Al-Ahram Hebdo, Evénement | Crise mondiale version arabe
  Président Abdel-Moneim Saïd
 
Rédacteur en chef Mohamed Salmawy
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 Semaine du 2 au 8 décembre 2009, numéro 795

 

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Dubaï. Avec le moratoire sur le remboursement des dettes demandé pour le conglomérat public Dubai World, la région est plongée dans la stupeur de l’éclatement de sa bulle immobilière. Avec un effet domino à craindre.

Crise mondiale version arabe

C’est là où l’on s’y attendait le moins que la crise économique et financière mondiale vient de frapper le plus fort dans la région. L’émirat de Dubaï, modèle du libéralisme économique, a annoncé mercredi dernier que, crise mondiale oblige, ses entreprises phare sont dans l’incapacité de rembourser leurs dettes. L’ampleur de la crise reste cependant ambiguë, ce qui a entraîné une vague de panique sur les marchés arabes. Les Bourses de Dubaï et d’Abu-Dhabi ont plongé de 8,3 % (la plus importante baisse jamais enregistrée en un jour) et 7,3 % respectivement, lors du premier jour d’échange après les fêtes du Grand Baïram, le 30 novembre, et ont continué le lendemain. La Bourse d’Egypte a, elle, perdu 7,97 % le même jour. Le Qatar et le Koweït ont de même été affectés et seule l’Arabie saoudite n’a pas subi de dégâts pour cause de vacances.

La banque Calyon Crédit Agricole prévoit que le manque de confiance qui découlera de cette annonce atteindra le marché du financement mondial et donc les pays voisins, même pétroliers, peineront à trouver le financement de leurs ambitieux projets d’infrastructure, au moins pour le court terme. Et cela, dans un rapport intitulé « Dubaï, l’après de la chute », diffusé le 27 novembre dernier.

La crise à Dubaï a surgi le 25 novembre quand l’émirat, célèbre pour sa démesure, a fait savoir que ses principales entreprises recherchaient un moratoire provisoire de leurs dettes de plusieurs milliards de dollars. En jeu, près de 80 milliards de dollars de dettes, dont une cinquantaine contractée par la holding gouvernementale Dubaï World et sa filiale immobilière Nakheel, qui construit des îles artificielles en forme de palmiers destinées aux riches et célèbres. Dubaï World a demandé à ses créanciers de geler le remboursement d’une partie de ses dettes s’élevant à 3,25 milliards de dollars pendant 6 mois. Un délai qui devrait permettre la restructuration de l’entreprise majoritairement publique, avec une petite tranche cotée au Nasdaq Dubaï.

Depuis que la crise mondiale a été révélée en septembre 2008, Dubaï a bien masqué l’ampleur de sa crise. En la qualifiant de « simple ralentissement », l’émirat a annoncé en février dernier un plan de secours de son économie, avec un gouvernement souhaitant s’endetter à hauteur de 20 milliards de dollars. Ainsi, plusieurs institutions financières ont acheté ses obligations émises pour l’occasion. Le premier à croire en sa capacité à rembourser a été Abu-Dhabi. L’émirat voisin qui possède 90 % du pétrole, ce qui fait des Emirats Arabes Unis (EAU) le cinquième producteur mondial. Il a déjà procuré à Dubaï 15 milliards de dollars via la Banque centrale des EAU et deux de ses banques privées. Aujourd’hui, il est dans une situation peu enviable, les banques d’Abu-Dhabi ayant prêté jusqu’à 30 % à Dubaï. Elles risquent ainsi de devoir payer un plus lourd tribut si la situation financière de Dubaï venait à se dégrader davantage.

« Nous devons souligner l’impact qu’auront cette exposition de Dubaï World et ses branches sur notre bilan et nos bénéfices », a déclaré un responsable d’Abu-Dhabi Commercial Bank à l’AFP sous le sceau de l’anonymat. « Oui, nous devrons constituer davantage de provisions. Ces dernières années, le marché de l’immobilier n’en était encore qu’à ses débuts à Abu-Dhabi, donc, comme d’autres banques, nous nous sommes diversifiés à Dubaï », a-t-il poursuivi. Abu-Dhabi Commercial Bank est exposée à hauteur d’au moins huit à neuf milliards de dirhams (quelque 2 milliards de dollars) à Dubaï World ou à ses branches, ce qui obligera la banque à passer de nouvelles provisions.

