Al-Ahram Hebdo,Nulle part ailleurs | SOS 16 000
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Rédacteur en chef Mohamed Salmawy
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 Semaine du 11 au 17 février 2009, numéro 753

 

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Nulle part ailleurs

Enfance. Une ligne téléphonique de secours concernant cette tranche d’âge existe depuis trois ans. Les appels reçus reflètent un aspect important du malaise social ambiant.

SOS 16 000

1,23 million d’appels reçus sur la ligne de secours de l’enfant au cours des trois dernières années. Depuis 2006, la ligne est en fonction. C’est au numéro 16 000 qu’on peut appeler pour s’informer ou porter assistance à un enfant contre n’importe quel danger, maltraitance ou violence. La ligne, qui couvre les 29 gouvernorats de l’Egypte, dépend du Conseil national de l’enfance et de la maternité. Dans une petite pièce au troisième étage sont réunies une dizaine de personnes. Des psychologues et sociologues des deux sexes, les yeux fixés sur un écran, la main posée sur le combiné, ils reçoivent les appels. Une sonnerie brise le silence régnant dans la pièce et la personne qui reçoit le signal rouge sur son écran décroche. C’est à Radwa de répondre : un père téléphone pour savoir comment réagir avec son fils en crise d’adolescence. Il a découvert qu’il se droguait, volait de l’argent et passait des mois hors de la maison. Après l’avoir bien écouté, Radwa lui pose quelques questions, puis lui demande d’attendre pour organiser un entretien immédiat avec lui en présence d’un psychiatre et d’elle-même. Une fois l’appel terminé, Radwa vérifie si elle a bien inscrit toutes les informations sur son ordinateur. « Je dois suivre ce cas durant quelques jours pour savoir comment évoluent les choses avec le père et vérifier si les conseils du psychiatre ont porté leurs fruits, ou si le père a encore besoin de notre aide », dit Marwa, en ajoutant qu’elle ne peut clore aucun dossier tant que le problème n’est pas résolu. Selon Chérif Abou-Chadi, chercheur en statistiques, les consultations psychiatriques sont à la tête des appels, elles en représentent 55 %. Ce genre d’appels, ainsi que ceux qui concernent les enfants de la rue et les urgences médicales, sont les trois genres de coups de fil qui nécessitent un entretien à trois. Une nouvelle sonnerie retentit, c’est Ali qui décroche, personne au bout du fil, la ligne reste pourtant ouverte. Ali attend quelques minutes avant de poser le combiné. « Même si la personne ne répond pas, ou désire faire du harcèlement par téléphone, on ne ferme pas la ligne tout de suite, car peut-être cela peut nous mener à détecter un cas d’enfant qui a besoin d’assistance et c’est ce qui arrive le plus souvent », dit Ali. Il cite l’exemple d’une dame qui les a appelés pour signaler que probablement sa voisine et son mari ont tué leur petite fille. Cette femme a précisé qu’elle entendait beaucoup de bruit chez eux, l’enfant criait tout le temps et appelait au secours. Puis, un jour, les parents ont annoncé la mort de leur fille après être tombée de son lit. Ali confie n’avoir pas négligé cette histoire. Et bien que la fille ait été enterrée, la police a déterré le corps pour faire une autopsie. Résultat : la dame qui a appelé avait raison, la fille a succombé, victime de la maltraitance de la part de son beau-père. Ce dernier a été condamné à 10 ans de prison. Ali affirme que dans ce local, chaque appel est pris au sérieux et l’on fait tout le nécessaire, même si par la suite l’on découvre que rien n’est vrai, car il n’est pas question de courir le risque de ne pas sauver un enfant.

Douze responsables reçoivent les coups de fil, en plus des volontaires, 35 coordinateurs entre le conseil et les différents ministères, et 179 délégués travaillant pour différentes ONG partout dans le pays. Une équipe qui travaille de plein cœur et à longueur de journée. Pas de congés ni de jours fériés, sauf un système de permanences, afin de reposer le staff. Le téléphone n’arrête pas de sonner, des problèmes de maltraitance, d’abus sexuels, de harcèlement, des crises d’adolescence, les supplices des enfants sont nombreux, ils éclatent dans cette petite pièce. Manal Chahine, responsable de la ligne de secours des enfants, explique qu’après trois ans de travail et avec tous les appels reçus, cette ligne de secours est devenue comme un miroir qui reflète l’état de la famille et la société toute entière. Elle ajoute que la catégorie d’âge d’enfants la plus confrontée aux problèmes se situe entre un jour et six ans, c’est presque 30 % des appels. En général, ces derniers souffrent du manque de couveuses, du manque d’hygiène ou de problèmes de rentrée scolaire. 17 % entre 7 et 9 ans et 24 % concernent les enfants entre 10 et 12 ans qui souffrent de maltraitance de la part de la famille ou des enseignants et du problème de l’excision. Quant à ceux qui ont entre 13 et 15 ans, ils représentent 18 % des appels. Ce sont surtout des problèmes dus à la crise d’adolescence ou à la drogue.

