A 33 ans, l’acteur syrien Tayem
Hassan a une vingtaine d’œuvres à son actif, dont
plusieurs méga-succès. Dans Meccano, actuellement en salle,
le comédien est pour la première fois en tête d’affiche d’un
film égyptien.
Une ascension en contrastes
Depuis la sortie de son premier film, le comédien Tayem
Hassan fait découvrir au public moult talents. En peu de
temps, il a réussi à attirer l’attention par une panoplie de
feuilletons et de personnages, lesquels ont défrayé la
chronique. Actuellement, il incarne avec brio le rôle d’un
jeune homme atteint d’amnésie partielle dans Meccano de
Kamla Abou-Zikri. « C’était un rêve de jouer dans le cinéma
égyptien ! », s’exclame l’acteur sur un ton jovial, en
ajoutant : « Depuis mon enfance, je considérais l’Egypte
comme La Mecque des artistes arabes. J’apprenais par cœur
les dialogues des films égyptiens en noir et blanc. J’étais
fasciné par les personnages joués par la défunte Hoda
Sultan. Pour moi, elle symbolise la femme à la fois forte et
séduisante ».
Meccano compte parmi les grands succès de la saison, c’est
d’ailleurs son premier grand rôle au cinéma, loin du drame
télévisé. Depuis des semaines, Tayem Hassan ne parle que de
ce film et ne fait que suivre les préparatifs de sa sortie
en salle.
Né à Tartous en Syrie, l’enfant Tayem Hassan — et non pas
Al-Hassan comme le prononcent certains — a très tôt la
passion artiste qui le dévore. Il grandit en cette ville
côtière et manifeste très jeune le désir d’embrasser une
activité de comédien. Il a bien failli être avocat comme le
souhaitait son papa, mais comme il le dit bien : « Etre
comédien me va beaucoup mieux ! ».
Il était étudiant de droit par correspondance à l’Université
de Beyrouth, les problèmes financiers dont souffrait sa
famille à l’époque lui ont mis des bâtons dans les roues. «
Mon père, ancien journaliste, a décidé de partir pendant mon
enfance pour l’Allemagne où il a étudié la littérature. En
rentrant, il a déménagé de Tartous pour que nous commencions
une nouvelle vie à Damas, avec sa nouvelle carrière de
professeur de langue allemande ». Les souvenirs affluent
dans l’esprit du comédien. « Face aux dépenses assez lourdes
de la vie dans la capitale, mon père m’a conseillé de
quitter le droit pour m’inscrire à l’Institut des arts
théâtraux en Syrie. C’était une solution magique pour faire
d’une pierre deux coups : épargner les frais de
l’Université libanaise et réaliser mon rêve de comédien ».
Enthousiaste, il s’est présenté à la direction de l’Institut
des arts pour s’inscrire pour les tests de sélection. Une
belle surprise l’attendait : le comédien Gamal Soliman était
le président du comité, avant de devenir, après, l’un de ses
chers professeurs. « Je me souviens que j’étais mort
d’inquiétude, toutefois, j’ai réussi à jouer l’une des
scènes de Hamlet de Shakespeare. Il y avait 15 000 candidats
et ils m’ont accepté ».
Encore étudiant en première année, Tayem Hassan n’hésitait
pas à s’essayer au drame télévisé. Sa passion pour
l’interprétation était si forte qu’il ne pouvait pas
patienter d’obtenir son diplôme pour commencer sa carrière.
Il participe alors à un feuilleton pour enfants intitulé Kan
yama kan (il était une fois). Et c’est ainsi que son conte
de fée a commencé.
En fait, il y a des rencontres qui sont déterminantes dans
une vie. Celle de Tayem Hassan avec Hatem Ali en fait
partie. Ce réalisateur syrien a choisi le jeune Tayem pour
participer au feuilleton Al-Zir Salem, lui confiant le rôle
d’Ibn Kolayb, frère de Salem. Grâce à ce rôle, le jeune
acteur devient « un projet de nouvelle star ». « Ce
feuilleton a été diffusé sur presque toutes les chaînes
satellites. Toutefois, j’avoue avoir souhaité pouvoir
présenter ce même rôle aujourd’hui, après ces années
d’expérience, afin de l’incarner différemment », confie le
comédien.
Une première réussite et puis, c’est la loi des séries. Deux
ans plus tard, le duo Hatem Ali et Tayem Hassan se reforme
pour un nouveau drame historique, cette fois-ci à trois,
puisqu’ils accueillent Gamal Soliman. Ce dernier, jouant le
rôle de Saladin dans un feuilleton du même nom, inspire,
sans limites, son disciple qui jouait le rôle d’Al-Aded,
dernier calife fatimide. « Je suis l’un des grands fans de
Gamal Soliman, j’avais la chance de partager la vedette avec
lui dans plusieurs feuilletons dont Saqr Qoraych,
Al-Taghriba al-falastiniya, Molouk al-tawaëf (rois des
sectes) et Ala toul al-ayam (tout le long des jours) ».
Moins connu que Gamal Soliman, Tayem Hassan a tout de même
trouvé sa place dans le monde des stars. « Il a fallu
rectifier le tir, dit-il en lançant son sourire habituel. On
a cru que j’étais vraiment sorti des ténèbres de l’Histoire
tellement j’avais joué dans des feuilletons historiques !
