Santé.
«Protéger la santé face au changement climatique».Tel est le
thème retenu pour l’année 2008 par l’Organisation Mondiale
de la Santé (OMS). En Egypte, les dangers du dérèglement
climatique sur la population sont multiples.
Des liaisons dangereuses
La
santé humaine est en relation étroite avec les changements
climatiques, et l’OMS, qui célébrait en début de mois la
Journée mondiale de la santé (7 avril), veut le souligner.
Selon le Dr Hussein A. Gezairi, directeur régional de la
région Méditerranée Orientale à l’OMS, le changement
climatique affectera de façon négative et profonde certains
des déterminants les plus fondamentaux de la santé, à savoir
l’eau, l’air et les aliments, et il a déjà un impact direct
sur l’environnement. « Il n’est pas question que la santé
humaine soit mise en péril par les changements climatiques
», a annoncé la directrice générale de l’OMS, Margret Chan,
tout en assurant que le continent africain serait
particulièrement touché d’ici 2020. D’où le thème choisi par
l’organisation pour cette année 2008 : « Protéger la santé
face au changement climatique ».
Car le monde entier redoute les conséquences du changement
climatique sur la santé. Selon la deuxième partie du
quatrième rapport d’évaluation du GIEC (Groupe d’experts
Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat) créé en 1988
par l’Organisation Météorologique Mondiale (OMM) et le
Programme des Nations-Unies pour l’Environnement (PNUE), la
hausse des températures s’accompagnera de toute une série de
problèmes, notamment dans les pays en développement. Le
rapport estime que notre santé est menacée par un ensemble
de causes liées au climat : l’augmentation de la
malnutrition et des troubles qui y sont liés,
l’accroissement du nombre des décès, des maladies et des
blessures causées par les vagues de chaleur, les
inondations, les incendies, les sécheresses, la
multiplication des maladies diarrhéiques et un changement
dans la répartition de certains vecteurs de maladies
infectieuses (moustiques, tiques).
Pour l’Egypte, les vagues de chaleur à court terme vont
augmenter le nombre des mouches et des moustiques. «
Conséquence : ce genre d’insectes va transmettre des
maladies indigènes qui vont avancer de l’Afrique tropicale,
où le type de climat est chaud à faible variation annuelle
de température et à forte variation du régime des pluies. Et
les Egyptiens vont alors souffrir de maladies comme la
fièvre jaune, la fièvre lézardeuse et surtout le paludisme
qui existait autrefois en Egypte mais qui a disparu il y a
quinze ans déjà », précise le Dr Hamdi Al-Sayed, le
président de l’Ordre des médecins.
Selon le rapport 2006/07 de l’OMS, 24 % de la charge totale
de maladies et 23 % des décès sont liés à l’environnement.
Le rapport estime que plus de 13 millions de décès, dont 4
millions d’enfants, sont dus annuellement à des causes
environnementales évitables. « La diarrhée, le paludisme et
la malnutrition en protéines a provoqué la mort de 3,3
millions de personnes en 2002 dans les quatre coins du
monde, dont 29 % habitent dans le continent africain. Le
changement climatique a aussi causé le décès de 150 000
personnes en 2000. Dans les années 1990, environ 600 000
personnes ont trouvé la mort, dont 95 % vivaient dans des
régions pauvres, à la suite des catastrophes naturelles
liées au climat, puisque le schéma des catastrophes
naturelles se transforme d’une année à l’autre », déclare le
Dr Riyad Moussa, collaborateur éco-sanitaire au bureau de la
Région Méditerranée orientale de l’OMS.
L’Egypte fait aussi partie des pays pouvant être touchés par
une épidémie de choléra. L’eau du robinet serait mélangée à
celle des égouts à cause des pluies et des réseaux
sanitaires qui ne pourraient pas absorber toute cette
quantité d’eau. « Cette pollution en eau se traduira par des
maladies et des douleurs au niveau de l’estomac,
vomissements, diarrhée et une température montant à 38°: Ce
sont les symptômes du choléra », affirme le Dr Waguida
Anouar, professeure de santé publique à l’Université d’Aïn-Chams
du Caire.
Delta du Nil pas épargné
Les pluies et la fonte des glaces pourront faire augmenter
de 1 à 3 mètres le niveau des mers et océans d’ici la fin du
siècle. Et là, le Delta du Nil ne sera pas épargné. « Une
hausse d’un mètre du niveau de la mer peut inonder le quart
du Delta qui est la seule terre fertile du pays. Elle
englobe la moitié des récoltes, y compris les plus
stratégiques, comme le riz et le blé. Conséquence imminente
: le pays serait menacé de famine », note Mahmoud Medani,
vice-directeur du laboratoire central du climat agricole.
Selon le dernier bilan, entre 1,1 et 3,2 milliards d’êtres
humains souffriraient de soif et de manque d’eau d’ici 2080,
tandis qu’entre 200 et 600 millions de personnes mourraient
de faim, parce qu’elles subiraient directement les effets de
l’assèchement de leurs terres agricoles. Ajoutons à cela que
l’élévation du niveau des mers va accroître la salinité des
sols, ce qui aura des effets négatifs sur l’individu menacé
d’insuffisance rénale. Cette éventuelle inondation du Delta
affecterait non seulement l’agriculture, mais aussi la
population vivant dans ce triangle. La catastrophe serait
encore plus importante avec une population qui devrait
doubler d’ici 2050. Selon le gouverneur du Caire, Abdel-Azim
Wazir, une partie des habitants du Delta deviendraient des
réfugiés environnementaux.
Selon le même rapport 2006/08 de l’OMS, la dégradation de la
couche pourrait causer de graves dégâts sur la végétation
dans de nombreuses régions du monde et réduire la valeur des
récoltes mondiales de 12 %. L’atteinte à la couche d’ozone
va de même exposer davantage les personnes aux rayons
ultraviolets, ce qui peut provoquer des cancers de la peau
et la cataracte.
A l’avenir, les Egyptiens peuvent aussi s’attendre à des
infections respiratoires aiguës et des allergies dues aux
tempêtes de poussière et de sable. Ici, les très jeunes et
les personnes âgées seraient les plus touchés par l’impact
de ces modifications climatiques. C’est pourquoi « nous
devons placer la question de la santé publique au cœur du
débat sur les changements climatiques. Ceci comprend la
mobilisation des gouvernements et de tous les acteurs afin
qu’ils coopèrent pour renforcer le suivi et le contrôle des
maladies infectieuses, utiliser de façon judicieuse les
ressources en eau qui diminuent et adopter des mesures de
protection de la santé en cas d’urgence », a déclaré
Margaret Chan, directrice générale de l’OMS. « Il est plus
que nécessaire de trouver des solutions pour un lendemain
qui n’est en aucun cas lointain », conclut-elle.
Manar Attiya
Pour plus d’informations :
www.emro.who.int/whd