Premiers forfaits

Dans la région, l’impact de la crise immobilière de Dubaï n’est pas encore très clair. « Les événements de Dubaï sont des soubresauts qui confirment que nous avions raison de souligner que des incertitudes demeuraient et que la route risquait d’être cahoteuse », a commenté à l’AFP Athanasios Oprhanides, membre du conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne.

Les banques de la région sont les premiers forfaits de la crise. Mais leur degré d’exposition vis-à-vis des dettes des entreprises de Dubaï n’est pas encore connu. Par exemple, des sokouks (obligations islamiques) à hauteur de 3,5 milliards de dollars arrivent à échéance le 14 décembre, avec une période de grâce de 2 semaines. Un large spectre d’investisseurs internationaux, régionaux et locaux y sont souscrits, même si aucun communiqué n’avait été diffusé par les grandes institutions financières de la région au jour d’impression de l’Hebdo.

En défaut de liquidités, l’émirat ne pourra pas préserver le flux d’investissements directs qu’il maintenait dernièrement vers les pays arabes. En Egypte, par exemple, les EAU sont devenus le 3e plus grand investisseur étranger. Il y a aussi Etisalat, le 3e opérateur de portable, de grandes entreprises de construction, ou Dubaï Port World (DP), propriétaire de l’unique port privé dans le pays. « Rien n’est encore décidé. Mais il se peut, en raison de ce dernier problème à Dubaï World, qu’elle décide de remettre ses plans d’expansion du port, qui s’étendent sur les 15-20 ans à venir », estime Ismaïl Moubarak, conseiller au président du DP World en Egypte (Voir encadré). Plusieurs projets d’immobilier émiratis en Egypte ont déjà ralenti leur expansion, depuis le début de l’année, avec en tête Emaar Egypte.

Quant au  gouvernement de Dubaï, il s’est opposé à sauver l’entreprise Dubaï World. Reste à savoir ce que fera son voisin rival Abu-Dhabi. Mais une chose est sûre : l’éclat de ce modèle a terni. Et pour longtemps.

Salma Hussein

 

Une rivalité naissante ?

L’Egypte et les EAU formaient des partenariats fructueux dans l’immobilier, les télécoms ou encore les services financiers. Les investissements émiratis sont de 15,5 milliards de L.E. Quelque 200 000 Egyptiens travaillent aux EAU. C’était une époque d’épanouissement et de croissance. Aujourd’hui, la route des deux pays pourrait bien se séparer.

La ferveur économique entre l’Egypte et Dubaï risque de s’atténuer avec l’impossibilité de l’émirat de rembourser ses dettes. Le développement de Port Sokhna (mer Rouge) pourrait donner l’exemple d’années de rapports gagnant-gagnant en années de vaches maigres. C’est en 2008 que le numéro 4 mondial de la gestion des ports a acheté la concession de la gestion de Port Sokhna, quelques mois avant la crise mondiale. A l’époque, Ismaïl Moubarak, conseiller du président de l’entreprise de développement au Port Sokhna, DP World, avait expliqué à l’Hebdo que l’industrie du transport maritime ressentirait la crise mais dans un délai de 1 à 2 ans. « Et elle est arrivée », vient-il de lancer. Pour lui, il est encore difficile d’évaluer l’impact de la crise de Dubaï car « DP World gère 42 ports sur le plan mondial, ce qui diversifie ses risques et lui procure une certaine immunité ». La situation est d’autant plus ambiguë que les informations diffusées portent sur les filiales de l’investissement immobilier.

Mais si elle a réussi à passer à travers les mailles du filet, il ne fait pas de doute que DP World sera désormais touchée par la crise mondiale. Moubarak souligne que le rétrécissement du commerce mondial ne peut être négligé. Pour lui, la crise s’étendra vers la mi-2010 pour les plus optimistes, et vers la mi-2011, pour les plus réalites. « Déjà, à Port Sokhna, le volume des marchandises échangées a diminué de 25 %, et nous avons baissé toutes nos prévisions de profits et de revenus », ajoute-t-il. Cependant, à chaque crise ses opportunités. « J’ai du mal à le dire, vu les circonstances difficiles de notre maison mère. Mais si le nombre de navires passant par Dubaï diminue, ce sera au profit des ports égyptiens. Il en est de même pour les investissements qui vont peut-être bouder l’émirat pendant quelque temps. Et l’Egypte deviendra une destination régionale préférée », renchérit Ismaïl Moubarak. C’est ainsi qu’une rivalité pourrait faire surface.

S.H.

 

 

 




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