Alors que le continent africain fait face à de nombreux défis en matière de paix et de sécurité, la quatrième édition du Forum d’Assouan pour la paix et le développement durables intitulée « L’Afrique dans un monde en mutation : repenser la gouvernance mondiale pour la paix et le développement » se tient les 2 et 3 juillet 2024 au Caire.
Deux jours durant, cette quatrième édition du Forum d’Assouan pour la paix et le développement durables réunissant un grand nombre de représentants de haut niveau de gouvernements, d’organisations régionales et internationales, d’institutions financières, d’acteurs du secteur privé et de la société civile, d’universitaires et d’experts. Le forum coïncide avec le 60e anniversaire du premier Sommet de l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA, ancêtre de l’Union africaine) tenu au Caire en 1964 et le 20e anniversaire du Conseil de paix et de sécurité de l’Union Africaine (UA). Des convergences d’une symbolique forte pour un forum qui se veut innovateur et prometteur pour l’avenir africain.
Le premier Forum d’Assouan a eu lieu en décembre 2019, à l’initiative du président Abdel Fattah Al-Sissi. Elle découle de cette volonté de l’Egypte d’apporter des solutions aux problèmes africains. Les sujets les plus éminents du forum, comme les menaces transnationales, le terrorisme, le trafic d’armes, les questions de jeunesse, la femme, les changements climatiques et les déplacements, sont d’une grande importance pour l’Egypte dans cette perspective d’opérationnaliser le nexus paix, développement et sécurité sur le continent africain. « Il y a un consensus sur le fait que la paix ne peut exister sans développement et réciproquement le développement ne peut se faire sans la paix », comme le confirme le directeur du Centre international du Caire pour la résolution, le maintien et la consolidation de la paix (CCCPA), l’ambassadeur Ahmed Abdel-Latif.
En préparation du Forum d’Assouan, le CCCPA, secrétariat du forum, a organisé une conférence de presse dédiée aux journalistes et médias invités à cette édition du forum. A l’occasion de celle-ci, l’ambassadeur et directeur du centre Ahmed Abdel-Latif a déclaré que le Forum d’Assouan « n’est pas simplement un événement, c’est une plateforme d’échanges, de réflexion et d’initiatives nouvelles pour faire avancer le travail collectif africain ».
Cette déclaration se joint également à d’autres propos tenus par de hauts représentants présents lors des éditions précédentes. Il s’agit notamment de M. Abdoulaye Mar Dieye, coordinateur spécial de l’ONU pour le développement du Sahel et président de l’UNISS Sahel qui, dans un entretien en marge de la troisième édition du forum tenue en juin 2022, a décrit que « le Forum d’Assouan est le rendez-vous de l’Afrique. Il est passé d’un forum pour devenir un esprit ».
Combler le fossé entre la théorie et la pratique
La grande préoccupation du Forum d’Assouan est de combler l’écart entre la théorie et la pratique. « Le continent africain dispose de nombreuses politiques et de mécanismes, c’est l’application de ceux-ci qui reste le principal défi », a indiqué Abdel-Latif. Le forum accordera donc davantage d’importance aux moyens de mise en oeuvre des solutions et recommandations prescrites dans les précédentes versions du forum, ainsi que celles qui émergeront de cette nouvelle édition. Or, l’application de celles-ci nécessite des moyens financiers, sujet figurant dans le programme du forum.
Arrivant en amont du Sommet de l’avenir, le Forum d’Assouan constitue une opportunité pour les pays africains de formuler leurs considérations et aspirations en matière de paix et de développement pour le futur du continent. Le directeur l’a notifié lors de la conférence de presse mettant le point sur la nécessité d’élever les initiatives régionales à l’échelle internationale. « Au sein de l’ONU, il existe une commission de consolidation de la paix constituée d’une majorité de pays africains, ce qui nous donne l’opportunité de faire avancer nos initiatives d’autant plus que le renforcement de cette commission sera discuté lors du Sommet de l’avenir », a-t-il souligné.
