Al-Ahram Hebdo : Comment est née l’Union des Journalistes Africains (UJA) ? Et quel est son objectif ?
Samia Abbas : La création de l’UJA était un espoir que l’on désirait voir se réaliser depuis longtemps. De nombreuses tentatives ont été faites à ce propos, telles que le document de « Yamousoukrou », émis à la suite de la réunion en novembre 1973 des représentants de sept Etats francophones, à savoir le Burundi, le Cameroun, la Côte d’Ivoire, le Niger, le Sénégal, le Togo et le Zaïre. Afin d’unifier la volonté africaine en vue de la création de cette Union, une délégation du syndicat des Journalistes égyptiens, présidée par Abdel-Moneim El-Sawi, a visité plusieurs pays africains et a organisé des réunions, des colloques et des conférences durant lesquels ont été examinées toutes les questions urgentes au sujet desquelles il fallait adopter une vision commune. Au Caire, de nombreux journalistes africains se sont réunis avec leurs collègues égyptiens. Ils étaient tous d’accord sur la nécessité d’unifier les rangs et d’éliminer les séquelles d’un long et lourd passé où des tentatives ont été faites pour diviser le continent entre régions rivales. La conférence constituante de l’Union s’est tenue à Kinshasa, capitale du Zaïre, du 18 au 24 novembre 1974, avec la participation des représentants de la presse de 31 Etats africains. Une série de résolutions politiques et professionnelles ont été alors adoptées avec pour objectifs de libérer les pays encore occupés du continent et de libérer la presse africaine pour qu’elle devienne l’expression des espoirs des peuples dans le progrès, l’équité et la prospérité. Il a été décidé que le 23 novembre de chaque année soit considéré comme la « Journée du journaliste africain » qui coïncide avec la création de l’Union.
— Quelle est l’importance des stages de formation pour parvenir à une vision unifiée des médias africains à la lumière des défis et des conflits en Afrique ?
— Afin de parvenir à une vision médiatique africaine unifiée à la lumière des conflits et des défis du continent, plusieurs éléments doivent être disponibles dans les médias africains. Les plus importants reposent sur le fait qu’ils doivent être ciblés, refléter une profonde compréhension de la réalité africaine, renforcer les éléments de force et les raisons de progresser, lutter contre les manifestations de violence et créer une vision à l’égard de ce qui menace les sociétés africaines. Il s’agit également de parvenir à la cohésion interne, jouer un rôle efficace dans la réalisation d’une sécurité globale et participer activement à la planification stratégique. Ajoutons de même le fait de revitaliser le rôle culturel et fournir un contenu clair et influent dans la transmission de l’information.
— Quels sont les sujets qui seront abordés au cours de ce stage de formation ?
— Cette 58e édition du stage de formation des jeunes cadres journalistiques aborde plusieurs sujets, dont l’énergie en Afrique, la vision du développement en Egypte au cours des dix dernières années, le commerce interafricain, la lutte contre l’immigration clandestine, la liberté de la presse en temps de conflits, l’état des médias internationaux à la suite de la guerre de Gaza, l’intelligence artificielle et la cyber sécurité, ainsi que la contribution des médias à la consolidation des relations entre les peuples et la lutte contre les fausses nouvelles.
Les participants prendront également part à des ateliers de travail sur le journalisme-mobile dans les salles de rédaction, la photographie et le montage au syndicat des Journalistes égyptiens, ainsi qu’à l’Université américaine du Caire. Le programme comprend la visite de plusieurs projets nationaux pour voir les réalisations accomplies en matière d’infrastructure en Egypte. Il comprend également des visites récréatives et touristiques des villes du Caire, de Guiza et d’Alexandrie.
Ce stage sert de forum d’échange de nouvelles, d’informations, d’opinions et d’idées entre les jeunes d’une manière qui contribue à mieux connaître la réalité et à comprendre plus efficacement les uns les autres. L’UJA, qui a formé avec succès plus de 2 000 journalistes africains jusqu’à présent en organisant deux sessions annuelles, a contribué à renforcer les capacités professionnelles des journalistes à travers le continent. L’un des objectifs de cette formation est de créer des liens entre ces jeunes, ce qui renforce la compréhension et la conscience mutuelle face aux enjeux et défis du continent. De tels programmes de formation permettront aux journalistes de respecter les normes éthiques du métier, de rechercher la perfection et de contribuer d’une manière significative au discours collectif.
Nous exhortons les participants à profiter de l’opportunité de la formation pour se doter des compétences et des connaissances nécessaires pour améliorer leur maîtrise des règles de réalisation de reportages précis et équilibrés. Ils sont également invités à saisir l’occasion pour forger des liens durables qui transcendent les frontières et renforcent le tissu du journalisme africain. Ensemble, nous avons le pouvoir d’élever notre profession et d’amplifier les voix de nos communautés.
— Quels sont les critères de sélection des participants ?
— Les journalistes doivent maîtriser l’une des langues française, anglaise ou arabe, avoir entre 20 et 35 ans avec une expérience de 5 ans au moins dans le domaine de la presse et ne pas avoir participé à des sessions précédentes. Les syndicats ou fédérations de la presse ont la priorité dans la sélection des candidats de chaque pays. Au cas où il n’existerait pas de représentation journalistique, les ambassades égyptiennes accréditées dans les pays africains effectuent le processus du choix des candidats. Quant au choix des journalistes égyptiens, il est assuré par le syndicat.
— Quelle est l’importance des médias africains pour véhiculer une image non déformée du continent ?
— Les pays africains disposent d’un patrimoine historique, d’un potentiel humain de cadres journalistiques et médiatiques et d’une capacité technique et professionnelle qui leur permettent de restaurer leur rôle au sein du continent pour transmettre une image fidèle et infaillible de la réalité des événements et des développements dont ils sont témoins. Ces facteurs offrent aux journalistes la possibilité d’échanger directement l’information avec leurs collègues sans avoir recours à un tiers étranger. Il est nécessaire que les journaux prêtent attention à l’étude des domaines de la politique, de l’économie, de la culture et des arts de leurs pays, et non pas seulement aux sports, et qu’ils leur accordent une large place dans la couverture médiatique sans être influencés par des facteurs externes.
L’UJA soutient les journalistes dans la lutte contre ce monstre de fausses informations dont l’Afrique est toujours la cible. Le monde occidental ayant pour objectif de maintenir le continent sous-développé et dépendant de lui.
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