L’affiche choisie par le Festival du film du Caire, cette année, montre une jeune fille debout, en train de contempler le passage d’un train à grande vitesse. Allégoriquement, le cinéma est ce train qui traverse les époques sans jamais s’arrêter.
Le coup d’envoi de cette 45e édition est donné par le film Passing Dreams (rêves passagers) du réalisateur palestinien Rashid Masharawi. Celui-ci raconte l’histoire de Sami, un garçon de 12 ans, qui a grandi dans un camp de réfugiés à Haïfa, pas loin du mur de séparation ; il suit un pigeon voyageur à travers les territoires palestiniens.
Egalement en soutien à Gaza est prévue la projection de 22 courts métrages, offrant des regards différents sur la guerre. Ces films sont nés d’un projet lancé par Rashid Masharawi, sous le titre de From Ground Zero, regroupant 22 métrages réalisés dans la bande de Gaza, miroitant la souffrance des habitants, leurs peurs, leurs rêves, etc.
En partenariat avec l’Union de radiodiffusion des Etats membres de l’Organisation de la Coopération Islamique (OCI), le festival offre des prix au montant de 250 000 L.E., afin de récompenser des films qui dépeignent de manière authentique la situation tragique en Palestine, a-t-on annoncé durant la conférence de presse.
Parmi les 194 films programmés figurent plusieurs premières mondiales dont certaines seront projetées dans le cadre de la section Horizon. C’est le cas par exemple du film A State of Passion : Ghassan Abu-Sittah de Carol Mansour et de Muna Khalidi (Palestine-Liban), sur le célèbre chirurgien palestinien vivant en Angleterre, et lequel a passé des mois à Gaza, et a pris comme charge de témoigner des horreurs du génocide et de dénoncer l’impunité d’Israël, un peu partout dans le monde.
Autres films de la section Horizon : le documentaire Diaries From Lebanon de Myriam El-Hajj, laquelle a choisi de se focaliser sur le désir de changer un pays malade, qui est le Liban, et de poursuivre ses rêves.
Gazan Tales (Palestine-Tunisie), de Mahmoud Nabil Ahmed, se déroule aussi au coeur de la bande de Gaza, et aborde l’histoire de quatre hommes à la recherche d’une définition de l’existence. Ensuite, Holidays in Palestine (Palestine-France-Qatar) de Maxime Lindon, raconte l’histoire de Shadi, un militant palestinien de 30 ans qui, devenu citoyen français, retourne dans son village de Cisjordanie pour des vacances avec l’espoir de s’y réinstaller.
Le Soudan participe à la même compétition, avec Madaniya de Mohamed Subahi, portant sur trois jeunes gens qui luttent pour changer leur vie, pendant le soulèvement de décembre 2018.
Par ailleurs, la comédienne tunisienne Dorra Zarrouk se lance pour la première fois dans la réalisation cinématographique, en signant le documentaire Wein Serna (où sommes-nous ? ou The Life That Remains). C’est l’histoire de Nadine, une jeune femme de Gaza qui arrive en Egypte trois mois après la guerre.
Compétition internationale
La liste des longs métrages sélectionnés à la compétition internationale compte 16 films, en lice pour la Pyramide d’Or, dont trois films arabes. D’Egypte participe Dakhal Al-Rabie Yedhak (le printemps arrive en riant) de Noha Adel, donné en première mondiale. Quatre histoires de femmes, qui nous promènent entre colère, tristesse et joie, en s’inspirant des vers du poète dialectal Salah Jahine.
