A quelques jours de la tenue du 22 au 24 avril de la
Conférence sur la réforme du baccalauréat, le ministre de
l’Enseignement, Yousri Al-Gamal,
jette la lumière sur la stratégie de modernisation adoptée
par son ministère.
« Nous avons besoin
d’un enseignement technique très développé »
Al-Ahram Hebdo : On a dernièrement beaucoup parlé de la
réforme de l’enseignement de façon à répondre aux évolutions
actuelles et aux exigences du marché de l’emploi. Quel est
le plan du ministère pour développer l’enseignement
pré-universitaire en Egypte ?
Yousri Al-Gamal :
Un plan a été élaboré il y a 5 ans et il fait partie d’une
stratégie que nous avons proposée à de nombreux cercles,
comme les commissions de l’enseignement au Parlement et au
Conseil consultatif et les Conseils nationaux spécialisés.
De plus, cette stratégie a été exposée à un grand nombre
d’intellectuels au cours d’un colloque à la Bibliothèque
d’Alexandrie. Cette stratégie se compose de 3 axes
principaux. Le premier est celui de la qualité de
l’enseignement, c’est-à-dire la qualité de l’école, des
enseignants, des programmes, etc. Tous ces éléments doivent
répondre à des normes de qualité. Ce qui implique la
modernisation des établissements scolaires, des laboratoires
informatiques, des équipements, etc. Nous avons commencé à
appliquer cette stratégie pour améliorer la qualité de
l’enseignement, en mettant en œuvre un nouveau statut
salarial pour les enseignants, et en créant une académie
pour la formation professionnelle. Nous avons déterminé 5
niveaux pour le choix des enseignants. Des tests
commenceront à partir de juillet 2008. Quant aux programmes
et aux matières scolaires, il est prévu de passer
graduellement au système de l’évaluation globale qui
implique l’augmentation de l’espace consacré aux activités
et une diminution des matières scolaires. Ce système est
actuellement appliqué jusqu’à la 4e primaire. Le second axe
est celui des « systèmes administratifs » qui vise à
décentraliser l’administration de façon à transférer le
pouvoir financier et administratif aux départements
éducatifs puis aux écoles pour qu’elles soient entièrement
indépendantes dans leurs décisions. Cet axe vise aussi à ce
qu’il y ait une base informatique de données dans chaque
école et dans chaque département du ministère, de façon à ce
que chaque élève ait un registre informatique avec tous les
renseignements qui le concernent. Cet axe concerne également
les systèmes d’évaluation de l’élève qui prendra en
considération ses talents et ses habiletés. Il y a aussi le
plan lancé par le président Moubarak et qui vise à
construire 3 500 écoles en 6 ans et d’ouvrir 8 000 nouvelles
classes chaque année pour diminuer la densité dans les
classes et pour combler le manque dans certaines régions.
Quant au troisième axe, il concerne l’enseignement primaire
et consiste à fournir une formation aux enseignants de façon
à ce qu’ils soient capables d’appliquer le système
d’évaluation globale.
— En Egypte, l’inscription à l’université dépend encore
du bureau d’admission universitaire. Certains pensent que ce
système est devenu inadapté aux évolutions du marché de
l’emploi. D’autres estiment que l’annulation de ce système
annule aussi l’égalité des chances. Quel est le plan du
ministère à cet égard ?
— Cette question constitue un des sujets principaux qui
seront discutés par la Conférence sur le développement de
l’enseignement secondaire et des politiques d’admission
universitaire, et qui se tiendra du 22 au 24 avril courant.
Effectivement, le système actuel d’admission universitaire
dépend d’un seul élément : les notes obtenues au bac sans
prendre en considération les efforts des élèves pendant tout
le cycle secondaire ni les compétences requises par chaque
faculté. Ce point sera aussi débattu par la conférence de
façon à garantir l’égalité des chances.
— Quelles sont les grandes lignes du nouveau système
proposé pour le bac ?
— Le développement du bac est basé sur 3 axes. Premièrement,
la restructuration de l’enseignement secondaire en
développant les programmes et les matières étudiées ainsi
que les méthodes d’enseignement. Il est aussi question de
développer les tests qui déterminent si l’élève fera des
études secondaires générales ou des études techniques, avec
la nécessité de prévoir des matières communes aux 2 systèmes
secondaires. Quant au deuxième axe, il concerne la méthode
d’évaluation et les examens de façon à ce qu’ils soient une
continuité du système de l’évaluation globale. Le troisième
axe est celui dont nous venons de parler, c’est-à-dire le
système d’admission aux universités de façon à répondre aux
nécessités du marché du travail, en particulier le domaine
de l’industrie.
