Expositions.
Adel Al-Siwy raconte ses propres histoires à travers des
œuvres mêlant souvenirs du passé, faits réels et images
illusoires.
Petites fables en peinture
En
regardant les tableaux récents de Adel Al-Siwy exposés à la
galerie Ofoq, un sourire se dessine sur nos lèvres, un
souvenir lointain s’impose et une histoire est contée.
Chaque peinture nous plonge dans un univers différent et
suscite une vive émotion. On réfléchit à ces personnages,
animaux et créatures. On déchiffre leurs histoires,
cherchant un trait de ressemblance avec les miennes. Dans ce
monde illusoire, on reconnaît les scènes familières et
symboliques de notre vie. Ce ne sont pas des histoires
simples, mais plutôt « des fables » propres à Siwy, d’où le
titre de son exposition. Un peu magiques, drôles et
illusoires, ces fables de peintures s’expriment à haute voix.
Ce, à travers les grandes taches de couleurs, les lignes
égarées dans des compositions corporelles irréelles et des
couches de matériaux variés sur la toile, comme le papier et
le bois.
« La
plupart des tableaux qui m’enchantent, comportent, en fin de
compte, des histoires … Des peintures qui personnifient
certains espaces, créatures et objets. Quelquefois,
certaines œuvres abstraites m’ont étonné par leur force et
leur fermeté, pourtant l’abstraction ne touche mon cœur
comme le font les histoires. Jusqu’à présent, les lois de la
peinture abstraite, toutes seules, n’ont pas réussi à
m’attirer. Je crois que les formes, les symboles, les signes
et les grands préceptes que recèlent les histoires sont la
meilleure création des hommes », souligne Al-Siwy. Comme
d’habitude, le peintre s’intéresse à la personnification et
la représentation de l’homme. Ces tableaux en 2009, et
quelques-uns en 2008, reprennent des histoires variées de la
vie de l’être humain et révèlent plusieurs phases de
l’expérience de l’artiste. A chaque tableau son titre, son
mot-clé pour une histoire longtemps dissimulée chez
l’artiste. Les portraits dictent alors ses anecdotes et
renvoient à des souvenirs intimes. Bahgouri vêtu en
Rembrandt est un hommage au maître du portrait et de la
caricature Georges Bahgouri. Un témoignage plein de gaieté
et d’humour évoquant la nature d’un artiste complaisant.
L’élégant du village est le portrait d’un brun, adoré par
les villageois, jouant le jeune premier. Le portrait garde
une certaine longueur et témoigne d’un style influencé par
l’art et la culture africains.
Traits
empruntés de l’Afrique
Dans
beaucoup de peintures, Al-Siwy aborde le corps et ses
positions variées. Il crée des personnes atypiques.
Aboul-Saoud est une peinture ayant la forme d’un cercle de
187 cm de diamètre. Aboul-Saoud est un personnage fictif
reprenant l’allure d’un Africain et d’un djinn au pot
magique. Le corps humain est associé à l’animal dans A
propos de la solitude. L’homme devient un animal vaniteux à
quatre pattes et une longue queue. Il s’enferme et se
contente d’errer tout seul.
La femme
avec ses rondeurs et ses courbes est séduisante. Zooba est
une jeune fière de son corps. Sans cheveux, le visage garde
un regard doux, des lèvres sensuelles et un front lisse. Des
traits empruntés de l’Afrique. Miss Abdine est plutôt un jeu
de couleurs et plus de féminité. Le corps en rose, ayant des
courbes très accentuées, est vêtu d’habits serrés en blanc.
Dans d’autres peintures, il s’agit d’un duo en dialogue.
L’explorateur et la citoyenne dévoile et oppose deux mondes
: celui d’un homme occidental fumant le pipe et une femme
nue à l’exemple africain. Il retrace alors l’histoire d’une
découverte et d’une attraction envers l’Autre, bien
différent. Ne le blâme pas évoque une conversation entre un
couple furieux. La femme en orange rougeâtre et l’homme en
blanc, symbolisant la colère et le calme.
Biju et
Abou-Lamea, un duo comique du cinéma égyptien, se
confrontent sur la toile et évoquent les œuvres d’Al-Siwy
sous le titre Des Stars du ciel réalisées quelques années
auparavant. Les deux comédiens sont, cette fois-ci, associés
à des icônes sacrées évoquant les figures du Fayoum avec des
halos de saint. Le dialogue continue aussi entre les femmes,
surtout entre la mère et sa fille. Puisant dans le folklore
et la vie populaire, Al-Siwy retrace l’histoire de dix
femmes égyptiennes dans dix longs tableaux en noir et blanc.
Ce sont des duos de mère et fille : Om Samra et Samra, Om
Abir et Abir … Chaque duo met en évidence, à travers le
physique, la relation affectueuse, l’opposition entre la
vieillesse et la jeunesse et les détails de ressemblance.
Même,
Al-Siwy en reproduisant les paysages de Vérone ou de Venise,
les silhouettes des hommes ne s’effacent pas. Ils donnent à
la peinture une certaine nostalgie, celle de l’artiste ayant
séjourné en Italie dans les années 80. Ces silhouettes sont
anonymes pour nous, mais pour Al-Siwy ce sont des personnes
très présentes dans sa mémoire.
May
Sélim