Al-Ahram Hebdo, Voyages | Les maraudeurs de la préhistoire
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 Semaine du 7 au 13 novembre 2007, numéro 687

 

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Patrimoine. Les sites naturels et surtout préhistoriques du désert souffrent de différentes violations qui mettent leur existence en danger.

Les maraudeurs de la préhistoire

Sites archéologiques, rares formations géologiques, régions naturelles inédites ainsi que la faune et la flore composant le patrimoine des déserts égyptiens, que ce soit l’occidental, l’oriental ou encore celui du Sinaï constituent un trésor peu connu pour la plupart du peuple égyptien. Pire, ce patrimoine risque de se perdre pour de bon à cause des infractions commises par certains des touristes amateurs et contemplateurs du désert, notamment l’occidental, auquel on accède le plus souvent. Pis encore, quelques guides aussi bien que des chauffeurs de 4x4 font les sourds-muets à l’égard de ces violations afin de satisfaire leurs clients, cherchant en fait à augmenter leurs revenus.

Amr Chanane, expert en rallye et PDG d’une société spécialisée dans le tourisme désertique estime que pratiqué de la sorte, le tourisme nuit à la nature, notamment dans le désert. En effet, lors de son accès au désert, le touriste est à la recherche de tout ce qui est précieux et différent de son environnement pour le garder en souvenir. C’est ce qui se passe souvent dans la région bien connue, celle du désert libyque, au Gilf Al-Kébir au sud-ouest de la Grande Mer de sable. C’est une région où sont répandues des pièces cristallisées, dont le volume varie entre de gros blocs et de petites pierres. Celles-ci ont résulté de la chute d’un météorite dont la chaleur, dégagée lors de l’impact, aurait fondu la silice terrestre. « Durant les années 1980 et 90, ces pièces étaient répandues énormément. Mais aujourd’hui, il est rare de les trouver, dans les zones connues pour les touristes », déplore Mahmoud Noureddine, PDG de Khaset Expéditions, l’une des sociétés spécialisées dans le tourisme désertique. Pour lui, les comportements irresponsables des habitués de la région, amateurs d’objets précieux qui s’emparent de ces pièces comme souvenirs, sont catastrophiques. « Si de tels comportements ne sont pas interdits catégoriquement, on va perdre un patrimoine égyptien exceptionnel et insolite pour de bon », poursuit-il.

 

Dangers à l’infini

Non seulement les sites naturels subissent de tels comportements irresponsables, mais les sites archéologiques, notamment préhistoriques, en souffrent également et bien fort. Dans ces lieux vierges encore, à la fois ouverts et peu connus, les outils préhistoriques se répandent sur la superficie du sol sans faire l’objet du moindre relevé archéologique. Leur forme est souvent étrange, à l’instar des œufs d’autruches ou des couteaux et des pointes de flèches en silex. Malheureusement, « l’idée de collectionner les souvenirs se répète encore une fois dans ces lieux. Attirés par ces formes inédites, les touristes les prennent pour les garder avec eux », commente Noureddine. D’autre part, les outils préhistoriques sont menacés d’être écrasés sous les roues des véhicules . « Lors de nos tournées, on a remarqué beaucoup de pilons en granit cassés, voire écrasés dans ces régions », reprend Noureddine. Pour lui, si une pierre solide comme le granit a été écrasée sous les véhicules, quel en serait alors le destin des autres outils plus fragiles ?, se demande-t-il. Avis partagé par Khaled Saad, directeur du département de la préhistoire au sein du Conseil Suprême des Antiquités (CSA). Ayant participé à la campagne du nettoyage du Désert blanc en mai dernier, l’équipe de recherche sur la préhistoire présidée par Saad, a découvert trois nouveaux sites où des outils portaient des traces de pneus. Afin d’éviter de telles violations, le directeur a encerclé, provisoirement, l’une des zones préhistoriques avec de grosses pierres en inscrivant sur un gros bloc que la région en question est archéologique et qu’il est défendu d’y accéder avec les véhicules. Malheureusement, « avant de quitter l’endroit, cette délimitation somme toute improvisée a été éliminée et le site a été violé comme si nous n’avions rien fait.  », s’exclame Khaled Saad.

