Mercredi, 06 novembre 2024
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Retour aux années 20

Névine Lameï, Mercredi, 09 octobre 2024

La 32e édition du Festival de la musique arabe se tient aux Opéras du Caire et d’Alexandrie, du 11 au 24 octobre. Une programmation variée, avec notamment deux opérettes signées Sayed Darwich.

Rahet Aleik (t’as perdu !), une opérette de Sayed Darwich.
Rahet Aleik (t’as perdu !), une opérette de Sayed Darwich.

De son vivant, Sayed Darwich (1892-1923) a composé 26 opérettes, qu’il avait présentées en collaboration avec plusieurs hommes de théâtre, tels que Naguib Al-Rihani, Ali Al-Kassar et Georges Abyad. Cette forme, qui avait le vent en poupe vers la fin du XIXe siècle et le début du XXe, lui a permis d’exprimer les soucis de toute une époque, alors que le pays était sous occupation britannique. La direction du Festival de la musique arabe a décidé de reprendre cette année deux de ces opérettes sur les planches de l’Opéra du Caire : Al-Achra Al-Tayeba (dix de carreau, le 13 octobre, à 18h) et Rahet Aleik (t’as perdu !, le 23 octobre, à 19h).

Celles-ci seront données selon une mise en scène contemporaine de Diaa El-Dine Zakariya. Le maestro Ahmed Atef y remplace le takht arabe (ensemble traditionnel) par un orchestre symphonique, offrant une palette sonore plus riche et expressive, digne d’Al-Achra Al-Tayeba de Sayed Darwich, qui glorifie le paysan égyptien face à l’arrogance des gouvernants turcs. « Les conditions humaines restent les mêmes, les conflits actuels en témoignent », souligne le metteur en scène, qui s’en sert pour évoquer la complexité du monde en cours.

Les scènes dramatiques sont entrecoupées de tableaux chorégraphiques, mettant en valeur l’humour caractérisant l’oeuvre de Sayed Darwich et de Naguib Al-Rihani. En effet, Al-Achra Al-Tayeba n’est qu’une adaptation des contes de Perrault, La Barbe bleue. Dans l’opérette égyptienne, Kish Kish bey est un riche provincial borné et vulgaire, laid et tyrannique qui, aux alentours de la Première Guerre mondiale, vient dilapider son argent auprès des « cocottes du Caire ». Ce personnage est placé, dans la nouvelle version, dans le contexte actuel de 2024 ; on a donc affaire à un parvenu d’aujourd’hui sur lequel s’appliquent toujours les paroles mises en musique par Darwich.

L’autre opérette en question est Rahet Aleik (t’as perdu !). « Le spectacle est le fruit d’une collaboration avec le compositeur Mohamed Abdel-Qader, l’arrangeur Feras Nouh et le parolier qui a essayé de nous insérer dans un contexte contemporain. Les compositions originales de Sayed Darwich peuvent paraître un peu lentes, on y a introduit violon, violoncelle, instruments à vent, etc. L’ensemble est admirablement assorti pour répondre à l’air du temps », explique le metteur en scène Mahdy El-Sayed. Et de poursuivre : « Malheureusement, après de longues recherches, nous n’avons pas trouvé de documents concernant l’historique de Rahet Aleik. Les notes de Sayed Darwich nous ont aidés à redessiner l’intrigue et les dialogues. On sait simplement qu’elle a été présentée pour la première fois en 1920 par la troupe de Ali Al-Kassar et que ce dernier y a tenu le rôle de l’illusionniste ».

Le prince indien se marie avec Badr l’Egyptienne

Rahet Aleik traite de l’histoire de l’illusionniste Safrout et de son serviteur Fassih. Safrout voyage avec sa fille Badr l’Egyptienne qui désire visiter sa tante maternelle. Le bateau a accidentellement dévié de sa route. Le père et sa fille se retrouvent en Inde. Là, la jeune fille rencontre le prince de la ville qui tombe amoureux d’elle. Mais le prince est exposé à un complot manigancé par l’étranger Paolo qui cherche à ruiner sa réputation. Le coup de ce dernier est avorté, et la pièce d’un seul acte se termine par la phrase « Rahet Aleik » (t’as perdu !), affirmant l’échec du complot.

« L’histoire se situe en Inde, et la pièce se déroule en une heure et quart. La musique de Sayed Darwich incrustée de rythmes indiens, doublée de la mise en scène, des décors et des costumes, nous place dans un monde exotique. La nouvelle mise en scène reste fidèle à l’ordre séquentiel des compositions de Sayed Darwich, depuis l’arrivée de Safrout en Inde. Toujours d’actualité, les opérettes de Sayed Darwich sont des trésors de toute époque. J’espère travailler, avec le soutien de l’Opéra du Caire, sur d’autres opérettes de Sayed Darwich, dont Dawlet Al-Haz et Oum 44 », conclut le metteur en scène Mahdy El-Sayed.

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