Al-Ahram Hebdo, Monde | Nouvelle crispation
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 Semaine du 2 au 8 décembre 2009, numéro 795

 

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Iran. L’Agence internationale de l’énergie atomique a émis cette semaine une résolution condamnant Téhéran pour avoir ignoré les revendications internationales en matière nucléaire. Une mesure qui ne dissuade pas la République islamique.

Nouvelle crispation

Punissant téhéran pour avoir caché l’existence d’un site nucléaire sensible et pour avoir continué à enrichir de l’uranium malgré les demandes répétées du Conseil de sécurité des Nations-Unies, le Conseil des 35 gouverneurs de l’Agence Internationale de l’Energie Atomique (AIEA), qui tente depuis des années de s’assurer que le programme nucléaire de l’Iran est à fin civile comme le répète Téhéran, a adopté, vendredi dernier, une résolution condamnant le programme nucléaire iranien suspecté d’être à des fins militaires, lui enjoignant de « suspendre » la construction du nouveau site. Sur les 35 pays membres du Conseil des gouverneurs, 25 ont voté en faveur de cette résolution. Les autres se sont abstenus. La résolution sera maintenant présentée au Conseil de sécurité de l’Onu, qui pourrait se prononcer sur une quatrième ronde de sanctions demandée par les pays occidentaux.

« Je ne pense pas que notre offre soit une option. Tout l’intérêt de l’offre est de désamorcer la crise », a affirmé Mohamad Al-Baradeï, directeur de l’AIEA, se référant à sa proposition de faire enrichir à l’étranger de l’uranium iranien pour alimenter un réacteur de recherche à Téhéran. M. Baradeï, qui doit quitter l’AIEA à la fin du mois après avoir passé 12 ans à sa tête, avait formulé cette offre de compromis fin octobre pour débloquer le dossier du nucléaire iranien, dans l’impasse depuis 2003. Tout au long de son mandat, il a tenté d’obtenir des clarifications sur la véritable nature du programme nucléaire iranien.

Selon les experts, cette récente résolution a son poids pour trois raisons. D’abord, elle prépare la voie à des sanctions que la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton a annoncées comme « paralysantes », si l’administration du président Barack Obama réalise, d’ici fin décembre, l’échec de sa politique d’ouverture envers l’Iran. Ensuite, il s’agit de la première à être adoptée à l’encontre de Téhéran depuis février 2006. Enfin, la résolution a obtenu l’appui de la Russie et de la Chine, les deux pays qui se sont opposés par le passé à la volonté des pays occidentaux d’imposer des sanctions au régime iranien. L’appui de Moscou et de Pékin à une résolution onusienne en ce sens reste pourtant incertain malgré leur appui à la résolution de l’AIEA, affirment les analystes.

Comme prévu, Téhéran a rejeté la résolution onusienne, la qualifiant de « théâtrale et inutile ». Dimanche, l’Iran a menacé de réduire sa coopération avec l’AIEA si les pays occidentaux ne mettent pas fin à leurs pressions sur Téhéran, a menacé le président du Parlement Ali Larijani. En effet, le Parlement iranien peut obliger le gouvernement à modifier ses rapports avec l’agence onusienne, comme cela avait été le cas en 2006 lorsque l’AIEA avait décidé de transmettre au Conseil de sécurité de l’Onu le dossier nucléaire iranien. « Cette initiative du groupe 5+1 montre qu’ils ne recherchent pas la négociation, mais à commettre une tricherie politique », a dénoncé M. Larijani.

« Remise en cause d’un processus constructif »

Toujours réticent, l’ambassadeur iranien à l’AIEA, Ali Asghar Soltanieh, a dénoncé samedi « une remise en cause d’un processus constructif ». « La grande nation iranienne ne cédera jamais ni aux pressions ni aux intimidations en ce qui concerne son droit inaliénable aux usages pacifiques de l’énergie nucléaire », a défié Soltanieh, rajoutant que cette résolution affectera évidemment le climat de coopération instauré avec l’AIEA. L’Iran a même assuré cette semaine qu’il pourrait se procurer lui-même la production du combustible nucléaire dont a besoin son réacteur de recherche si la communauté internationale ne lui en procure pas.

L’Iran disposerait actuellement, selon l’AIEA, de près de 1 800 kilos d’uranium faiblement enrichi à 3,5 %. Cette quantité est théoriquement suffisante pour produire ensuite la quantité d’uranium enrichi à plus de 90 % nécessaire pour fabriquer une bombe atomique. Pour les Occidentaux, le transfert du combustible iranien vers l’étranger permettrait d’apaiser les inquiétudes internationales en assurant un plus grand contrôle des stocks enrichis par Téhéran. La résolution de l’AIEA adoptée vendredi dernier a donc réclamé le gel immédiat des travaux ainsi que des éclaircissements sur les raisons d’être de cette installation et l’assurance qu’aucun autre site nucléaire n’a été dissimulé. Elle a aussi exhorté Téhéran à cesser toutes ses activités d’enrichissement d’uranium et à autoriser, sans restrictions, les inspections de l’Onu, conformément aux résolutions adoptées depuis 2006 par le Conseil de sécurité. Des revendications que Téhéran s’entête à rejeter dans leur intégralité.

L’Occident se félicite

Suite à l’annonce de cette résolution, la communauté internationale, qui a toujours accusé l’AIEA de mollesse face au régime iranien, s’est largement félicitée d’un pas « tant attendu ». Samedi, un haut responsable de la diplomatie américaine a souligné l’importance de la résolution parce qu’elle avait été approuvée par la Chine et la Russie, et qu’elle illustre « l’unité et la résolution parmi les Six » (Allemagne, Chine, Etats-Unis, France, Royaume-Uni et Russie). « La résolution envoie un signal fort à Téhéran et exprime la grave inquiétude internationale. Le fait que 25 pays de toutes les régions du monde ont voté ce texte montre l’urgente nécessité pour l’Iran de répondre à un manque de confiance international croissant quant à ses intentions », souligne Robert Gibbs, porte-parole du président américain.

A la veille de cette résolution, la Maison Blanche avait lancé une sévère mise en garde à l’Iran en le prévenant que la patience des Etats-Unis avait « des limites » et que la République islamique s’exposait aux conséquences de son refus de coopération nucléaire. « Le temps presse. Si l’Iran refuse d’honorer ses obligations, il sera responsable de son isolement croissant et des conséquences qui suivront », a dit Robert Gibbs, en allusion à de nouvelles sanctions. Si M. Obama s’est dit prêt à rompre avec la politique de son prédécesseur et à donner sa chance au dialogue avec l’Iran, il s’est donné jusqu’à la fin de l’année pour juger du sérieux iranien avant de durcir le ton et, éventuellement, de pousser à de nouvelles sanctions internationales.

Plus enthousiaste encore était le président français Nicolas Sarkozy qui s’est largement félicité de la condamnation de l’Iran par l’AIEA, notant avec satisfaction que la Chine et la Russie avaient voté pour. « Ce qui est très important, c’est que le conseil d’administration de l’AIEA ait voté une résolution qu’elle va transmettre au Conseil de sécurité, ce qui prépare les sanctions », a-t-il affirmé en marge du sommet du Commonwealth. Même la Russie, alliée traditionnelle de Téhéran, a de sa part pressé l’Iran de prendre « très au sérieux » le signal lancé la veille par l’AIEA et de coopérer avec elle au sujet de son programme nucléaire controversé.

Maha Al-Cherbini

 




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