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Les stratégies de défense à l’ère de Ramsès II

Nasma Réda, Vendredi, 27 septembre 2024

Ramsès II a fondé des forteresses non seulement à la Côte-Nord, mais aussi dans le désert occidental, pour protéger les frontières ouest des attaques des tribus libyennes. C’est ce qu’a récemment dévoilé le site Tell Al-Abqaïne, au gouvernorat d’Al-Béheira.

Les stratégies de défense à l’ère de Ramsès II
Vue générale du site.

Une épée en bronze remontant au roi Ramsès II, une caserne, ainsi que des entrepôts d’armes et de nourriture en briques crues datant du Nouvel Empire ont été découverts par une mission archéologique égyptienne dirigée par l’archéologue Ahmed El-Kharadly, lors des fouilles dans la zone archéologique de Tell Al-Abqaïne dans le gouvernorat de Béheira. « Il s’agit d’une découverte très importante qui souligne le rôle stratégique de la région d’Al-Abqaïne dans la protection des frontières nord-ouest de l’Egypte contre l’invasion des tribus libyennes », affirme Mohamed Khaled, secrétaire général du Conseil Suprême des Antiquités (CSA).

Située à 75 km au sud-est d’Alexandrie, Tell Al-Abqaïne est une colline archéologique importante qui s’étend sur 35 feddans dans le gouvernorat d’Al-Béheira. Elle se trouve à la IIIe norme (division administrative de l’Egypte ancienne) de la Basse-Egypte et est entourée de nombreux monticules archéologiques proches, tels que Kom Al-Khatima et Kom Al-Ahmar à l’est, Kom Al-Baqara au nord-est et la région du Nord-Béheira.

Al-Abqaïne, connu en Egypte Ancienne sous le nom de « kbnt », signifiant « le pays des cheveux bouclés » ou « le pays des tresses », est l’un des plus importants sites fortifiés du Delta occidental. « Plusieurs fortifications militaires y ont été construites dans les lignes de défense contre les tribus libyennes qui s’étendaient tout au long du désert », explique El-Kharadly, ajoutant que ces fortifications ont été érigées par le roi Ramsès II (1290-1223 av. J.-C.) du Nouvel Empire pour protéger les frontières égyptiennes des raids libyens.

La forteresse de Tell Al-Abqaïne est fondée au centre de deux collines de sable, dont le nom signifie « le pays de la tristesse et du deuil ». « Ramsès II a découvert que des tribus libyennes (Temhu et Tenhu) avaient envahi le désert occidental et y ont résidé. Ces tribus attaquaient de temps à autre des régions dans le Delta », raconte le chef de la mission archéologique. La construction d’une série de forteresses au nord-ouest du Delta était donc pour Ramsès II une nécessité afin de protéger les frontières égyptiennes de toute invasion. « Plusieurs tribus qui vivaient sur la frontière Est de la Lybie constituaient des menaces pour les frontières occidentales égyptiennes, mais les tribus libyennes de Temhu et Tenhu demeuraient les plus dangereuses », assure El-Kharadly.


Epée, statuette Ouchebti et des pièces antiques portant le nom et les titres de Ramsès II.

L’histoire des fouilles

Selon Mahmoud Al-Hossary, professeur en archéologie à l’Université d’Al-Wadi Al-Guédid, plusieurs archéologues ont fouillé ce site. En 1903, le Français Georges Daressy a décrit la forteresse d’Al-Abqaïne comme étant un fort entre deux collines où il a découvert une partie de la porte de cette citadelle militaire, conservée actuellement au Musée gréco-romain d’Alexandrie. « Sur cette porte apparaît le roi Ramsès II en tenue militaire le décrivant comme étant l’adorateur de Rê-Horakhty, dieu du soleil Horus de l’Horizon », indique Al-Hossary. Plus tard, en 1941, l’archéologue égyptien Labib Habachi a opéré sur le site d’Al-Abqaïne et a découvert le reste du portail de la forteresse et un nombre de puits au sud-est de l’entrée où apparaissent des cartouches portant 19 des titres du grand roi Ramsès II. Depuis 1997 jusqu’à 2002, une mission de l’Université de Liverpool a opéré sur ce site antique site, révélant plus de détails sur les lieux.

De 2015 jusqu’à 2024, la mission archéologique égyptienne du ministère des Antiquités, dirigée par El-Kharadly, a opéré sur le site où elle a découvert des tours intérieures et extérieures de l’entrée sud de la forteresse militaire, ainsi que des tours au nord-est et au sud-ouest. Cette mission a également découvert un complexe de silos à grains, le temple de la forteresse militaire avec un puits en pierre et des vestiges des statues représentant les divinités du temple (triade de Memphis : Nefertem, Sekhmet, Ptah), ainsi que de nombreuses pierres portant les effigies des rois guerriers et d’autres portant le nom de Ramsès II et IV, en plus d’une jarre en faïence portant le nom de Ramsès II et de son fils Khaemwaset.

Un site à multiples facettes

En fait, les découvertes révélées par la mission égyptienne ont mis en évidence l’importance de ce site. « La forteresse d’Al-Abqaïne, où la mission archéologique a découvert de nombreuses poteries et des entrepôts, est non seulement un site militaire, mais aussi un centre de commerce et un lieu de culte important pendant l’ère des Ramessides », indique l’archéologue Abdel-Réhim Rihan, expliquant que la récente découverte a dévoilé des marchandises importées de l’étranger et le Tell est témoin des relations culturelles entre l’Egypte et ses pays voisins.

De même, la découverte a dévoilé une partie de la vie quotidienne des Anciens Egyptiens. « La découverte d’une statue d’une vache, vénérée à l’époque, symbolisant la force et la prospérité en tant que déesse céleste, d’un scarabée en faïence portant l’inscription : Amon — Seigneur du ciel, d’un scarabée sur la base duquel est gravé Ptah, d’une demi-bague en bronze avec une inscription de la divinité Amon Horakhty et d’amulettes de protection portant différents noms de divinités égyptiennes montre que cette colline était un lieu important de culte », explique Rihan, en concluant que la colline d’Al-Abqaïne fournit des preuves que l’ancienne armée égyptienne était une force militaire bien organisée, avec des compétences élevées.

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