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Vers un amendement du code pénal

May Atta , Jeudi, 21 mars 2024

Le parlement est en passe de terminer l’élaboration d’un nouveau code pénal qui introduit des garanties pour les droits des accusés.

Vers un amendement du code pénal

La commission législative au parlement est sur le point d’achever la formulation du nouveau code pénal. Le député Ihab Al-Tamawi, sous-secrétaire de la commission, a assuré que le projet de loi sera examiné par les députés durant les prochaines séances plénières pour préparer sa promulgation finale. L’amendement du code est un tournant décisif qui représente, selon Al-Tamawi, « une deuxième constitution » pour les Egyptiens.

L’importance de cet amendement réside dans la réorganisation des règles encadrant le processus pénal de façon à réaliser l’équilibre entre le respect des libertés et l’efficacité de la répression pénale. Afin de garantir cet équilibre, les amendements de la loi reposent sur les principes de la présomption d’innocence, le respect du droit de la défense et les garanties judiciaires durant les différentes phases de l’interrogatoire de l’accusé. Celles-ci commencent par l’enquête effectuée par la police sous le contrôle du Parquet général jusqu’à l’annonce du jugement.

C’est dans ce cadre que le projet de loi, qui comprend environ 500 articles, dont certains sont nouvellement ajoutés à la loi, essaie de maintenir l’objectif de cette législation qui consiste à considérer la personne arrêtée comme innocente tant que sa culpabilité n’a pas été définitivement déclarée par la justice comme le stipule la Constitution, explique le député.

Importance du nouveau code

Le code pénal actuel a été promulgué en 1950. Bien que les parlements égyptiens successifs aient adopté des modifications à la loi à plusieurs reprises, les experts estiment qu’il était indispensable d’apporter des changements considérables aux procédures pénales pour se conformer à la Constitution. C’est ce qu’affirme l’avocat Nasser Amin, expliquant que « bien que cet amendement ait tardé d’au moins 10 ans, sa promulgation est importante pour mettre en oeuvre les articles de la Constitution liés à cette loi ».

Dans le même sens, le député Ihab Al-Tamawi estime que l’un des principaux objectifs de ce projet de loi est d’assurer la mise en oeuvre de la Constitution, notamment en ce qui concerne les enquêtes qui renferment une arrestation, une fouille ou une perquisition à domicile. « Selon la Constitution de 2014, nous devions changer l’article qui organise ces cas », affirme-t-il, ajoutant que « les changements apportés sont radicaux et permettent d’aller de pair avec les développements de l’époque actuelle et avec les principes de la nouvelle République ».

En effet, le projet de loi est en grande partie basé sur l’article 54 de la Constitution de 2014 qui stipule qu’à « l’exception des cas de flagrant délit, nul ne peut être arrêté, fouillé, détenu, ou subir une restriction de liberté qu’en vertu d’une décision judiciaire motivée et sur la base d’une enquête ».

Selon l’amendement apporté à la loi, l’ordre de l’arrestation doit être délivré par le pouvoir judiciaire et non par le Parquet général, comme c’est le cas dans la version en cours. De même, le député a fait savoir que le projet de loi procure à tout accusé devant la Cour pénale le droit de faire appel à deux reprises du jugement prononcé contre lui. Il s’agit d’une modification très importante car elle offre une deuxième chance de faire appel de la décision rendue par la Cour d’appel.

En outre, comme l’explique Al-Tamawi, le projet de loi garantit la présence d’un avocat pour chaque accusé comme le stipule la Constitution, toujours dans son article 54. « Toute personne dont la liberté est restreinte doit être informée sans délai des raisons, avertie par écrit de ses droits, autorisée à contacter les siens et son avocat immédiatement et présentée aux autorités de l’enquête dans les 24 heures qui suivent la restriction de liberté », prévoit la Constitution.

Cependant, l’avocat Nasser Amin prévient que la version de la loi en cours de préparation « garantit la présence d’un avocat pour les accusés dans des crimes et non des délits. Mais selon l’article 54 de la Constitution, chaque accusé doit avoir son avocat quel que soit son type d’infraction pénale ». Il souligne qu’il s’agit d’un détail important qui doit être pris en considération. L’avocat déplore également le fait que le parlement n’ait pas consulté les avocats et les juristes lors de la rédaction de ces amendements : « Aucune version ne nous a été envoyée, même pour consultation ».

La détention provisoire allégée

Comme stipulé par la Constitution, le projet de loi détermine également les conditions de la détention provisoire, sa durée, ses raisons et les cas de droit à l’indemnisation. Le projet de loi prévoit, pour la première fois, d’octroyer une compensation financière en cas de détention provisoire illégale et une indemnisation en cas d’acquittement. La nouvelle version vient donc mettre terme à tous les aspects négatifs liés à la détention provisoire. Pendant plusieurs années, un grand nombre de prisonniers étaient détenus provisoirement sans investigation pour une durée qui dépasse les deux ans et sans la présence de leurs avocats. La détention provisoire est renouvelée automatiquement parfois sans raisons et sans se baser sur de nouvelles informations. Il s’agit de l’une des principales recommandations du Dialogue national, qui a appelé à la révision des articles organisant la détention provisoire dans le Code de procédure pénale.

« Le projet de loi essaie d’envisager la détention provisoire comme une mesure de précaution plutôt que comme une punition et d’établir d’autres outils alternatifs en diminuant sa durée. Pour réaliser le but de la Constitution, le projet de loi a diminué la durée de la détention provisoire pour les crimes passibles de peine de mort ou d’emprisonnement à perpétuité, passant de deux ans à 18 mois. Les amendements réduisent également la durée maximale de détention provisoire pour les délits, passant de six à quatre mois, et pour les crimes de 18 à 12 mois. Les amendements activent également le droit de l’accusé au silence comme l’une des garanties stipulées dans la Constitution égyptienne », assure Al-Tamawi.

Le droit des personnes handicapées est également assuré par la nouvelle version du code pénal, qui prévoit de protéger les droits des handicapés pendant les différentes phases en fournissant tous les moyens d’accès nécessaires et appropriés lors de ces étapes. Le projet de loi garantit aussi les droits des accusés et des condamnés souffrant de maladies mentales ou psychologiques depuis l’enquête jusqu’au jugement. « Il assure les droits des femmes et des enfants et cherche à reporter la mise en oeuvre de certaines sanctions contre les femmes enceintes », rassure le député.

Selon Al-Tamawi, le projet de loi prévoit de nouvelles mesures en ce qui concerne les interdictions de voyager de façon à ne pas porter atteinte au droit des individus à la liberté de circulation. Il ajoute que certaines peines dans quelques cas de délit sont remplacées par le fait d’obliger les condamnés à effectuer des travaux d’intérêt public au lieu des peines de privation de la liberté. Il réorganise aussi le droit de faire appel des jugements par contumace afin d’obtenir une justice rapide. La loi exige que la personne condamnée soit informée du jugement par les moyens de télécommunications modernes. Il existe également des articles qui garantissent la protection des témoins et des victimes. Tous les articles de la nouvelle loi sont en accord avec la Stratégie nationale des droits de l’homme adoptée par l’Egypte, conclut le député.

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