Al-Ahram Hebdo, Monde | La main tendue aux talibans
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Rédacteur en chef Mohamed Salmawy
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 Semaine du 27 janvier au 2 février 2010, numéro 803

 

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Afghanistan. Une conférence internationale est prévue à Londres le 28 janvier dans le but de promouvoir une réconciliation avec les talibans. Une politique qui n’a trouvé encore aucun écho chez les rebelles.

La main tendue aux talibans

Réalisant que la politique du bâton ne remportera aucun fruit avec des talibans décidés à semer le trouble dans le pays, le président afghan, Hamid Karzaï, a décidé cette semaine de changer de politique vis-à-vis des rebelles. Renonçant au langage des menaces, M. Karzaï a révélé, samedi, les grandes lignes de son plan de réconciliation avec les insurgés, proposant argent et travail à ceux qui abandonneront la lutte armée afin de faciliter leur retour à la vie civile. Il a même proposé des postes du gouvernement aux rebelles qui déposent les armes. « Les militants les plus durs parmi les talibans, membres d’Al-Qaëda ou d’autres groupes extrémistes, ne seront pas acceptés », a néanmoins indiqué le président.

Adoptant la même politique de réconciliation vis-à-vis des rebelles, le gouvernement pakistanais a également décidé de tendre la main aux talibans afghans, y compris à leurs chefs, pour contribuer à la réconciliation chez son voisin, a déclaré samedi le ministère pakistanais des Affaires étrangères. « Nous tentons de leur tendre la main, à tous les niveaux. Nous voudrions tous voir nos efforts couronnés de succès mais pour l’heure, c’est très difficile à dire », a dit le porte-parole du ministère, Abdul-Basit.

A l’attente d’une lueur d’espoir pour ce pays déchiré, la Commission électorale afghane indépendante (IEC) a reporté, dimanche, les législatives prévues le 22 mai prochain jusqu’au 18 septembre, en raison des problèmes de sécurité, des incertitudes et du défi logistique, a déclaré Fazal Manawi, un haut responsable de l’IEC.

Or, pour l’heure, aucune lueur d’espoir ne paraît à l’horizon. Comme prévu, cette politique de main tendue n’a remporté aucun fruit avec les deux principaux groupes rebelles qui ont rejeté cette semaine l’offre du président afghan et d’Islamabad à la fois. Selon un porte-parole des rebelles, les talibans ne sont pas à vendre. « Si nous étions tentés par l’argent, nous aurions accepté ce que les Américains voulaient avant l’invasion et nous serions aujourd’hui au pouvoir avec plein d’argent », a affirmé le porte-parole. Parallèlement, un porte-parole de Gulbuddin Hekmatyar, considéré comme l’un des plus importants chefs de guerre conduisant l’insurrection en Afghanistan, a déclaré que les conditions posées par M. Hekmatyar restaient inchangées : retrait des troupes étrangères du pays, cessez-le-feu, libération des prisonniers et mise en place d’un gouvernement d’intérim. Selon certains experts, les talibans rejettent les offres de Karzaï car ils n’ont pas confiance en lui, ils pensent qu’il les trahira et qu’il les livrera ensuite aux puissances étrangères. « Le gouvernement afghan doit donc redoubler d’efforts pour convaincre les talibans de renoncer au terrorisme et de travailler avec Kaboul », affirment les experts.

Les talibans plus forts

En effet, cette politique de réconciliation intervient dans un moment critique où les talibans sont devenus plus actifs que jamais dans le pays. La semaine dernière, ces insurgés ont gravement frappé le centre de Kaboul, le transformant en champ de bataille pendant plusieurs heures quand un groupe d’au moins sept talibans — et jusqu’à vingt selon leur porte-parole — a attaqué le centre de la capitale, y semant la terreur. L’opération commando menée par des personnes lourdement armées et munies de ceintures d’explosifs visait le palais présidentiel, des ministères et un centre commercial au cœur de la capitale. Les rebelles ont ainsi adressé un message au gouvernement afghan et aux forces internationales : nous pouvons frapper où et quand nous le voulons. En attaquant le centre de Kaboul — seul endroit d’Afghanistan où la sécurité est sous le contrôle des forces afghanes et non des 113 000 soldats des forces internationales — les talibans ont mis en lumière la fragilité de la police et de l’armée, estiment les experts.

