit être orientée vers la construction d’écoles équipées de terrains de jeu et de laboratoires. 7 % seulement du budget de l’enseignement en Egypte sont destinés aux infrastructures scolaires », explique Ammar.

Lors d’un discours devant le Parlement, Ahmad Zaki Badr a affirmé être conscient des problèmes. « Certains problèmes se trouvent en dehors du ministère de l’Education, comme l’augmentation du nombre d’élèves du fait de la croissance démographique et notre potentiel limité en tant que pays en développement. Mais nous ferons le maximum pour résoudre ces problèmes », a-t-il déclaré. Il a souligné qu’une attention particulière serait accordée au problème des cours particuliers et de la négligence dans les établissements scolaires. D’autre part, la priorité du ministère irait à l’enseignement technique au cours de la prochaine phase, car il est, selon lui, la pierre angulaire du développement industriel. Pourtant, Badr n’a fixé aucun calendrier. Les choses s’éclairciront plus avec le temps.

Ola Hamdi

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