Pour un dialogue national libanais
Hassan Abou-Taleb
Le
dialogue national libanais auquel a appelé le président
Michel Soleimane a enfin commencé. Y participent 14
protagonistes libanais ainsi que le secrétaire général de la
Ligue arabe. Ce dialogue est effectué selon l’accord de Doha
qui a mis fin à la crise du vide présidentiel et qui lance,
de ce fait, la conciliation entre les forces libanaises.
Bien que les assassinats politiques non-revendiqués soient
réapparus sur la scène comme l’assassinat du membre du Parti
démocratique Saleh Al-Aridi, 5 jours avant le commencement
du dialogue, prouvant ainsi que la stabilité du Liban est
visée, tous les Libanais pensent que le dialogue national
constitue l’unique moyen de régler les problèmes suspendus.
Seul le dialogue est capable de faire sortir le pays de
l’état léthargique qui règne depuis plus de 2 ans. Si les
Libanais sont aussi enthousiastes face à ce dialogue, cela
signifie qu’ils ont très bien assimilé les leçons du 7 mai
dernier. Le Hezbollah et certains de ses alliés, comme le
Parti national syrien et le mouvement Amal, avaient eu
recours aux armes pour affronter leurs adversaires
politiques appartenant au courant de l’avenir et à la
rencontre démocratique dirigée par Joumblat. Et ce, pour
trancher la question du réseau des communications du
Hezbollah et pour garder à son poste le directeur de la
sécurité de l’aéroport. Ces événements ont prouvé que le
Liban ne pouvait supporter le recours aux armes et qu’il
fallait à tout prix éviter le piège de la guerre civile.
Cette même leçon se répète aujourd’hui dans ce qui est
appelé les conciliations de Tripoli, la capitale du nord
habitée par une majorité sunnite. Ces conciliations sont
intervenues après des affrontements qui ont eu lieu entre
les Allaouis dans la région de Gabal Mohsen et les sunnites
de Bab Al-Tébanah, quelques semaines après les événements de
Beyrouth. Là, tout le monde a compris que la guerre civile
pouvait se déclencher au sud, si des pas sérieux n’étaient
pas entrepris.
Le mérite des conciliations actuellement en cours revient au
député Saad Al-Hariri, leader du courant de l’avenir.
Celui-ci a suivi une méthode d’ouverture avec ses
adversaires parmi les leaders sunnites de Tripoli. De plus,
on parle de la préparation d’une rencontre directe entre
Saad Al-Hariri et Hassan Nasrallah, à condition de garantir
un lieu sûr pour la rencontre. Cette rencontre peut donner
un élan optimiste à la politique libanaise. De plus, Walid
Joumblat, leader de la rencontre démocratique et plus grand
allié du courant de l’avenir, effectue des pas dans la
direction de ces adversaires traditionnels comme Nabih Beri,
leader du mouvement Amal.
Ceci
s’ajoute à la rencontre avec le Hezbollah visant à fonder
des positions d’entente pour dépasser les maux causés par
les événements qui se sont déroulés il y a 3 ans.
Donc,
les 2 conciliations de Doha et de Tripoli, ainsi que les
mouvements des leaders politiques constituent une bonne base
pour s’engager avec profondeur dans le dialogue national. Le
climat politique qui règne est caractérisé par la coalition,
le calme échangé et la volonté de tourner la page du 7 mai
pour préparer la voie aux prochaines élections
parlementaires prévues pour le début de l’année prochaine.
Or, tout ceci ne signifie pas que le dialogue ne rencontrera
pas d’obstacles, tout dépend de la vision de chacun des
protagonistes.
D’un
côté, certains réclament la souveraineté de l’Etat sur tous
les mouvements de la politique, de la sécurité, de la
défense et de l’économie sans aucune intervention intérieure
ou extérieure. D’un autre côté, d’autres estiment que parler
de la souveraineté de l’Etat signifie qu’il y aura sûrement
un affrontement entre l’Etat et la résistance. Ceci
signifierait également l’existence d’une relation paradoxale
entre le Liban et le plus important de ces voisins. Il n’est
pas ici question d’un slogan face à un autre, mais de
politiques et d’engagements que l’Etat libanais et les
principales forces politiques devront mettre en application.
Par exemple, le courant de l’avenir estime que l’unique
espoir pour le Liban est de mettre toutes les armes sous
l’autorité légitime de l’Etat. Or, selon la vision du bloc
des forces libanaises, le Liban passe actuellement par une
phase de conflit entre 2 lignes, une appelant à la
souveraineté et à la liberté et l’autre à la gouvernance
religieuse. Et pour ce qui est du bloc de la libération et
la liberté, il estime que le plus important est de régler le
déficit économique et de réaliser un développent équilibré.
Or, l’organisation populaire nassérienne voit que le
dialogue doit s’élargir pour regrouper d’autres forces
politiques et économiques, outre les pôles protagonistes
invités par le président Soleimane et que le dialogue doit
comprendre en plus des stratégies de défense, les relations
syro-libanaises, l’identité du Liban, son rôle dans le
conflit arabo-israélien et la réforme politique.
Il est
clair que la question de la stratégie de défense et qui
signifie la détermination de la relation entre l’Etat et les
armes du Hezbollah est la question qui sera la plus débattue
au cours de la nouvelle session du dialogue national.
Qassem
Amine, secrétaire général adjoint du Hezbollah, a
dernièrement déclaré que la réussite du dialogue national
dépendait de 3 conditions, dont la plus importante est de se
mettre d’accord sur le fait que l’ennemi est unique : Israël.
La
seconde condition du Hezbollah est qu’une conviction doit
régner selon laquelle l’instauration d’un Etat fort, juste
et équilibré est l’unique moyen de mettre fin à la
corruption et à la déviation. Troisièmement, il faut
garantir tous les facteurs nécessaires à la libération des
territoires libanais et garantir la défense du Liban par
l’intermédiaire d’une stratégie de défense. D’autres disent
que si le Liban tient à la trêve avec Israël comme il était
le cas en 1968, les armes qui sont hors du cadre de l’Etat
n’auront aucune utilité. De plus, la question de la
libération de la terre à laquelle le Hezbollah appelle
signifie la poursuite des affrontements, alors que si la
Syrie reconnaît l’identité libanaise des champs de Chebaa,
la question peut se terminer sans affrontements militaires.
Or, cette reconnaissance ne répond ni aux ambitions du
Hezbollah ni de la Syrie elle-même. La solution est donc
d’instaurer un Etat fort bâti par tous les Libanais sur un
pied d’égalité.