Le volet civil, première préoccupation américaine

A la veille de la conférence de Londres où le président afghan, Hamid Karzaï, a annoncé qu’il présenterait son nouveau programme de réconciliation aux talibans, les puissances occidentales, entre autres l’Allemagne, la Grande-Bretagne et à leur tête les Etats-Unis, ont fait du volet civil et de la réintégration des talibans dans la société leurs deux priorités par excellence. N’oublions pas que déjà la stabilisation de l’Afghanistan était en tête de l’agenda de la politique étrangère du président Barack Obama depuis son accession au pouvoir. Toutefois, ce pays reste jusqu’à présent confronté à des difficultés en matière de sécurité et sur le front social. « Les talibans font partie du paysage politique en Afghanistan », a reconnu samedi le secrétaire américain à la Défense Robert Gates, tout en laissant entendre que leur réintégration n’était possible que s’ils déposaient les armes et participaient à des élections, entre autres. « La question est de savoir s’ils sont prêts à jouer un rôle légitime dans le processus politique en cours, à savoir participer aux élections, cesser d’assassiner les responsables des autorités locales et de tuer des famille », a dit M. Gates, en regrettant que Washington ait, dans les années 1990, « abandonné » l’Afghanistan et « rompu » avec le Pakistan. Selon lui, cette « grave erreur » a conduit à la montée en puissance des extrémistes dans la région. Saluant le nouveau plan de Karzaï concernant la réintégration des talibans, M. Gates a estimé qu’il lui semblait peu probable que les chefs rebelles acceptent une réconciliation avec le gouvernement, assurant toutefois que des talibans de rang inférieur pourraient être ouverts à un processus de paix, car ces derniers se battent pour de l’argent ou pour la protection  de leurs familles.

Reconnaissant que la communauté internationale a contribué à l’épanouissement des talibans, Richard Holbrooke, émissaire spécial du président américain pour l’Afghanistan et le Pakistan, a constaté les lacunes de la stratégie internationale déployée après le renversement du régime taliban en 2001. Un exemple : « On dépensait plus d’argent pour l’éradication du pavot que pour le développement de l’agriculture afghane ». Un autre : « La coordination de l’effort civil a été un manquement majeur » de l’action internationale jusqu’à présent. Selon l’émissaire américain, l’accent sera mis, lors de la conférence internationale de Londres, sur le volet civil, la nécessité de renforcer les institutions afghanes et la consolidation du rôle de l’Onu.

Dans le cadre des efforts internationaux visant la reconstruction et la stabilité de l’Afghanistan, la secrétaire d’Etat américaine, Hillary Clinton, a dévoilé cette semaine une stratégie civile à long terme pour l’Afghanistan et le Pakistan afin de rétablir la stabilité dans la région. « L’engagement civil américain dans ces deux pays continuera après le retrait de nos troupes et les Etats-Unis se sont engagés à nouer des liens durables avec ces deux pays », a affirmé Mme Clinton. La stratégie comporte une augmentation importante du nombre d’experts civils déployés dans les ministères du gouvernement central afghan et dans les provinces du pays. Elle propose également plusieurs nouveaux moyens pour lutter contre le trafic de drogue — qui est devenu une source de revenus fondamentale pour beaucoup de fermiers afghans, tels que le développement de l’agriculture et le démantèlement des réseaux de trafic de drogue. Selon la stratégie, le gouvernement américain soutiendra également les efforts du gouvernement afghan pour réintégrer les talibans qui ont abandonné Al-Qaëda et ont cessé les violences.

Le président américain, Barack Obama, a annoncé en décembre dernier que les Etats-Unis enverraient 30 000 soldats supplémentaires en Afghanistan et commenceraient à en retirer dès juillet 2011. Les alliés des Américains ont également promis d’envoyer 6 800 soldats supplémentaires dans le pays.

Depuis trois ans, la rébellion menée par les talibans a gagné du terrain en dépit de l’augmentation régulière du nombre de soldats étrangers en huit ans, qui atteint aujourd’hui 113 000, dont environ 71 000 Américains.

Maha Al-Cherbini

 




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