Le divorce est une expérience des plus douloureuses. En Egypte comme ailleurs, pour les femmes comme pour les hommes. Même lorsqu’on est conscient que la relation a pris son terme, que la séparation est la meilleure solution pour mettre fin aux disputes, aux malentendus et à une vie de couple invivable, on est hanté par de multiples craintes : la peur de vivre seul, d’être autonome financièrement, et surtout de porter le label de l’échec. Ces craintes s’amplifient surtout dans une société qui n’encourage pas le blessé à s’exprimer, mais plutôt à refouler ses sentiments et ensevelir ses maux.
Pourtant, le couple séparé peut, chacun de son côté, surmonter la détresse de la séparation et se reconstruire. Mais tout d’abord, il importe de « vivre son deuil » avant de faire l’élan vers la guérison. Parce que « le divorce est le plus grand traumatisme après la mort », explique Moushira Anter, life et leadership coach basé à Toronto. Et d’ajouter : « Il est traversé par nombre de sentiments excessivement lourds et douloureux d’échec, d’amertume, de chagrin, de colère, de rage, mais surtout de peur ». Il s’agit d’une peur innée d’affronter le quotidien en solo après qu’on était partenaire.
Libérer sa douleur et apprivoiser sa solitude
Que ce soit la personne qui a subi la décision ou celle qui l’a prise, elle est submergée par des tonnes de tristesse. Exprimer son mal est une libération. C’est ce à quoi s’attache Moushira Anter. Point de conseils à donner, point d’ordonnance qui convient à tout le monde. Parce que tout simplement, « chaque expérience est unique et dépend de la personne et de ce qu’elle ressent », insiste-t-elle. Mais le secret de la guérison est de faire sortir sa tristesse, l’évacuer d’une manière ou d’une autre et ne pas la refouler. S’adresser à un thérapeute pourrait faciliter la tâche ou du moins à un et ou une amie. Moushira n’insiste pas trop à se rendre chez un thérapeute si l’on n’est pas traumatisé. Face à un divorce classique, la personne peut partager ses émotions avec un ou une amie, une personne de la famille de confiance. Ce qui l’importe avant tout, c’est de remédier les plaies de son âme. Elle rappelle un dixit qui va à merveille avec l’auto-remède : « Si vous ne vous remettez pas, vous allez sans doute saigner sur les autres ». Cela dit, si on ne prend pas bien soin de soi-même, de sa colère, sa rage refoulée finira par s’exploser avec les enfants, avec les membres de la famille ou, pire, avec ses collègues et patrons, ce qui pourrait influencer négativement sur sa carrière.
Au-delà des clichés
Classiquement, aux yeux de tout le monde, l’homme semble se remettre rapidement, puisqu’il plonge dans le travail, ou se jette dans les salles de sport et cherche de nouvelles rencontres dans le but de se consoler dans les bras d’une autre femme.
La femme, quant à elle, change de look, se fait une nouvelle coupe, va à la gym, s’efforce de perdre du poids, tente d’effacer les traces de l’âge, etc. Bref, elle se fait belle pour insinuer ainsi à son ex-partenaire qu’il a beaucoup perdu en la quittant.
Mais que pensent les spécialistes de ces attitudes très communes ? Est-ce que la réaction de l’homme reflète un certain « je m’en fous » ou signifie-t-elle qu’il est beaucoup moins sensible que la femme et qu’il se remet plus rapidement ? Ce ne sont que des préjugés et des lieux communs qu’on ne cesse de répéter. Moushira Anter affirme que la réaction de l’homme dans le post-divorce vient principalement de la peur. L’homme aussi peut avoir profondément peur de la solitude, du changement brusque dans sa vie. « Le problème est que l’homme, le plus souvent, n’arrive pas à exprimer ses sentiments. Dans sa nature, il ne peut pas vivre en solo, il résout son problème par un second mariage en vitesse. Je pense que la femme est beaucoup plus puissante, dans le sens qu’elle endure plus que l’homme la perte et les sentiments déchirants, y compris la solitude ».
Et la femme qui affronte sa solitude par la reconstruction insensée de son emploi de temps ? Moushira Anter souligne que ce ne sont que des solutions factices qui ne touchent pas aux profondeurs. Remédier à ses blessures et les plaies de l’âme devrait être la première préoccupation. Recoller les morceaux du « moi » tout d’abord, ensuite vient comment planifier son temps et remplir son emploi de temps. Elle revient à son credo privilégié : évacuer ses émotions d’abord pour que ça ne se transforme pas en colère qui ravage tout. « Nous utilisons un exemple très signifiant dans ce sujet : dans l’avion, lorsqu’on est menacé par une catastrophe, on est conseillé de retirer le masque d’oxygène, de l’utiliser pour se sauver, survivre tout d’abord pour pouvoir ensuite aider les autres ».
Un amour en chasse un autre ?
Certains conseillent à ceux qui viennent de subir une rupture de faire de nouvelles rencontres pour oublier les blessures du passé. D’autres estiment, au contraire, que c’est une erreur qu’il faut éviter et qu’il est surtout nécessaire de se donner du temps pour se reconstruire, afin d’éviter un nouvel échec. « Laisser du temps au temps » est sans doute une étape positive, c’est une sagesse qui convient à toute perte et expérience de désolation dans la vie. Cependant, rien n’est définitif, aucune solution n’est tranchante dans la complexité de l’être humain. « Je ne donne pas de conseils, insiste Moushira. Si une personne vient me demander conseil avant son remariage, je la traite comme une personne adulte, maîtresse d’elle-même, la réponse doit sortir de lui ou d’elle. Je ne fais que souligner ses propos pour qu’il arrive par lui-même à sa décision ». Et d’ajouter : « Parce que qui dit que ce n’est pas le bon choix ? ». Au-delà de cette démarche « démocrate », libératrice, adoptée par Moushira Anter, celle-ci conclut : « Si conseil il y a, j’opterai à insister sur le mariage même, ce n’est pas une étape sociétale impérative ou une urgence : éducation/travail/mariage. Je dirais qu’il fallait penser profondément et lentement avant de décider de se marier ».
Comment aider les enfants à vivre le divorce de leurs parents ?
Les enfants de parents divorcés sont plus susceptibles à avoir des fragilités psychologiques. Certaines démarches peuvent cependant éviter le pire.
1- Ne pas sous-estimer l’intelligence de l’enfant : il ressent le malentendu entre ses parents et il faut le préparer à la séparation.
2- Consulter un thérapeute pour aider les parents à réduire au maximum les effets négatifs sur l’enfant.
3- Renforcer le sentiment d’amour envers l’enfant parce qu’il est hanté par l’idée de l’abandon et qu’il n’est pas aimé.
4- Continuer à coopérer dans les fonctions parentales.
5- Faire attention à son propre bien-être psychologique, car le bien-être des parents se reflète automatiquement sur l’enfant et le marque profondément.
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