Du Liban participe Moondove de Karim Kassem, sur une vie marquée par une série de changements inévitables. Et de Tunisie, O’clock Flowers ou Nawar Achiya (Belles de Nuit) de Khadija Lemkecher (Tunisie). « Avec ce film, Khadija Lemkecher, déjà remarquée pour ses courts métrages traitant de thématiques sociales, fait ses débuts dans le long format, en explorant des questions telles que l’immigration et les rêves des jeunes. Et ce, à travers l’histoire de Yahya, un jeune boxeur tunisien lequel rêve d’un avenir meilleur et envisage d’immigrer clandestinement », précise-t-on dans le dossier de presse du festival. Celui-ci mentionne également plusieurs films étrangers en compétition, comme Ayse (Turquie), Blue Sun Palace (Etats-Unis), Dear Maloti (Bangladesh), January 2 (Hongrie), Maldoror (Belgique-France), Malu (Brésil), Meet The Barbarians (France), Postmarks (Russie), Snowdrop (Japon), The New Year That Never Came (Roumanie), Victory (Italie), When The Phone Rang (Serbie-Etats-Unis) et Memoir of a Snail (Australie).
Retour aux classiques
En outre, le programme Cairo Classics renferme une sélection inédite de films égyptiens classiques restaurés. L’initiative vise à préserver le patrimoine et à sensibiliser le public quant à la richesse audiovisuelle du pays. Parmi les chefs-d’oeuvre restaurés : Al-Fetowa (le voyou, 1957), Bedaya Wa Nehaya (commencement et fin, 1960), Le Caire 30 (1966), Al-Haram (le péché, 1965), Bayn al-Qasrayn (impasse des deux palais, 1964) et Qasr Al-Choq (le palais du désir, 1966). Et pour mettre en lumière les films étrangers tournés en Egypte, la direction du festival a créé une nouvelle section intitulée Made in Egypt. Celle-ci projettera des films tels que Inheritance de Neil Berger, Paradise a Mother’s Feet de Raslan Akin et Back to Alexandria de Tamer Ruggli.
Il y a également une série d’oeuvres classiques programmées à travers la section « 100 ans de cinéma », telles que Cléopâtre de Joseph L. Mankiewicz (1962), Le Voleur de Bagdad de Ludwig Berger (1940), The Hero de Satyajit Ray (1966), Bobo The Boogeyman de Sergueï Parajanov (1991), Paris/Texas de Wim Wenders (1984) et The Godfather Part II (1974). Ceci outre les films chinois projetés à travers un programme spécial intitulé Frontières chinoises. La Chine, invitée d’honneur de cette édition, sera ainsi présente avec 7 films, à savoir Yolo, Creation of the Gods, Kingdom of Storms, Evacuate from the 21st Century, G for Gap, Viva La Vida Decoded et Lighting up the Stars.
Opportunités et formations
En outre, la manifestation Cairo Industry Days offre plusieurs panels, ateliers et opportunités de réseautage, pour accompagner les jeunes cinéastes.
Et le CIFF collabore avec la fondation El-Warsha de Basma Nabil, afin de développer les talents émergents et des acteurs arabes en herbe, de moins de 21 ans, à travers des ateliers de 4 jours.
Par ailleurs, le festival lance l’initiative ART 74, dédiée à la rencontre entre art plastique et cinéma, laquelle offre une série d’expositions faisant le lien entre les deux disciplines.
Hommage et jury
Le CIFF rend hommage cette année à trois grandes figures du cinéma, à savoir le réalisateur égyptien Yousri Nasrallah, le comédien égyptien Ahmad Ezz et le réalisateur bosniaque Danis Tanović, qui préside le jury de la compétition internationale, catégorie longs métrages.
Lauréat du Prix du scénario à Cannes, du César du meilleur premier film et de l’Oscar du meilleur film étranger pour son 1er long métrage No Man’s Land (2001), Tanović est réputé pour avoir décrit les réalités humaines avec une puissante virtuosité. D’ailleurs, durant la Guerre en Bosnie, il s’est engagé à tourner des images sur le front.
Le jury de la compétition internationale comprend également le réalisateur italien Andrea Pallaoro, la comédienne espagnole Angela Molina, la productrice et scénariste française Sylvie Pialat, le monteur égyptien Ahmed Hafez, la réalisatrice Thaïlandaise Anucha Suwichakornpong et la comédienne tunisienne Aicha Ben Ahmed.
Le jury du meilleur long métrage africain est présidé par Lamia Belkaïd Djegha (directrice artistique des Journées cinématographiques de Carthage 2023). Et le producteur Gaby Khoury préside le jury de la section des films palestiniens.
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