Pour la première fois depuis deux ans, les concessionnaires des marques automobiles ont annoncé des baisses de prix. Ces annonces, qui se multiplient depuis plus de trois semaines, étaient longuement attendues par les consommateurs, qui ont subi des hausses successives et considérables pendant les deux dernières années. « J’ai acheté, fin mars, une voiture de la marque chinoise MG à 1,75 million de L.E. Son prix a chuté cette semaine de 280 000 L.E. C’est vraiment dommage. Nous ne nous y attendions pas », a déclaré à l’Hebdo Nadia Hicham, employée à la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement (BERD). Yasmin Al Faramawy se plaint, elle, d’avoir acheté une Mercedes GLC 200 à 4,5 millions de L.E. en août dernier, tandis que son prix a baissé de 500 000 L.E. du jour au lendemain en avril.
Les prix de toutes les marques de véhicules avaient connu des hausses considérables, multipliées par 5, à la suite de la guerre en Ukraine en février 2022. Par exemple, une Skoda Octavia, de deuxième catégorie, était achetée à l’époque à 550 000 L.E. et son prix avait atteint 2,2 millions de L.E. avant la baisse des prix. Le constat est le même pour toutes les marques. Une Toyota Corolla était vendue à 375 000 L.E. et a atteint 1,6 million de L.E. (voir tableau des nouveaux prix).
La plupart des marques de véhicules (18 au total) ont enregistré des baisses allant de 5 à 15 % pour les catégories les plus chères telles que Mercedes et BMW, et jusqu’à 25 % pour les autres marques, selon Ossama Aboul-Magd, président de l’Association des commerçants de l’automobile et membre de l’Union des Chambres de commerce. Outre l’arrêt des importations et la diminution de l’offre dus aux problèmes découlant de la pénurie de devises étrangères, la hausse exorbitante des prix était due à la surévaluation du dollar par rapport à la livre égyptienne, comme l’a expliqué Hesham El Zeiny, rédacteur en chef de la publication Al-Ahram Auto. « Les concessionnaires calculaient le dollar jusqu’à 100 L.E. Les voitures en vente actuellement sont des stocks achetés à un prix très élevé lorsque le billet vert était tarifé à 100 L.E. Ils doivent écouler ces stocks achetés à des prix très élevés. La tendance s’est inversée car l’offre est devenue plus abondante, ce qui explique la baisse des prix », explique-t-il.
Il ajoute que ces baisses de prix ne sont pas réelles, car elles sont déduites de la surtarification. Ce fléau de la surtarification a depuis longtemps caractérisé le marché égyptien de l’automobile, incitant les concessionnaires à vendre les voitures à un prix plus élevé en échange de leur disponibilité immédiate. Abdallah Mahmoud, un responsable de marketing chez Abaza Auto dans le quartier de Tagammoe Al-Khamès, affirme que les baisses de prix ont dépassé la surtarification, atteignant jusqu’à 15 % pour certaines marques.
Pour El Zeiny, la léthargie et la paralysie du marché ces derniers mois ont été la conséquence d’une réaction délibérée du public qui a adopté un refus silencieux d’acheter des véhicules. Ce refus, venant de toutes les classes sociales, a finalement incité les agents et les commerçants à également agir dans leur propre intérêt. « Tout d’abord, ils ont contracté des prêts bancaires qu’ils doivent rembourser. Ensuite, les commerçants ont établi des partenariats financiers pour réunir des fonds importants nécessaires à leurs investissements, qu’ils doivent rembourser. Enfin, ils veulent relancer le cycle d’activités commerciales », a-t-il expliqué.
Modèle de rétablissement V
Selon le modèle de rétablissement V, la hausse des prix qui a grièvement affecté le volume du marché de l’automobile sera suivie d’un rétablissement rigoureux prévoyant les niveaux d’avant la crise. En économie, la reprise en V en est une reprise rapide suite à une récession aussi forte, explique Hicham Hamdy, analyste et spécialiste des analyses du secteur de l’automobile auprès de la banque d’investissement Al-Naeem. « Nous nous attendons à ce que le volume des ventes se rétablisse selon le modèle V à condition d’une bonne posture de la livre égyptienne (stabilisation autour des taux actuels) et d’un assouplissement des politiques monétaires. Le volume des ventes a chuté de 36 % et de 51 % en 2022 et 2023 respectivement », selon une étude effectuée par Al-Naeem. L’expert ajoute que les ventes du secteur connaîtront une hausse de 51 % en 2024 attisée par une demande accrue. Il prévoit que les prix d’ici le deuxième trimestre de 2024-2025 chutent de 30 %. Avis partagé par El Zeiny, qui prévoit une baisse graduelle des prix, jusqu’à atteindre la tarification équitable qui correspond au prix de la facture + la taxe sur les ventes et les douanes s’il y en a + 10 % de marge de profit des agents. « L’on s’attend à une baisse entre 10 et 25 % jusqu’à la fin de 2024 », conclut-il.
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