Aymane Nour.
Dans une lettre au président de la République, l’opposant
dénonce une tentative visant à le liquider.
Menace réelle ou obsession ?
«
Ma vie est en péril, protégez-moi Monsieur le président ».
C’est l’appel lancé cette semaine par l’opposant Aymane Nour,
ancien chef du parti libéral Al-Ghad, actuellement en
prison. Nour, qui affirme faire l’objet d’une tentative de
liquidation, a envoyé de sa cellule une lettre au président
Moubarak le rendant responsable de son incarcération. Il
menace de recourir à la justice internationale et de
soumettre sa cause aux Nations-Unies et devant la Cour
internationale de justice. Dans sa lettre, Nour souligne sa
certitude qu’il est menacé de liquidation en prison. « Il ne
s’agit plus de soupçons, ma famille et mon avocat possèdent
des preuves et des documents prouvant que je ne sortirai pas
vivant de prison. C’est pourquoi j’annonce en public,
Monsieur le président, que vous serez responsable de toute
atteinte à ma vie », indique Aymane Nour dans sa lettre,
affirmant que sa décision de recourir aux instances
internationales est la dernière alternative après avoir
échoué à obtenir ses droits par la justice égyptienne.
Aymane Nour est détenu depuis 3 ans après avoir été condamné
à cinq ans de prison pour falsification de documents
relatifs à la fondation du parti Al-Ghad. Une accusation que
Nour a toujours niée dénonçant un complot contre lui. Ce
jugement a fait couler beaucoup d’encre et continue à
soulever des réactions divergentes quant à la nature du
procès que beaucoup considèrent comme une manigance
politique ayant pour seul objectif de le liquider
politiquement. Avocat et ex-député de 43 ans, Nour était
arrivé deuxième de l’élection présidentielle derrière le
président Hosni Moubarak, réélu en septembre 2005 pour un
cinquième mandat. Souffrant d’une maladie cardiaque, il a
déjà présenté une demande pour sa libération pour des
raisons de santé, mais la Cour d’assises a rejeté cette
demande, estimant que son état n’est pas critique. Affaire
que Nour a qualifiée de « tentative d’assassinat ». L’épouse
de Nour, Gamila Ismaïl, partage les mêmes soupçons. Elle
affirme que son époux fait l’objet d’un règlement de compte
depuis sa participation aux élections présidentielles en
2005. « Il y a des forces au sein de l’Etat qui recommandent
de liquider mon mari, car il représente un danger pour le
plan qui consiste à transmettre héréditairement le pouvoir.
Depuis qu’il est en prison, il subit un mauvais traitement.
Hier, il a été atteint d’un caillot de sang à la jambe et en
dépit de son état critique, il a été transféré à l’hôpital
dans un camion et non pas dans une ambulance. Ne s’agit-il
pas d’une tentative préméditée de se débarrasser de lui ? »,
se demande Gamila Ismaïl. Elle refuse pourtant de dévoiler
la nature des documents ou des preuves en possession de son
mari et qui dévoilent le complot contre l’ancien chef d’Al-Ghad,
et ce en arguant que ces documents seront remis aux
instances internationales. La question se pose donc.
S’agit-il d’une menace réelle ou d’une obsession ? Tout
porte à croire qu’il s’agit d’une tentative pour attirer
l’attention des médias, notamment occidentaux. En effet,
Aymane Nour a épuisé toutes les procédures dont il disposait
pour tenter d’obtenir une libération. Sa demande d’une grâce
présidentielle a été rejetée. Il avait envoyé des lettres
aux candidats des présidentielles américaines, Barack Obama
et McCain. « Si Nour dit qu’il y a un complot pour le tuer,
alors il doit présenter les preuves. En revanche, il est
certain que l’Etat égyptien veut le liquider politiquement.
Il est vrai que l’Etat est exaspéré par le soutien de
l’Occident à Nour qui représente pour les Occidentaux le
symbole de l’opposant persécuté par le régime », estime Amar
Ali Hassan, politologue. Il exclut une tentative
d’assassinat. « Si Aymane Nour venait à mourir en prison,
cela attirerait un intérêt médiatique énorme en Egypte et à
l’étranger, et le régime serait soumis à des pressions que
l’Etat souhaite éviter », conclut le chercheur.
May
Al-Maghrabi