« Il est temps d’agir : les enfants africains sous les projecteurs du changement climatique ». Tel est le titre d’un nouveau rapport de l’Unicef qui sonne l’alarme : dans 98 % des pays africains, les enfants sont les premières victimes du dérèglement climatique. Publié la semaine dernière en marge du premier Sommet africain du climat tenu le 1er septembre à Nairobi au Kenya, ce rapport présente une analyse qui met en lumière l’exposition et la vulnérabilité multiformes des enfants d’Afrique au changement climatique.
S’appuyant sur les données de l’Indice de risque climatique pour les enfants (CCRI) développé par l’Unicef, le rapport souligne à quel point les enfants sont biologiquement moins équipés pour faire face aux effets de chocs tels que la pénurie d’eau, les inondations et les maladies à transmission vectorielle, dont la fréquence et l’intensité augmentent en raison des effets du changement climatique. Le paludisme reste l’une des principales causes de décès chez les enfants de moins de 5 ans en Afrique et sa prévalence devrait augmenter en raison du changement climatique.
La vulnérabilité des enfants
Tous les pays d’Afrique et pratiquement tous les enfants sont touchés par des risques considérablement accrus, même si leur intensité varie à travers le continent. Alors que les enfants et les communautés de la région nord ont tendance à être exposés à des risques plus élevés liés à la pénurie d’eau et à la pollution de l’air, ceux qui vivent dans les parties ouest et est du continent, en particulier dans les zones tropicales, sont plus lourdement touchés par les risques posés par les maladies à transmission vectorielle, les vagues de chaleur et les inondations fluviales. Certains risques, tels que les cyclones tropicaux et les inondations côtières, sont plus élevés dans des zones spécifiques du continent, tandis que les risques liés à la pollution des sols et de l’eau affectent les enfants à travers le continent, sans schéma de variation géographique clairement identifiable.
Tous les pays présentent donc des écarts, mais ceux des zones tropicales présentent les écarts les plus élevés, ce qui entraîne une augmentation de la vulnérabilité des enfants dans les quatre dimensions incluses dans le CCRI : santé et nutrition, propreté et hygiène, éducation et protection sociale. Dans son rapport, l’Unicef a indiqué surtout que les enfants de la République centrafricaine, du Tchad, du Nigeria, de la Guinée, de la Somalie et de la Guinée-Bissau sont les plus menacés. Et que les enfants de 48 des 49 pays africains évalués sont catégorisés comme étant « à risque élevé ou extrêmement élevé » de subir les impacts du changement climatique. Le rapport évalue les pays en fonction de l’exposition des enfants aux chocs climatiques et environnementaux, tels que les cyclones et les vagues de chaleur, ainsi que de leur vulnérabilité à ces chocs, en fonction de leur accès aux services essentiels.
Financement limité
Les Fonds climatiques multilatéraux (FMC) jouent un rôle essentiel dans l’acheminement du financement climatique fourni par les pays développés aux pays en développement, y compris l’Afrique. Des données récemment publiées ont révélé une lacune majeure dans le financement international du climat qui ne donne pas la priorité aux besoins des enfants. Ces derniers restent extrêmement négligés par les principaux flux de financement climatique nécessaires pour les aider à s’adapter, à survivre et à répondre à la crise climatique.
Seuls 2,4 % des financements mondiaux contre le changement climatique sont destinés à soutenir des activités en faveur des enfants, ce qui équivaut à une moyenne d’environ 71 millions de dollars par an. Il s’agit d’une contradiction frappante. Le financement climatique et les actions qui négligent l’exposition et la vulnérabilité spécifiques des enfants affaiblissent l’efficacité des mesures de réponse au changement climatique et risquent de contribuer à des conséquences sociales néfastes, à un approfondissement des inégalités et à l’instabilité politique. « Il est clair que les plus jeunes membres de la société africaine subissent le plus gros des effets néfastes du changement climatique. Nous devons concentrer davantage le financement sur ce groupe, afin qu’il soit équipé pour faire face à toute une vie de perturbations induites par le climat », a souligné Lieke van de Wiel, directrice adjointe de l’Unicef pour la région de l’Afrique orientale et australe.
Cinq séries d’actions
Enfin, le rapport vise à présenter des interventions et des solutions spécifiques qui, principalement grâce à l’adaptation et au renforcement de la résilience, se sont révélées des outils efficaces pour atténuer l’impact immédiat et attendu du changement climatique sur les enfants, leurs familles et les communautés, en particulier les plus vulnérables et marginalisés.
Les institutions gouvernementales et intergouvernementales, les entreprises et autres parties prenantes ont l’obligation d’agir rapidement et de manière décisive. Le rapport appelle les parties prenantes concernées à donner la priorité à cinq séries d’actions-clés : renforcer la résilience climatique des systèmes de services essentiels pour protéger les enfants et les communautés ; allouer davantage de financements nationaux et internationaux aux programmes climatiques adaptés aux enfants ; doter les enfants d’une éducation climatique et de compétences vertes ; impliquer les enfants dans les processus de prise de décision et réduire les émissions de carbone à l’échelle mondiale. « Ne pas agir maintenant non seulement exacerbe les risques immédiats, mais également menace la résilience à long terme et contribue aux inégalités sociales et à l’instabilité politique », conclut le rapport.
Qu’est-ce que le CCRI ?
Développé par l’Unicef, l’Indice mondial de risque climatique pour les enfants (CCRI) mesure à la fois la susceptibilité immédiate et la résilience à long terme des enfants. Il vise à fournir une mesure synthétique des risques uniques et accrus auxquels les enfants sont confrontés en raison des effets du changement climatique. L’indice prend en compte des facteurs tels que l’exposition des enfants aux dangers et leurs capacités d’adaptation, et intègre des indicateurs de deux piliers : l’un mesurant l’exposition des enfants aux risques environnementaux et l’autre évaluant leur vulnérabilité à de telles menaces.
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