— L’Etat attache actuellement un intérêt particulier à
l’enseignement technique pour qu’il soit au service du
marché du travail et pour diminuer la pression sur
l’enseignement secondaire et universitaire. Quel est le plan
de l’Etat pour développer cet enseignement ?
— Le développement de l’enseignement technique est devenu
une nécessité surtout avec l’augmentation du volume des
investissements en Egypte. Nous avons donc besoin d’un
enseignement technique très développé et très sophistiqué.
L’enseignement secondaire technique comprend actuellement un
million et 900 mille élèves dans trois spécialisations :
l’industrie, le commerce et l’agriculture qui ont besoin
d’un développement pour répondre aux besoins du marché. Il y
a actuellement une coopération avec le ministère du Commerce
et de l’Industrie et avec l’Union des industries afin de
moderniser les programmes de façon à répondre aux exigences
du marché de l’emploi. Les institutions industrielles se
chargent de nous procurer les équipements nécessaires et
d’organiser ainsi des stages de formation à l’intérieur même
des usines de façon à ce que les élèves puissent travailler
dès qu’ils finissent leurs études.
— Malgré les énormes efforts déployés dans le domaine de
l’enseignement, le taux d’analphabétisme reste très élevé.
Comment remédier à ce problème ?
— Les efforts déployés pendant les 10 dernières années ont
mené à une baisse du taux d’analphabétisme de 10 %, mais ce
n’est pas suffisant. Les municipalités, les ONG et les
étudiants des universités doivent jouer un rôle plus
important dans les efforts d’alphabétisation. Un plan qui
consiste à associer toutes ces catégories aux efforts
d’alphabétisation a commencé à être appliqué et un objectif
a été fixé pour chaque gouvernorat pour diminuer le nombre
d’analphabètes.
— Le phénomène des cours particuliers angoisse la famille
égyptienne. Pourquoi le ministère a-t-il échoué jusqu’à
aujourd’hui à y faire face ?
— Le phénomène des cours particuliers est un problème social
et éducatif. Les mesures prises pour modifier le système des
examens et l’application du système d’évaluation globale
ainsi que la modification du système d’admission aux
universités vont contribuer à lutter contre ce phénomène. De
plus, le ministère a préparé des modèles d’examens pour
aider les élèves qui veulent améliorer leur niveaux. Toutes
ces mesures vont collaborer à lutter contre les leçons
particulières à condition que les familles égyptiennes
collaborent à cette lutte également.
— Pourquoi les droits de l’homme ne sont-ils pas
enseignés dans les écoles surtout que l’Egypte a signé des
conventions internationales afin de promouvoir les notions
et la culture des droits de l’homme ?
— 21 nouvelles notions devraient être introduites dans les
programmes scolaires dans les diverses étapes de
l’enseignement. Parmi ces notions, les droits de l’homme,
les droits de la femme, de l’enfant et du citoyen, la
tolérance, l’acceptation de l’autre ... Ces notions ont été
introduites dans les textes enseignés aux élèves de toutes
les étapes sans avoir besoin de programmes exclusivement
réservés aux droits de l’homme.
— Le Conseil national des droits de l’homme et
l’Organisation arabe pour la réforme pénale avaient avancé
une initiative pour distribuer des livrets visant à
diffuser la culture des droits de l’homme dans les écoles en
accord avec le ministère de l’Enseignement. Cependant, ces
livrets ont été soudainement retirés. Pourquoi ?
— Les notions qui devaient figurer dans ces livrets ont été
introduites dans les programmes scolaires actuels
conformément au plan du ministère pour moderniser les
programmes scolaires à partir du cycle primaire.
— Quand la seconde étape du statut salarial des
enseignants sera-t-elle mise en application ? Et quelles
sont les propositions pour améliorer leurs conditions de vie
?
— La loi n°1555 promulguée le 21 juin 2007 fixe la date du
1er juillet 2008 pour commencer la seconde étape. Tous les
enseignants sont appelés à se présenter à l’Académie de
formation des enseignants pour passer les tests déterminés
par l’Académie et obtenir des permis d’enseignement aux cinq
niveaux déterminés par la loi. Dès que l’enseignant aura
rempli ces critères, il obtiendra une augmentation de
salaire de 50 à 150 %.
Propos recueillis par Magda Barsoum