La santé animale et la santé humaine sont étroitement liées et constituent un aspect fondamental dans notre écosystème. Les maladies animales transfrontalières peuvent se propager rapidement, franchir les frontières et entraîner des conséquences graves pour la santé des animaux et des êtres humains, ainsi que sur la société dans son ensemble.
L'une de ces maladies animales transfrontalières est l'influenza aviaire, qui se propage normalement parmi les oiseaux, mais peut également toucher les mammifères, y compris les êtres humains. La région du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord (MENA), en particulier, joue un rôle-clé dans cette dynamique, car ces pays se trouvent sur des voies migratoires essentielles pour les oiseaux.
La sécurité biologique est essentielle pour prévenir les épidémies de la grippe aviaire. Dans les zones où elle est insuffisante, les systèmes de production avicole durables et fiables sont gravement menacés.
Nous avons le plaisir d'accueillir aujourd'hui le Dr Xavier, qui nous parlera de l'influenza aviaire et des implications de sa prévention pour notre écosystème.
— Pouvez-vous définir l'influenza aviaire et préciser quelles espèces sont principalement affectées par cette maladie ? Par ailleurs, quel est son impact sur la santé animale et les systèmes de production ?
— L'influenza aviaire, communément appelée grippe aviaire, est causée par des virus de type A appartenant à la famille des influenza. Ces virus se transmettent principalement parmi les oiseaux aquatiques sauvages et peuvent infecter les volailles domestiques. Les oiseaux aquatiques, tels que les canards, les oies et les cygnes, sont les plus susceptibles d'être infectés par l'influenza aviaire.
Au cours des 20 dernières années, nous avons observé une fréquence accrue des épidémies de grippe aviaire. Depuis 2005, plus de 500 millions d'oiseaux ont été perdus, avec environ 40 000 cas officiellement signalés. Depuis plus de dix ans, l'influenza aviaire hautement pathogène (IAHP) reste endémique (c'est-à-dire qu'elle apparaît fréquemment) en Egypte.
— Quels sont les principaux facteurs contribuant à l'augmentation des épidémies et des pertes associées à l'influenza aviaire ?
— Depuis 2019, l'augmentation du nombre de cas d'influenza aviaire est principalement attribuée à la forte circulation du virus H5. Ce clade prédominant a acquis, d'une part, une capacité accrue à infecter plus facilement et plus rapidement les oiseaux, et d'autre part, il est désormais capable d'infecter un plus grand nombre d'espèces aviaires. Par exemple, les oiseaux marins, qui étaient précédemment peu touchés par le virus H5, sont désormais largement affectés par ce nouveau clade. En conséquence, des pertes massives ont été enregistrées au sein des populations d'oiseaux marins, et la propagation du virus H5 s'est étendue à de nouvelles régions, notamment en Amérique du Sud, en raison des flux migratoires des oiseaux.
Un autre facteur majeur à signaler est la contamination des mammifères, en particulier des troupeaux bovins aux Etats-Unis, ce qui témoigne de la capacité de ces virus à infecter des espèces non aviaires.
Selon le rapport 2022 de l'Organisation Mondiale de la Santé Animale (OMSA), 67 pays répartis sur les cinq continents ont enregistré des épidémies d'influenza aviaire hautement pathogène H5N1 chez des volailles et des animaux sauvages. En 2023, 14 pays supplémentaires ont signalé des épidémies, principalement en Amérique, avec 2 238 cas enregistrés depuis octobre 2023, indiquant ainsi la propagation continue de la maladie.
— Pouvez-vous décrire les symptômes de l'influenza aviaire ?
— Il est crucial de détecter rapidement l'influenza aviaire hautement pathogène (IAHP) chez les oiseaux afin de prévenir sa propagation. Les volailles infectées, ainsi que les oiseaux domestiques peuvent présenter divers symptômes, tels une perte d'appétit, une décoloration violacée ou un gonflement des barbillons, une diminution de la production d'œufs avec une altération de la qualité de la coquille, des écoulements nasaux, des signes respiratoires tels que la toux et les éternuements, une perte de coordination, de la diarrhée, et parfois une mort subite sans signes avant-coureurs. Il est essentiel d'identifier ces symptômes rapidement pour limiter efficacement la diffusion de l'infection.
— Quelles sont les mesures à prendre pour éviter l’influenza aviaire ?
