Musique.
La chanteuse portugaise Mariza a donné la semaine dernière
deux concerts à l’Opéra du Caire et à Alexandrie, confirmant
sa passion pour le « fado ». Sa voix incarne l’âme d’une
nation.
La
Diva de la mélancolie
Son
chant est capable d’exprimer toutes les émotions, du cri de
douleur à la confidence intime. Sa voix couvre toutes les
tessitures, du grave à l’aigu. Sa silhouette frêle et
longiligne épouse tous les rythmes de la musique.
Elle,
c’est Mariza la chanteuse portugaise que beaucoup
considèrent comme l’héritière de la grande Amalia Rodrigues
qui, la première, avait fait connaître le « fado » hors des
frontières du Portugal.
Mariza a
reçu d’ailleurs le prix de la fondation Amalia Rodrigues «
pour avoir fait connaître la musique portugaise dans le
monde entier ». Sans compter les nombreuses distinctions,
décorations et nominations qu’elle a reçues de par le monde
au cours d’une carrière qui n’a commencé qu’il y a quelques
années.
Le mot «
fado » vient du latin « fatum » (destin). Lorsqu’on demande
à Mariza pourquoi le fado est imprégné généralement de
tristesse, elle rectifie « non pas la tristesse, mais la
saudade », cette sorte de mélancolie qui exprime le désir de
quelque chose qui manque. En fait, « le fado peut exprimer
toutes les émotions ».
Née au
Mozambique de parents portugais, avec une grande mère
africaine, c’est à Lisbonne, berceau du fado, qu’elle s’est
familiarisée avec ce chant dans la taverne tenue par ses
parents. Encore enfant, elle écoutait tous les soirs les
chanteurs. Mais étant obligée d’être couchée à 22h, elle
quittait souvent sa chambre en cachette pour continuer à les
écouter. Comme tous ses collègues, elle n’a jamais pris de
leçons de chant mais a appris son métier « sur le tas ».
Ce qui
ne l’empêche pas d’ailleurs d’apprécier la musique classique
(Bach) et l’opéra (Puccini). Ses chanteuses préférées sont
Maria Callas, Barbara Hendricks et Cecilia Bartoli, et pour
la musique arabe Oum Kalsoum.
A la
lecture du programme du concert de Mariza à l’Opéra du Caire,
on aurait pu craindre une certaine monotonie : 17 fados
chantés par la même chanteuse. Il n’en fut rien, chaque
pièce possédant son caractère propre, admirablement mis en
relief par Mariza.
De plus,
elle s’était entourée de musiciens jouant des instruments
hors pair, l’un d’eux jouant de la guitare portugaise, qui
s’apparente plus à notre « oud » qu’à la guitare espagnole.
Son percussionniste se livra, lui, à un solo de batterie
échevelé qui fit chavirer la salle.
Mariza
sut gagner le cœur du public par la chaleur et la sincérité
qui se dégagent de sa personnalité. En dialoguant avec les
spectateurs, elle leur a fait partager son amour pour
Lisbonne et pour le Portugal, se révélant ainsi une
ambassadrice de charme pour son pays. Nous ne serions pas
étonnés si l’on relevait cette année une augmentation
notable du nombre de touristes égyptiens au Portugal ...
Il est
d’autant plus dommage qu’à la sortie du concert, le public
n’ait pas pu se procurer des CDs de Mariza, qui brillaient
par leur absence.
On
aurait aimé par exemple, pouvoir écouter son dernier album
Terra, qu’elle considère comme le début d’un nouveau cycle
dans son parcours artistique : « Durant cette année de
tournée internationale, j’ai eu la chance de découvrir
d’autres peuples et d’autres cultures. J’ai voulu avec cet
album montrer à mes fans mes progrès en tant que chanteuse
et en tant qu’être humain. Pourquoi l’ai-je appelé Terra ?
Peut-être parce que j’ai toujours eu les pieds sur terre et
aussi parce qu’en l’enregistrant, j’ai eu l’impression de
commencer un nouveau voyage ... ». Terra est un album
portugais mais destiné au monde entier.
Selim
Sednaoui