PND.
Le président Moubarak réélu à la tête du parti, l’équilibre
entre ancienne et nouvelle gardes maintenu, le congrès du
parti au pouvoir a consacré la continuité tout en affichant
un intérêt plus marqué aux problèmes sociaux.
La permanence fait recette
On
dit toujours que beaucoup d’eau ont coulé sous les ponts,
mais pas pour celui du PND. Depuis le premier congrès annuel
en 2003, rien n’a presque changé au parti au pouvoir. Les
mêmes noms reviennent, seule leur valeur alterne mais sur un
mode mineur. Les mots et les discours semblent bizarrement
identiques, les rivalités aussi entre ancienne et nouvelle
génération, ces gardiens du temple du National démocrate.
L’an 2007 se confond avec les cinq précédents congrès encore
par les surprises manquées et ces tambours et fanfares qui
annoncent la tenue d’un congrès « historique » qui
intervient à un moment « historique » et adopte des
décisions pas moins « historiques ». Seul le slogan change :
la proposition principale est « La nouvelle idéologie et ...
», la subordonnée alterne entre droit du citoyen, priorité à
la réforme, ou nouvel élan vers l’avenir.
Pour
ce congrès tenu entre les 3 et 6 novembre, cette « idéologie
» n’est plus une priorité. Elle
serait, aux yeux des « Nationaux démocrates » bien assimilée
par les citoyens et donc « Avec nous, l’Egypte avance »
devient le nouveau mot d’ordre. Le « nous », serait, selon
les membres du PND, l’ensemble des Egyptiens. Preuve à
l’appui. La grande photo avec le slogan du congrès affichée,
traditionnellement à l’occasion de la réunion, sur le siège
du PND a, cette année, disparu. On la retrouve pourtant dans
le quartier d’Héliopolis où réside le chef de l’Etat et
président du parti et encore à Madinet Nasr où se tient le
congrès dans le gigantesque complexe des sports. Le parti se
veut plus discret ? Naïf d’y croire. Trois mois avant le
congrès, la télé de l’Etat aussi bien que la presse «
nationales », célébraient au grand jour les élections du PND
qui se déroulaient à travers le pays et souvent au niveau le
plus local. Et voici que maintenant les feux de la rampe se
dirigent vers la nouvelle manifestation, les élections au
plus haut niveau.
Le président Moubarak, et au premier jour
du congrès, a été élu pour la première fois à la tête du
parti, alors qu’il assure ce poste depuis 26 ans. « Une
première démocratique » assure Alieddine Hilal, secrétaire
de l’information au PND. Moubarak, unique candidat à se
présenter à cette fonction alors qu’il s’agissait en
principe d’une élection plurielle, « a été élu chef du parti
par 5 248 voix sur 5 310 votants », a déclaré le
vice-président du parti, Youssef Wali. Seuls neuf ont voté «
non », dans un bulletin qui ne retenait pas le non du
candidat, mais simplement « élection du président du parti
». Le raïs a remercié les 6 700 membres présents, affirmant
que leur vote était « l’expression d’une confiance qui m’est
chère ». Ce vote a mis fin aux spéculations sur une
éventuelle élection de son fils cadet, à la tête du parti et
par la suite une passation plus souple du pouvoir. Mais, ce
blindage du pouvoir ne dura pas longtemps. Le parti a
procédé à l’amendement de 28 des structures dirigeantes du
parti, mais la plus importante a été cette création de «
l’autorité suprême du PND ». Elle regroupent les membres du
secrétariat général et du bureau politique du parti. Selon
l’amendement de l’article 76 de la Constitution, les chefs
de partis et les membres de l’autorité suprême de ces
formations ont le droit de se porter candidats au poste de
chef de l’Etat. Jusqu’à présent, le PND, qui ne disposait
pas d’une telle entité, ne pouvait avancer comme candidat
que son chef, le président Moubarak. Avec cette innovation,
Gamal accumule les postes les plus extrêmes du parti. Ainsi
est-il devenu à la foi membre du bureau du secrétariat
général, membre de l’autorité suprême, secrétaire général
adjoint et chef du secrétariat politique du parti.