— Il existe trois principales mesures à adopter pour lutter contre l'influenza aviaire:
1. Le renforcement des pratiques de sécurité biologique : Cette approche vise à minimiser les risques de propagation du virus. Parmi les mesures-clés, on trouve : l'éloignement des volailles des oiseaux sauvages et migrateurs, la réduction des entrées dans les exploitations, le nettoyage et la désinfection rigoureux des équipements, ainsi que l'application du système de gestion des volailles basé sur le principe « all-in-all-out », où tous les animaux entrent et quittent l'exploitation simultanément.
2. La surveillance active et la détection précoce : Il est crucial de maintenir une surveillance régulière pour détecter rapidement la présence de l'influenza aviaire. Cela inclut la capture ou la chasse d'oiseaux sauvages dans les habitats ou régions présentant un historique d'épidémies. Les échantillons doivent être collectés dans les 24 heures suivant la détection. Des échantillons environnementaux, tels que ceux provenant de l'eau et du sol, ainsi que des prélèvements sanguins et des plumes sont également essentiels pour effectuer des tests et évaluer la présence du virus.
3. La vaccination des volailles : La vaccination est une mesure préventive efficace pour réduire le risque d'infection. Elle aide à prévenir les épidémies chez les oiseaux domestiques, à diminuer les pertes économiques, à réduire l'excrétion virale post-infection (limitant ainsi l'exposition humaine au virus) et à minimiser l'impact environnemental. En plus, elle permet de recueillir des données essentielles sur l'efficacité des vaccins, contribuant ainsi à la recherche et à l'amélioration continues des stratégies de lutte contre la maladie.
— Quel rôle joue la vaccination dans la réduction de la transmission de l'influenza aviaire et dans la minimisation de son impact sanitaire et économique ?
— Les vaccins induisent une immunité spécifique chez les oiseaux contre certains virus, contribuant ainsi à réduire la mortalité et à atténuer les symptômes. En plus, ils diminuent l'excrétion virale après une infection, limitant ainsi la propagation du virus dans les populations aviaires et réduisant le risque de transmission à l'homme. Un programme de vaccination efficace peut éviter les épidémies, limiter les pertes économiques et minimiser l'impact environnemental de la maladie. En Egypte, la majorité des fonds alloués à la lutte contre l'influenza aviaire ont été investis dans la vaccination.
En tant que leader mondial dans la prévention et la lutte contre les maladies transfrontalières, Boehringer Ingelheim soutient l'utilisation des vaccins pour prévenir et combattre les maladies émergentes et les zoonoses. Notre large portefeuille de produits de prévention, destiné aux animaux d'élevage et domestiques, vise à protéger la santé des humains et des animaux. Nous restons fermement engagés dans la recherche et l'innovation pour faire face aux défis posés par les maladies émergentes et les zoonoses, en particulier l'influenza aviaire.
— En ce qui concerne la sécurité alimentaire, la consommation de viande et d'œufs provenant d'oiseaux infectés par l'influenza aviaire est-elle considérée comme sûre ?
— La consommation de viande et d'œufs provenant d'oiseaux infectés peut être sûre si ces produits sont correctement préparés et cuits. Il est impératif que les consommateurs respectent les quatre règles fondamentales de la sécurité alimentaire : nettoyer, séparer, cuire et conserver au frais. En plus d'une préparation adéquate, des méthodes de manipulation et de cuisson appropriées contribuent à réduire le risque de contamination par les bactéries et les virus, tels que l'influenza aviaire.
— Quelles sont les conséquences écologiques et économiques associées aux épidémies d’influenza aviaire ?
— L'influenza aviaire peut avoir des conséquences dramatiques sur la faune sauvage et domestique. Avec des taux de mortalité élevés, elle affecte gravement les populations d'oiseaux domestiques et sauvages, ce qui peut entraîner des impacts dévastateurs sur la biodiversité des écosystèmes. Economiquement, cette maladie peut dévaster des secteurs entiers, notamment l'élevage avicole, avec des pertes pouvant atteindre plusieurs milliards de dollars. Par exemple, on estime que les épidémies d'influenza aviaire ont causé la perte de 40 millions d'oiseaux, avec des coûts économiques estimés entre 2,5 et 3 milliards de dollars. En Egypte, depuis 2006, les épidémies de grippe aviaire ont entraîné des pertes économiques importantes pour le secteur avicole, affectant les revenus de 1,5 million de personnes. Lors de la première vague de la maladie en 2006, les autorités vétérinaires égyptiennes ont abattu 40 millions d'oiseaux pour contenir la propagation de l'infection dans les élevages.
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