Samedi au Stade du Caire, Ahly partait favori pour défendre son titre de champion d’Afrique et il n’a pas failli à sa mission. Il a remporté son 12e titre de Ligue d’Afrique au terme d’une campagne étincelante. Même si la finale n’était pas réjouissante et que la victoire est arrivée par une déviation du défenseur Roger Aholou dans ses propres filets, les 70 000 supporters qui ont rempli le stade étaient en extase, et les feux d’artifice ont illuminé le ciel du Caire. « Je suis ravi que nous ayons pu décrocher notre 12e titre et rendre heureux notre grand public. Je comprends que les gens aiment les matchs esthétiques avec quatre ou cinq buts, mais en finale, on devait contrôler notre rythme et garder notre discipline, surtout avec un si grand public. L’important c’est de gagner et de remporter le titre, et peu importe si c’est l’un de nos joueurs ou l’adversaire qui a marqué », a dit l’entraîneur Marcel Koller, lors de la conférence de presse qui a suivi le match.
Cette 12e étoile pour les Rouges vient confirmer que l’Afrique n’a qu’un seul roi, et il s’appelle Ahly. Le ténor cairote dispose d’une belle marge de supériorité face à ses plus proches rivaux Zamalek et le TP Mazembe (RD Congo) qui ne comptent que cinq titres chacun. Avant même de jouer la finale, Ahly avait déjà établi un record, celui d’être la première équipe à accéder à cinq finales consécutives de la compétition. Seul le Wydad avait interrompu sa série de victoires en décrochant le titre en 2022. Le ténor cairote a aussi prolongé sa série d’invincibilité en Ligue d’Afrique à 22 matchs, brisant ainsi l’ancien record de 20 matchs, enregistré par l’Espérance entre 2018 et 2019.
Un effectif riche et expérimenté
Si cette génération ne comprend pas de talents du calibre de Mohamed Abou-Treika, Mohamed Barakat et Emad Metaeb, elle a tracé son nom en lettres d’or dans l’histoire du club et de la Ligue d’Afrique.
Koller dispose d’un effectif riche qui lui a permis de faire tourner son équipe et faire face aux nombreuses blessures tout au long du parcours, ainsi qu’à la fatigue due à la succession des matchs et ce, jusqu’à l’obtention du trophée. Le technicien suisse s’était parfois retrouvé dépouillé d’une douzaine de joueurs, mais il pouvait toujours faire confiance à son banc de touche. L’ailier Hussein Al-Chahat, l’attaquant sud-africain Percy Tau, le milieu Emam Ashour, le Marocain Réda Slim, le défenseur international Mohamad Abdel- Moneim, et même le jeune gardien Mostafa Shobeir, qui a remplacé l’international blessé Mohamad Al-Shennawy, se sont distingués. « Ahly est la seule équipe dans le continent à posséder les moyens financiers de se construire un solide et riche effectif. L’Espérance, arrivé en finale, n’a pas pu remédier à ses déficits et à l’absence de deux joueurs, ce qui a gravement affecté sa performance. Il a dû vendre quelques-uns de ses atouts au cours des années, contrairement à Ahly, qui renforce ses effectifs en permanence », explique l’ancien défenseur international et analyste sportif Waël Gomaa.
En effet, l’Espérance ne compte que trois joueurs internationaux, à savoir l’Algérien Mohamad Amin Tougai, le défenseur tunisien Yassin Meriah et son coéquipier le milieu Houssem Tka. Tous n’ont pas le statut de titulaire. Le TP Mazembe, qui s’est incliné face à Ahly en demi-finale, compte aussi trois joueurs internationaux, à savoir le gardien remplaçant du RD Congo Baggio Siadi, le défenseur mauritanien Ibrahima Keita et le défenseur Zambien Tandi Mwape.