Climat, paix et sécurité
Dans les faits, le Forum d’Assouan a déjà eu des répercussions tangibles. En 2022, la COP27 de Charm Al-Cheikh a introduit la première initiative par la présidence égyptienne « Réponses climatiques pour la pérennisation de la paix (CRSP) » faisant le lien entre paix et climat en essayant d’apporter des solutions intégrées et adaptées aux contextes spécifiques du terrain. Une initiative qui émane des discussions qui avaient eu lieu préalablement lors du Forum d’Assouan. La quatrième édition continuera à accorder une importance au nexus climat, paix et sécurité avec un focus sur les liens entre climat et déplacements, comme le confirme l’ambassadeur, « nous observons un nombre record de déplacements dans le monde. Le lien avec la paix et les répercussions sur le plan humanitaire seront également sur l’agenda des discussions lors du forum ».
De ce qui reste, de nombreux autres sujets figurent dans les priorités du programme. En l’occurrence, la gouvernance nationale et l’opérationnalisation des politiques de reconstruction post-conflit. « L’Egypte sous la présidence de Abdel Fattah Al-Sissi a accordé une grande importance à la reconstruction post-conflit », indique Abdel-Latif, ajoutant que le pays a notamment poussé à l’adoption d’une politique africaine de reconstruction post-conflit lors du dernier Sommet de l’Union africaine.
La jeunesse, la paix et la sécurité figurent également dans les sessions du forum. L’éducation, sujet de l’année de l’UA, figure parmi les sujets du forum sous la thématique de l’éducation pour la paix. L’importance étant d’étudier la vision de la jeunesse et son apport en matière de paix et de développement.
Plusieurs nouveautés sont à noter pour cette édition du Forum d’Assouan. Pour la première fois, il y aura un prix du Forum d’Assouan pour la Reconstruction et le Développement Post-Conflit (RDPC). Il sera attribué à un individu ou à une organisation qui aura eu un impact positif et tangible dans le domaine de la construction de la paix.
Lutte antiterroriste : L’exemple égyptien
Il sera également question du lancement du réseau de lutte contre l’extrémisme et la radicalisation menant au terrorisme. « Le terrorisme est un fléau en Afrique, le Sahel est la région comptant le plus grand nombre de décès liés au terrorisme. Le Centre international du Caire pour la résolution, le maintien et la consolidation de la paix, conjointement à d’autres en Afrique, forme les cadres sociétaux, locaux et religieux à la prévention contre la radicalisation et l’extrémisme. Ainsi, nous combinerons tous nos efforts au sein d’un réseau commun pour lutter contre ce mal », indique l’ambassadeur, ajoutant qu’ils s’inspireront de l’exemple égyptien dans la lutte contre le terrorisme. Dans ce cadre, un accord sera signé en marge du Forum d’Assouan entre l’Agence de développement de l’UA, l’AUDA-NEPAD, et le CCCPA. Ce mariage est symboliquement fort puisqu’il combine l’expertise du CCCPA en matière de paix et sécurité à l’expertise de l’AUDA-NEPAD en matière de développement.
Les objectifs de ce forum seront de relever les défis interconnectés liés à la paix, à la sécurité et au développement, promouvoir des solutions efficaces, intégrées et durables, faire accélérer l’opérationnalisation du nexus paix, sécurité et développement, et surtout faire avancer les perspectives africaines sur le renforcement du multilatéralisme et de la coopération internationale. Une attention particulière sera, entre autres, accordée à l’appropriation nationale et au dialogue multilatéral fondés sur l’égalité et le respect mutuel.
Enfin, l’un des points forts de ce forum est l’existence de partenariats divers à la fois locaux (soutien du ministère égyptien des Affaires étrangères et d’autres organismes), régionaux (organisations régionales africaines, dont l’UA) et internationaux (notamment l’ONU et ses organismes, dont UNDP, l’UE, le Japon et d’autres partenaires). « Nous jouissons d’un grand nombre de partenaires, ce qui reflète la confiance et la considération de ces derniers pour le rôle de l’Egypte en ce qui concerne les domaines de prédilection de ce forum », conclut Abdel-Latif.
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