Pluie de stars, rétrospectives, programmation axée sur la "diversité et la transmission": le festival du cinéma américain de Deauville dans l'ouest de la France fête son 50ème anniversaire en grande pompe après un été chamboulé par la polémique sur l'éviction du jury du trompettiste Ibrahim Maalouf.
"Nous allons regarder dans le rétroviseur et nous tourner vers l'avenir", a confié mardi à l'AFP Aude Hesbert, nouvelle directrice du festival, qui s'ouvre vendredi pour une dizaine de jours dans la station balnéaire.
Mme Hesbert a remplacé durant l'été l'ancien directeur du festival Bruno Barde, démis de ses fonctions après des accusations d'agressions sexuelles dans le média français Mediapart.
Le jury sera présidé par l'acteur Benoît Magimel, figure populaire en France avec plus d'une soixantaine de films à son actif. Il a notamment travaillé avec le réalisateur autrichien aux deux Palmes d'or à Cannes Michael Haneke et avec le Français Claude Chabrol (1930-2010).
Michael Douglas, Natalie Portman ou James Gray entre autres vont recevoir des prix honorifiques, ainsi que l'actrice Michelle Williams ("Manchester By The Sea", "The Fabelmans").
Francis F. Coppola doit venir présenter son dernier film "Megalopolis", comme Sean Baker avec "Anora" (Palme d'or du festival de Cannes 2024), l'Italien Paolo Sorrentino ("Parthenope"), ou encore Tim Burton ("Beetlejuice Beetlejuice").
La fille de l'ancien président Barack Obama, Malia Ann, recevra un "Next Generation Award", prix spécial créé pour cette 50e édition, pour son court-métrage "The Heart", qui va être diffusé pour la première fois en France.
"Sur les 12 films en compétition, huit sont les premiers films de leurs réalisateurs", a poursuivi Aude Hesbert.
"La transmission est le fil conducteur de cette édition", a expliqué Mme Hesbert, directrice adjointe du festival de 2018 à 2023, avant de partir un an aux Etats-Unis où elle a "mieux compris la société américaine, sa francophilie, leur façon de lutter contre les violences sexistes et sexuelles".
Aude Hesbert souhaite tourner la page des polémiques #MeToo, à savoir le départ de Bruno Barde, l'éviction du jury du trompettiste franco-libanais Ibrahim Maalouf.
Des décisions "nécessaires mais difficiles, qui seront assumées jusqu'au bout" et ont "beaucoup affecté" Aude Hesbert.
Ibrahim Maalouf avait été accusé il y a plusieurs années d'agression sexuelle sur mineure, une affaire dans laquelle il a été relaxé en 2020, mais qui avait installé "un malaise dans l'équipe" aux dires de la direction.
Samedi, l'avocate du trompettiste, Fanny Colin avait regretté auprès de l'AFP que "le festival de Deauville sacrifie un innocent (...) pour des intérêts mercantiles".
L'avocat de Public Système (organisateur du festival), Patrick Maisonneuve, a rétorqué jeudi qu'il "n'y a pas de partenaires financiers qui sont intervenus et qui ont fait pression" au sujet de M. Maalouf. Il a rappelé un arrêt de la cour d'appel disant que "M. Maalouf a eu un comportement inadapté vis-à-vis de cette jeune fille de 14 ans".
Le journal français Le Point avait en outre affirmé que l'actrice et réalisatrice française Maïwenn avait été écartée de la présidence du jury. Mais la nouvelle direction du festival a démenti.
En mai un collectif d'actrices et d'acteurs français avait critiqué le Festival de Cannes qui déroule "le tapis rouge aux hommes et femmes qui agressent", en référence à l'acteur Johnny Depp, chaleureusement accueilli au festival par Maïwenn.
"Il est important de travailler avec l'équipe sur une charte pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles, les abus de pouvoir", a poursuivi la nouvelle directrice. Elle souhaite faire profiter la France de son expérience américaine et des "coordinateurs d'intimité", qui interviennent de manière neutre pour faciliter les scènes jugées difficiles.
"Il faut parler des situations difficiles, lever les obstacles à la libération de la parole, libérer de l'emprise aussi", conclut Aude Hesbert.
Le palmarès de cette 50e édition sera dévoilé le 14 septembre.
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