Pire encore, les sites préhistoriques sont aussi victimes des amateurs à la fois de la photographie et de cet art pittoresque des graffitis. En effet, certains touristes arrosent les graffitis d’eau dont les gouttelettes font ressortir plus clairement les scènes préhistoriques prises en photos. Résultat : « Beaucoup de peintures ont perdu leurs couleurs vives et sont en voie de disparition au fil du temps », reprend Amr Chanane, Pis encore, certaines scènes préhistoriques ont été « découpées avec la scie par des chercheurs de la préhistoire pour les emmener avec eux, sous prétexte de les étudier dans leurs pays », affirme un archéologue, ayant requis l’anonymat. Celui-ci estime que c’est une grande perte pour l’archéologie mondiale, et notamment la préhistoire.

Et ce n’est pas tout. Les menaces ne s’arrêtent pas aux sites préhistoriques, elles couvrent également les lieux gréco-romains, notamment les tombes. Sur l’un des monts du Désert blanc, deux momies femmes dont la date remonte à l’époque gréco-romaine ont été découvertes. « Ce lieu est l’un des passages obligés des tours touristiques du Désert blanc », commente Tareq Al-Qanawati, directeur de la réserve naturelle. Lors de l’examen archéologique de ces momies, le directeur de la réserve a constaté que cette tombe a été profanée jusqu’à ce que les squelettes humains aient été brisés. Maintenant, les responsables ont décidé de fermer définitivement la tombe pour mettre fin à ces pratiques.

Pour Amr Chanane, ces violations s’expliquent par l’ignorance. En effet, beaucoup de « guides et chauffeurs méconnaissent la valeur du patrimoine désertique que ce soit naturel ou culturel », commente-t-il. De même, ils ignorent les dangers que le désert pourrait subir à cause de ces infractions. Ceci sans oublier une recherche du gain facile .

Doaa Elhami

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Pour un safari sans dégâts

Six sociétés touristiques sont spécialisées dans le tourisme du Désert occidental. Afin de préserver le patrimoine culturel et naturel du Sahara, les PDG ont décidé d’organiser des stages de prise de conscience aux chauffeurs et guides des oasis occidentales égyptiennes. « Cette catégorie représente la porte d’accès au Désert occidental. De plus, elle s’adapte spontanément aux critères de la nature désertique comme, par exemple, les orientations à travers l’astronomie et la protection contre les dangers naturels », explique Amr Chanane, expert en rallye et PDG d’une société touristique. Afin d’organiser ce stage, ces experts touristiques ont coopéré avec l’ONG Hayat à Farafra, présidée par un professionnel du tourisme, Saad Ali, ainsi que la White Desert Foundation, présidée par la Néerlandaise Anneke Hoogendijk, qui a financé ce stage. De même, ces spécialistes  ont invité des géologues, archéologues, experts en navigation, spécialistes de faune et flore ainsi que le directeur de l’Organisme du tourisme à Wadi Al-Guédid (la nouvelle vallée). Ces derniers ont contribué à la formation de 300 personnes qui ont obtenu des certificats accrédités par l’Association générale des Chambres touristiques. Les organisateurs souhaitent que l’obtention d’un tel certificat soit une condition pour exercer ce genre de tourisme.

D’ailleurs, les organisateurs jugent que ce stage est un moyen de conscientiser des chauffeurs et guides des oasis du Désert occidental. « Durant neuf mois, nous avons organisé deux ateliers pour élever la conscience des guides quant au tourisme désertique. Résultat : pendant qu’on a relevé lors de la campagne de nettoyage qui a eu lieu en novembre 2006, 6,5 tonnes d’ordures, on n’a ramassé que 4,5 tonnes seulement au cours de la dernière campagne qui a eu lieu en mai dernier », explique Mahmoud Noureddine, PDG de la société touristique Khaset Expéditions. Pour lui, c’est un indice positif de la prise de conscience des Oasiens accompagnant les touristes. Autre argumentation : ces derniers escaladaient avec leurs véhicules les formations géologiques du Désert blanc. Ces comportements ont été formellement interdits depuis quelques années.

Chanane, cependant, trouve que les Oasiens ne font que leurs premiers pas pour réaliser sur le terrain un travail collectif avec succès. Celui-ci assure qu’il faut patienter afin de cueillir les fruits mûrs de tels ateliers. En tout cas, « nous avons déjà mis nos pieds sur la bonne voie », dit-il.

Quant aux stagiaires, ceux-ci assurent avoir enrichi leur connaissance générale sur le patrimoine naturel et culturel que renferme le désert. Aussi, ont-ils acquis les moyens sains d’attirer l’attention du touriste tout au long de l’excursion. Mais le plus important est « de réussir à bien gérer une excursion touristique de longue durée de sorte que le client ramène ses parents pour visiter le désert égyptien », indique l’un d’eux, Mohamad Abdel-Latif.

 




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