L’avenir de la coalition israélo-syrienne
Abdallah Al-Achaal
Il
est inéluctable que l’axe irano-syrien
constitue une des réalités évidentes de la carte politique
de la région. En effet, cet axe est la colonne vertébrale de
ce qui est appelé le « camp de la résistance » face au «
camp modéré ». Partant du principe « diviser pour mieux
régner », Washington et Israël tentent par tous les moyens
d’affaiblir cet axe et de le détruire. Cela dans l’objectif
de frapper le camp d’opposition qui comprend également le
Hezbollah et le Hamas. La coalition
irano-syrienne a attiré l’attention de nombreux
analystes et chercheurs intéressés par le Proche-Orient, en
plus des services secrets et des services de planification
stratégique.
Débuts
Auparavant, l’équation se limitait à Israël d’un côté et au
monde arabe de l’autre, puisqu’à l’époque du schah, l’Iran
faisait partie de la coalition
pro-israélienne. Mais tout a
changé après le déclenchement de la Révolution
islamique en Iran en 1979, dont les positions étaient
antagonistes à Israël et aux Etats-Unis. Puis, la situation
s’est de plus en plus aggravée quand l’Egypte s’est
rapidement dirigée vers les Etats-Unis et Israël et quand le
conflit entre le monde arabe et l’Iran de l’après-révolution
est devenu clair. Le monde arabe a alors soutenu l’Iraq qui
a été poussé à faire la guerre à la révolution iranienne par
intérim aux Etats-Unis et à Israël. Et ce en ayant recours à
des symboles nationaux et islamiques importants, chose qui a
mené à des répercussions extrêmement dangereuses. La
position de l’Iraq envers l’Iran a permis aux Etats-Unis et
à Israël de détruire des conceptions nationales et
islamiques profondément ancrées dans les mondes arabe et
islamique. Ces événements sont à l’origine de la situation
actuelle que vit la région avec tous ses détails.
Le point de départ était le démantèlement de la coalition
égypto-iranienne qui existait à
l’époque où le schah dirigeait l’Iran et où Sadate
gouvernait l’Egypte, sous le parrainage
américain. La révolution iranienne s’est déclenchée
et l’Egypte s’est de plus en plus accolée aux Etats-Unis
avec leurs hommes dans la région dont le plus important
était Saddam Hussein.
Pour ce qui est de la Syrie, c’est la perte de la coalition
historique et stratégique avec l’Egypte causée par la visite
de Sadate à Jérusalem et le revirement égyptien vers
Washington qui l’ont poussée à
chercher un allié pour affronter Israël. En effet, le
conflit avec Israël est jusqu’à aujourd’hui la principale
cause de la coalition irano-syrienne.
En contrepartie, l’Iran est devenu une des parties
indirectes du conflit avec Israël par l’intermédiaire de la
Syrie, à travers le Hezbollah et le Hamas. Il semble même
que la Syrie constitue l’unique lien entre l’Iran d’un côté
et le Hezbollah et le Hamas de l’autre. Partant, l’Iran
s’attend à ce que la Syrie, le Hezbollah et le Hamas suivent
la ligne iranienne pour tout règlement. Ceci signifie que
cette coalition s’est renforcée pour différentes raisons par
l’intermédiaire des relations syro-libanaises et tout au
long des 3 dernières décennies. Plus particulièrement depuis
l’invasion israélienne de Beyrouth en 1982 quand la Syrie
était fortement présente au Liban au moment de la guerre
civile.
Les facteurs déterminants
Passons aux perspectives d’avenir de cette coalition, il est
important de s’arrêter sur plusieurs cas.
Le premier cas : si l’Iran conclut un règlement politique
avec Washington, il est sûr que ce règlement sera au
détriment de la Syrie et relativement au détriment du
Hezbollah et du Hamas. C’est ainsi que la coalition se
renversera contre ces 3 parties. Là, le pouvoir de l’Iran
dans la région dépendra de la générosité des Etats-Unis,
tout en prenant en considération les dangers d’une telle
coalition dont Israël sera un des plus importants piliers.
Deuxièmement, au cas où la Syrie serait attaquée par Israël,
si Téhéran soutient Damas, le conflit s’aggravera encore
plus et s’il ne le fait pas, il perdra la coalition avec la
Syrie. Surtout que cet axe est présenté dans le monde arabe
comme l’unique substitut syrien à la lumière de l’hégémonie
américaine dans la région.
Dans le troisième cas, si le conflit syro-libanais au Golan
est réglé, la coalition n’aura plus de signification
directe, bien que ses fonctions stratégiques soient connues.
En effet, la générosité israélienne avec la Syrie vise avant
tout à la mettre dans un choix difficile entre Israël et
l’Iran.
Plus l’offre israélienne est généreuse, plus la coalition
irano-syrienne est exposée au
danger.
Le quatrième cas : la probabilité de l’affaiblissement du
Hezbollah pour se transformer d’une organisation de
résistance en parti politique comme le réclame le secrétaire
général de l’Onu. C’est ainsi que la voie deviendra ouverte
au désarmement du Hezbollah.
Le cinquième cas : une attaque américaine ou israélienne ou
bilatérale écrasante contre l’Iran avec l’abstention de la
Syrie d’y répondre.
Or, la coalition touche des questions très sensibles pour la
Syrie, dont la principale est la politique iranienne en
Iraq. Sachant que la politique iranienne est prédominée par
son caractère chiite. Et de façon générale, la politique
iranienne dans la région du Golfe peut influencer fortement
cette coalition tant que la Syrie continue à défendre les
intérêts arabes. Et la rue et les organisations arabes
s’attendent à ce que la Syrie continue à assumer ce rôle.
De plus, la Syrie assimile parfaitement que le règlement
avec Israël ne constitue pas la fin de l’affaire. En effet,
sa sécurité nationale commence au Liban. C’est pour cela que
le Liban reste une des plus importantes scènes de la
politique syrienne et du soutien de ses alliés sur cette
scène. Il est important de déterminer si la coalition
syro-libanaise est dans l’intérêt des causes arabes ou si
elle affaiblit le monde arabe. Qu’en serait-il si cette
coalition n’existait pas ? Aujourd’hui, la région est
divisée en deux, entre l’Iran et les Etats-Unis, et les
dossiers arabes sont pris en gage d’avenir des relations
entre les deux pays.
Enfin, malgré les différentes visions entre l’Iran et la
Syrie, leur coalition constitue un exemple nouveau qui doit
faire ses preuves devant les multiples mutations que connaît
la scène internationale aujourd’hui, et particulièrement la
région.