Le ministre des Affaires juridiques,
Moufid Chéhab, s’exprime
sur les catastrophes de Doweiqa et l’incendie du Conseil
consultatif et commente la situation économique.
« Le gouvernement accorde la priorité
aux régions démunies »
Al-Ahram
Hebdo : La catastrophe de Doweiqa a soulevé de nombreuses
critiques à l’égard du gouvernement et mis en avant
l’ampleur des inégalités. Tandis que Le Caire des riches
connaît une forte expansion, celui des pauvres s’effondre
sur ses habitants. Qu’en pensez-vous ?
Moufid Chéhab :
Cet accident ne signifie pas que le gouvernement néglige les
pauvres ou les classes défavorisées. Je n’ai nullement
besoin par ailleurs d’éclaircir le rôle joué par le
gouvernement quant à l’aide et au soutien envers nos
concitoyens qui souffrent de la pauvreté. Les orientations
du gouvernement dans les domaines de la production et des
services ciblent essentiellement les tranches aux revenus
limités. Nous travaillons également en association avec les
gouvernorats qui ont le plus besoin de services et de
projets d’infrastructure. La priorité du gouvernement réside
essentiellement dans son engagement à aider et à soutenir
ces personnes en profonde difficulté.
Ce terrible accident est une vraie tragédie qui ne remet pas
en cause le travail de l’Etat et son soutien aux
défavorisés. Et je ne dévoile pas un secret en disant que le
gouvernement avait préalablement préparé des logements pour
ces habitants, mais le sort l’a devancé et la catastrophe a
eu lieu. Les investigations du Parquet révéleront les
responsabilités de chacun. Il va sans dire que ceux qui font
preuve de négligences devront répondre de leurs actes. Cette
catastrophe a démontré au gouvernement et aux ONG ainsi
qu’aux individus qu’un travail sérieux et constant dans tout
le pays devait être fait afin d’assurer que les habitations
sont aux normes et parfaitement sécurisées. Nous portons un
regard national à tous les citoyens égyptiens et l’Etat
veille à protéger la sécurité et la dignité de tous.
— Parlons d’une autre catastrophe qui a frappé récemment
l’Egypte. Il s’agit de l’incendie du Conseil consultatif. Là
aussi il y a eu des déficiences. Quelles sont, selon vous,
les causes de cet incident ?
— Nous ne pouvons pas déterminer avant la fin des enquêtes
les véritables raisons de l’incendie, ni les déficiences ou
les responsables. Cependant, cet incendie nous pousse à
accorder un plus grand intérêt aux mesures préventives et à
l’entretien. Il s’est avéré aussi indispensable de doter les
bâtiments gouvernementaux et privés de dispositifs modernes
de lutte contre les incendies. De plus, il est indispensable
d’adopter des méthodes scientifiques pour faire face aux
crises. Lorsque nous aurons les conclusions du Parquet
général ainsi que les analyses du laboratoire, il sera
possible de punir toute personne qui n’aura pas exécuté son
travail en conscience.
— Quelles mesures adoptera le gouvernement pour éviter ce
genre de catastrophes ?
— Le gouvernement a décidé de former une commission spéciale
pour examiner l’état des bâtiments gouvernementaux et
assurer les moyens de sécurité pour éviter la répétition de
telles catastrophes. Le gouvernement a aussi demandé à tous
les ministères de former des comités d’entretien ainsi que
de disposer d’extincteurs et de personnel formé pour faire
face aux crises.
— Y a-t-il des documents importants qui auraient péri dans
cet incendie ?
— Les documents historiques n’ont pas été touchés par
l’incendie. Les documents qui ont péri sont de simples
données qui se trouvaient sur le réseau informatique et il
est donc facile de les récupérer. Il n’est nullement vrai
que l’incendie a dévoré les documents historiques.
J’aimerais à cette occasion vous assurer que la majorité des
originaux des documents historiques sont conservés au sein
de l’Organisme des livres et des documents nationaux.
— Deux terribles catastrophes en deux mois. Ne pensez-vous
pas que cela alimente le désespoir surtout avec les
mauvaises conditions économiques et la hausse des prix ?
— Malheureusement, certaines forces à l’intérieur comme à
l’extérieur tentent d’exploiter ces incidents et la
situation économique pour inciter la population. Ce qui est
fort dangereux car cela affaiblit l’espoir ainsi que la
confiance des citoyens. Ces forces ne mettent en lumière que
les aspects négatifs, oubliant entièrement toutes les
réalisations accomplies au cours des dernières années.
Personne ne peut nier les difficultés dont souffrent les
classes démunies. Cependant, de nombreux efforts sont
déployés dans le domaine économique. Ce qui a attiré de
nombreux investissements arabes, étrangers et locaux pour
installer des projets en Egypte. Le taux de croissance est
passé à plus de 7 %. De nombreuses réalisations ont été
faites au niveau de l’infrastructure, de l’électricité, de
l’eau potable, du drainage sanitaire, des routes.