Le discours de Gamal a le plus duré, au deuxième jour par
exemple, il a mené une intervention d’un peu plus d’une
heure et demie, s’attaquant aux dossiers de tout bord, de la
sécurité nationale, à l’économie, aux libertés et pourquoi
pas aux réformes de la Constitution qui remonte à deux ans.
Mais il n’oublie pas de souligner que « le simple citoyen et
ses besoins sont au centre de nos priorités » La même phrase
il l’avait annoncée au congrès de l’an dernier. « Défenseur
des pauvres », c’est ainsi qu’il se présente ainsi que le
PND. Les interventions des ministres sont tous allées dans
ce sens et l’accent a été mis sur la nécessité de répercuter
les bons résultats, déjà obtenus sur le plan économique, sur
la vie quotidienne de tous les Egyptiens.
«
Ils les sentiront bientôt », disaient-ils sans relâche.
Ainsi parle-t-on de « justice sociale », de « soutien aux
familles pauvres », de « soucis des paysans » en évoquant
les thèmes dominants des années passées, comme l’éducation,
la santé, le chômage, les transports aussi que le thème
introduit l’année dernière celui de l’énergie surtout «
nucléaire ». Car il ne faut pas oublier que c’est Gamal qui
a annoncé la nouvelle que l’Egypte envisage de développer un
programme nucléaire civil. Moubarak l’a un peu précisé à
quelques jours du congrès de cette année.
Partout on parle chiffre, un peu à l’américaine, « 6
milliards de L.E. de subvention du pain, 1 700 boulangeries,
70 000 logements, un système d’égouts dans 18 villages, 1
080 convois médicaux pour la fin de 2008 ». Le PND se serait
ainsi « attaqué à des problèmes qui étaient jusqu’à ce jour
refoulés à l’ombre et proposé des solutions courageuses et
pratiques alors que les autres partis ont fait état de
fragilité, de divisions et d’accusations mutuelles ». Pour
ce, « le PND reste la force principale, voire l’unique
mouvement capable, à ce jour, de définir les traits de la
société égyptienne et ses réalisations dans l’avenir »,
écrit Ossama Saraya, rédacteur en chef du quotidien Al-Ahram
et fervent défenseur du régime. Des atouts qui remontent à
la « nouvelle garde et son idéologie ». Cette dernière
espérait au fil des derniers congrès mettre sur le banc de
touche les caciques du parti, qui bloquent cette « nouvelle
pensée » à l’instar de Safwat Al-Chérif, Kamal Al-Chazli ou
Youssef Wali.
L’inconnu Ahmad Ezz
Il semble pourtant que le président Moubrak n’en est pas
encore convaincu. L’élection des membres du bureau politique
a ainsi vu un retour de poids de ces derniers au grand
mécontentement d’Ahmad Ezz. Le fameux homme d’affaires, le
deuxième plus riche du pays derrière Sawirès avec une
fortune estimée à 50 milliards de L.E. et chef du « tanzim
», serait en lutte, qui n’est d’ailleurs non pas dissimulée
ou tacite. Certains même au sein du parti vont jusqu’à
affirmer que Ezz représente désormais le plus grand danger
pour l’avenir du PND. « Il serait devenu trop influent ».
N’est-ce pas lui qui a organisé les élections et s’est
occupé des nouvelles candidatures et connaît plus que
quiconque, à l’exception des ténors comme Chazli et Chérif,
les rouages et les coulisses du PND dans chaque coin du pays
? Du coup, on dit qu’un autre congrès se déroulait loin des
caméras, marqué par des désaccords, des rivalités et des
manœuvres, dans le cercle le plus central du parti. Les
démentis du secrétaire général ne contribuent en rien à
dissimuler ce clivage. En l’état, rien n’apparaît plus clair
que le fait que le PND souffre, malgré tout ce qu’il a tenté
lors de ce congrès, d’un déficit de crédibilité en tant que
« vecteur » de changement et parti aussi des « pauvres ».
Samar
Al-Gamal