Pourtant, l’ancienne gloire de la Tunisie Tarek Dhiab voit Ahly d’un autre oeil. « Pour moi, Ahly c’est le Real Madrid de l’Afrique. L’équipe est très puissante collectivement, mais elle n’a pas de grandes qualités au niveau individuel. A part le milieu Emam Ashour, il n’y a pas vraiment de talent qui puisse vous impressionner ou faire la différence lorsque le collectif ne fonctionne pas ou face à des défenses fermées. C’est très important dans une équipe du calibre d’Ahly, regardez combien de fois Vinicius ou Bellingham ont fait la différence pour le Real Madrid dans des matchs fermés », explique-t-il.
Et de 8 pour Koller
L’entraîneur Marcel Koller (63 ans) est en train de forger sa légende au sein du club. En moins de deux ans, il amasse son 8e titre avec Ahly, dont deux titres de Ligue d’Afrique et un de championnat, outre une médaille de bronze en Coupe du monde des clubs.
Le succès du collectif et la gestion du groupe sont à son crédit. « Je prépare toujours plusieurs scénarios avant les matchs, je les transmets aux joueurs en tant que groupe et ensuite individuellement à chaque joueur, afin qu’il comprenne comment il va évoluer durant le match en cas de changement de situation. Cela nous permet de vite réagir », explique-t-il.
Koller a montré une grande sagesse et un grand réalisme dans sa direction de l’équipe. Il a bien géré le temps de ses poulains, compte tenu du calendrier surchargé, et a fait preuve d’une grande flexibilité quant à ses méthodes, même au prix de réaliser des objectifs sans panache, comme ce fut le cas en finale d’Afrique.
Calme et souriant, Koller a toujours su imposer son autorité et sa discipline. Ainsi, Ahmad Abdel-Qader, Mohamad Magdi (Afsha) et Mahmoud Abdel-Moneim (Kahraba) ont été sévèrement sanctionnés et ont perdu leur place dans l’équipe. « Je pense qu’il est en passe de devenir l’un des meilleurs entraîneurs de l’histoire du club. Il possède les qualités techniques, le caractère et la sagesse pour devenir l’une des légendes du club si son séjour se prolonge », dit l’ancien entraîneur d’Ahly Mohamad Youssef.
Le Championnat, la Coupe du monde et autres …
Ahly doit maintenant tourner cette page et se concentrer sur son parcours local où il a beaucoup de retard à rattraper. Les Rouges sont à la 8e place du classement du Championnat égyptien avec 33 points et comptent 17 points de retard derrière le leader Pyramids qui a joué six matchs de plus. Mais déjà tous les regards sont tournés vers la nouvelle version de la Coupe du monde des clubs qui aura lieu en 2025, et les préparatifs du club pour cet événement grandiose. « Oui, bien sûr qu’on va faire un recrutement important, surtout que l’équipe a beaucoup de défis à relever dans les mois à venir. Le problème sera les demandes exagérées des clubs, car ils savent qu’on veut recruter pour participer à la Coupe du monde », explique Adli Al-Qii, PDG de la compagnie de foot d’Ahly. L’ancienne gloire du club, Magdi Tolba, pense que le recrutement doit être différent et que le club doit s’offrir des joueurs de qualités différentes, même si ça lui coûte des millions de dollars étant donné qu’il a réalisé de gros gains financiers au cours de la dernière période. Ahly aura un calendrier international surchargé la saison prochaine avec la Ligue d’Afrique, l’African Football League, la nouvelle version de la Coupe intercontinentale, et bien sûr le Mondial des clubs.
« Il est trop tôt encore pour parler de la Coupe du monde des clubs. On a beaucoup d’échéances d’ici l’année prochaine et il faut se concentrer sur le présent d’abord. Je sais que dès que je serai de retour à l’hôtel, les supporters me parleront du 13e titre de Ligue d’Afrique. Je comprends leur faim et j’en suis heureux, et je veux leur dire que moi aussi j’ai mon envie de gagner et que l’équipe fait son maximum pour les rendre toujours heureux », conclut Koller.
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