— La majorité du peuple égyptien souffre de la hausse
vertigineuse des prix et le gouvernement n’a pas réussi à
endiguer ce phénomène, qu’en dites-vous ?
— Personne ne peut nier qu’il y a une hausse des prix et
qu’elle a atteint son paroxysme ces derniers mois. Ce
phénomène revient en grande partie à des raisons
internationales et aussi à des mécanismes internes relatifs
à la production et l’avidité des commerçants qui optent pour
des moyens illégitimes, afin de satisfaire les besoins des
masses. Le gouvernement, quant à lui, a reconnu le problème
et déploie le maximum d’efforts en renforçant les
subventions et en augmentant les tranches bénéficiaires.
Nous avons également pris l’initiative d’augmenter de 30 %
les primes sociales. Le gouvernement a également décidé
d’augmenter les impôts sur les revenus importants et les a
réduits sur les revenus limités. Cependant, cette hausse
terrifiante a commencé à décliner les dernières semaines et
continuera son déclin en résultat de la baisse des prix
mondiaux des matières alimentaires et surtout après
l’intervention du gouvernement qui pense profondément que
l’économie libre n’est pas synonyme d’anarchie.
— Le congrès du PND va-t-il témoigner cette année
d’importants changements entre la vieille et la nouvelle
gardes ?
— Le congrès du Parti national aura pour tâche cette année
d’évaluer ses activités et appareils et de fixer un plan
pour l’année prochaine et un calendrier pour l’exécution des
activités. C’est un congrès qui se tient tous les ans. Les
sièges du parti dans les gouvernorats examinent les dossiers
qui sont soumis au congrès, surtout le Comité des politiques
qui prépare les papiers importants relatifs aux dossiers qui
feront l’objet de discussion au sein du congrès. Nous avons
également le projet de l’agenda législatif que le parti
adopte pour le présenter au Parlement pour la prochaine
session parlementaire.
Quant à ce que certains suscitent à propos de la vieille et
de la nouvelle gardes, je dirai que le parti dans toutes ses
activités ne connaît pas cette appellation. Il est vrai
qu’il y a une vieille et une nouvelle gardes, mais il n’y a
pas de différence entre les générations, parce qu’on se
complète tous dans toutes les positions et à tous les
niveaux du parti. Tout le monde travaille pour le bien du
parti et œuvre dans le cadre des programmes et des
politiques du parti tant qu’on est membre et tant qu’on est
attaché à ses principes, leaderships et membres.
— Certains hommes d’affaires membres du PND et du Conseil
consultatif ont été accusés de meurtre. Quelles sont les
mesures qui seront entreprises à leur égard ?
— Ils seront traités sur un pied d’égalité, comme tous les
citoyens. Dans la loi, tout le monde est logé à la même
enseigne qui ne différencie pas entre les individus
conformément à leur niveau ou à leur position sociale.
Que le Parquet adresse des accusations à certains hommes
d’affaires et qu’ils soient introduits en justice et
condamnés le cas échéant démontre que le gouvernement traite
en toute transparence les accusés et les hors-la-loi, sans
prendre en compte la richesse d’aucuns ou leur influence.
Tout accusé assumera sa responsabilité. On est tous égaux
devant la loi.
Je voudrais confirmer que si un député à l’Assemblée du
peuple ou au Conseil consultatif jouit d’une immunité
parlementaire empêchant qu’il ne soit arrêté ni introduit en
justice, nous ne devons pas oublier que cette immunité est
là pour garantir sa liberté absolue dans l’expression de son
opinion et dans l’accomplissement de ses missions
parlementaires. Mais si le député commet un crime, cette
immunité est levée sur demande du Parquet. Il est soumis aux
enquêtes et introduit en justice et est passible de sanction
et de peine comme tout citoyen ordinaire.
— Quelles sont selon vous les raisons de l’expansion de la
corruption en Egypte ? Pourquoi le gouvernement
n’adopte-t-il pas de mesures sérieuses pour faire face à ce
phénomène ?
— Ce n’est pas vrai. La corruption n’est pas aussi répandue.
La société égyptienne se transforme d’un système socialiste
totalitaire en un système de libre économie et du parti
unique au pluralisme, à la liberté d’opinion et à
l’expansion de la démocratie. Certains essayent d’exploiter
cette transformation politique et économique pour réaliser
des intérêts personnels. Ceci se répète dans de nombreuses
sociétés. En Egypte, tous les appareils du gouvernement ne
permettent pas la corruption, se battent contre ces
pratiques et punissent sévèrement ceux qui en sont
responsables. A mon avis, si l’Etat continue à prendre ces
mesures répressives et à poursuivre les corrompus pour les
conduire en justice, la corruption va diminuer.
Propos recueillis par Magda Barsoum