L’importance de la médiatisation

En effet, ces chiffres diffèrent et varient suite à la couverture médiatique réservée à une question qui est mise en exergue. Cela a été confirmé lorsque tous les médias parlaient de harcèlement. Le nombre d’appels reçus avait dépassé les normes, tous se plaignaient de cela. La même chose s’est répétée lorsqu’on avait abordé le sujet des crimes d’enfants ou du problème de l’excision.

« Dès qu’on reçoit un appel, on contacte immédiatement le ministère ou la direction concernés par le problème, à travers nos représentants se trouvant dans les quatre coins du pays. On doit recevoir une réponse immédiate, car si le problème n’est pas résolu rapidement, on demande à ce qu’une enquête soit faite dans cette direction pour en connaître la raison », dit Chahine en appuyant sur l’importance de cette ligne et sa contribution auprès du Conseil de l’enfance et de la maternité sous la surveillance de la première dame. Chahine confie que ce prestige donne un grand pouvoir aux délégués de la ligne pour donner une confiance à tout le monde et résoudre les problèmes.

Mais on ne nie pas qu’il y a quand même des ministères qui ne déploient pas de grands efforts pour collaborer, à l’exemple de la Solidarité sociale qui met trop de temps et dresse des obstacles avant de réagir. Les aides psychiques présentées à travers la ligne constituent les 40 %, donc la majorité. Ensuite viennent les services d’informations autour de l’excision, puis ceux autour de l’hygiène, de l’assurance sociale et l’éducation. Cependant, il y a des gens qui appellent juste pour parler, s’éclater et c’est tout. Des gens, comme explique Chahine, qui sont stressés et ont besoin de dialoguer avec quelqu’un. En écoutant les parents, on présente un service indirect aux enfants, car si le père et la mère sont soulagés, ils seront sans doute moins violents avec leurs enfants. Un autre coup de fil, quelqu’un décroche, c’est un homme qui représente tous les habitants de sa rue et qui appelle pour que les responsables de la ligne leur trouvent une solution concernant les bouches d’égouts restées ouvertes et que l’on trouve partout. « Elles représentent un grand danger pour nos enfants », c’est le mot-clé qui a fait réagir tout de suite les responsables de la ligne de secours, qui par la suite se sont dirigés vers la municipalité du quartier pour demander à ce qu’on les bouche immédiatement. En fait, le concept du secours de l’enfant est vraiment vaste, alors que la ligne reçoit des appels qui demandent de secourir les chiens errants ou qui se plaignent des classes sans fenêtres, des écoles avec des portes qui ne se ferment pas, des élèves qui font l’école buissonnière. Et même si ce sont des problèmes qui concernent les enfants indirectement, la ligne doit les résoudre. Manal Chahine affirme que le nombre d’appels reçus est en recrudescence d’une année à l’autre et aussi le genre de plaintes diffère. Des indices qui reflètent que les gens ont de plus en plus confiance dans cette ligne qui présente des services crédibles et efficaces, ce qui montre que les gens sont devenus plus avisés. « On trouve de plus en plus de gens qui appellent pour s’informer sur la crise d’adolescence, l’excision ou la manière idéale pour éduquer les enfants, et même d’autres sujets dont on ne discutait jamais. Aujourd’hui, cela se fait automatiquement comme si on y était habitué », dit Chahine, en affirmant qu’elle considère cela comme un grand succès pour la ligne, surtout que 95 % des gens qui appellent sont d’un niveau social et éducatif modeste.

Une affaire de société

Fièrement, elle poursuit que la ligne contribue au changement de la société. Une preuve, la plus récente, c’est la nouvelle loi de l’enfant qui vient d’être annoncée. Grâce au rôle que joue la ligne comme intermédiaire entre les enfants et leur monde et société, cette loi s’est basée sur les souffrances réelles des enfants et les besoins que la ligne a soulignés aux responsables qui doivent instaurer la loi. « On a travaillé ensemble car on touche aux véritables souffrances des enfants de très près », dit Chahine. Cette dernière affirme, après son expérience de trois ans, que la loi seule ne peut pas résoudre les problèmes des enfants, car ils ne concernent pas seulement cette catégorie, même si elle est la plus menacée et la plus touchée, la situation concerne la famille égyptienne et la société en général. « Je suis déçue par la quantité de violence adressée contre les enfants, soit dans la famille, l’école ou la rue. Si on ne profite pas de ces réalités qu’on voit maintenant très clairement devant nos yeux, cela peut nous entraîner tous vers un fossé sans fin », achève Chahine.

Hanaa Al-Mekkawi

 




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