J’ai dû prouver que j’étais un comédien, capable de jouer
tous les rôles ».
Dans sa filmographie, il y en a un peu pour tous les goûts.
Même si elle se compose surtout d’œuvres biographiques. « Je
trouve une grande joie en vivant dans la peau de ces grandes
personnalités. Je me sentais comme défiant ma muse,
plongeant jusqu’au bout dans leur vie, avec tous ces détails
qui me gênaient parfois », avoue-t-il.
Tayem Hassan a commencé à jouer sur les contrastes, passant
du drame social et politique, comme Al-Taghriba
al-falastiniya, dans lequel il campe le rôle d’un militant
palestinien, à des comédies romantiques telles que Ala toul
al-ayam où il incarne le rôle de Nabil, un jeune mari
romantique qui essaye de surpasser ses problèmes quotidiens.
D’un simple acteur de seconds rôles, il se transforme alors
en un jeune talent, assailli de propositions pour le grand
écran. « J’ai noué amitié avec beaucoup de grands comédiens
syriens et arabes, ce qui m’a beaucoup aidé sur le plan
social », souligne-t-il d’une voix timbrée.
Quelques figurations et petits rôles, puis c’est la grande
révélation : Nizar Qabbani de Bassel Al-Khatib, qui impose
un véritable tempérament, au regard d’acier et à la dégaine
bien dessinée. Car il s’agit de la biographie du poète
syrien Nizar Qabbani, auquel le comédien donne une
consistante personnalité, que récompense un Prix
d’interprétation au Festival du Caire pour les œuvres de
Radio et de Télévision.
Devenant en l’espace de cette biographie pleine d’émotions
et de souffrance le « chouchou » des filles, Tayem Hassan a
su prouver, en fait, que grâce à ses choix de rôles parfois
surprenants, il est l’un des acteurs les plus doués de sa
génération.
Toutefois, il fallait attendre jusqu’en 2007 pour avoir le
grand boom. C’est à travers le feuilleton égyptien Al-Malek
Farouq (le roi Farouq, dernier roi d’Egypte) que le comédien
s’est gravé un nom. L’œuvre est devenue un grand succès
grâce à la large palette de personnages historiques, tous
plus bouffons les uns que les autres. C’est sur cette vague
ascendante que les propositions cinématographiques ont
afflué, permettant à l’acteur d’atteindre son objectif.
Le feuilleton a été un vrai succès, et le personnage est
devenu le sujet central de la critique. Cet air naturel et
spontané a intéressé les spectateurs. « J’avoue avoir eu
peur en lisant le scénario. J’ai passé des jours à réfléchir
car je craignais qu’un tel rôle ne mette ma carrière dans
l’embarras, mais c’est mon amour pour les aventures
artistiques qui m’a aidé à trancher », se souvient-il. En
fait, le rôle lui allait comme un gant.
Tayem Hassan n’obéit pas tout à fait au prototype de la
star. Au contraire, il fait partie de cette race de
comédiens qui travaillent peu, mais qui laissent de
profondes traces. Il aime ce qu’il fait. « Tayem Hassan n’a
pas d’ego, ce qui est rare dans ce milieu », insiste le
comédien Salah Abdallah, qui a partagé avec lui la vedette
dans Le Roi Farouq. « J’ai promis à mes parents et
professeurs de bien choisir mes rôles et je pense avoir tenu
ma promesse », indique Tayem.
L’impression qui ressort c’est aussi le sentiment que le
jeune homme est plutôt discret. Souvent à l’ombre, il donne
le sentiment de n’être là que pour travailler, parce que ça
lui plaît, et non pas pour avoir une belle image et
compagnie. Un point plutôt positif, surtout quand l’on
constate qu’il est loin d’être physiquement déplaisant.
Contrairement à beaucoup de stars de sa génération, il ne
joue pas de sa belle allure, mais privilégie ses
performances. C’est comme relever un défi prouvant qu’il est
autre chose qu’un simple jeune homme beau et attirant. «
Quand on travaille dur, on le fait avant tout pour soi-même.
Je ne cesse pas d’essayer et de réessayer pour faire mieux
». Il garde l’allure du jeune homme romantique, ce qui lui
va bien et colle même avec son prénom. « Tayem est le nom
d’un ancien clan arabe, mais il signifie également celui qui
fond en amour », explique-t-il.
Il y a des artistes qui se livrent à cœur ouvert, d’autres
non. Lui, il fait partie de la deuxième catégorie. Chaque
fois qu’on a essayé de percer ses secrets, il a toujours su
brouiller les pistes habilement. Les rumeurs le suivent
comme son ombre. Des nouvelles sur des aventures amoureuses
ou sur ses combats professionnels trouvent presque souvent
leur place dans les journaux ou sur Internet. Mais il ne
s’attarde pas trop à y répondre, disant : « Il faut
uniquement travailler et laisser le public juger ». L’acteur
insiste sur l’importance de la stabilité familiale et sur la
place de sa femme comédienne Dima Bayaa et leurs deux
enfants. Bref, c’est un homme à faire chavirer les cœurs.
Yasser Moheb