En réalité, la différence dans la façon de traiter avec la Chine, que ce soit pour Donald Trump ou Kamala Harris, se situera uniquement au niveau des mécanismes, et non des objectifs. Les deux partis, républicain et démocrate, s’entendent sur le fait que la Chine est le principal adversaire stratégique des Etats-Unis, menaçant leur hégémonie mondiale. Effectivement, la Chine oeuvre pour acquérir les moyens de la force globale, mettre fin à l’unipolarité et instaurer un ordre mondial bipolaire. C’est là le coeur du conflit entre les Etats-Unis et la Chine, principalement économique. Les deux pays sont les deux plus grandes économies du monde, représentant 40 % du PIB mondial.
Pour Harris, sa politique envers la Chine sera probablement un prolongement de celle du président Joe Biden. Celle-ci se concentre sur la gestion des différends avec la Chine et non sur leur résolution, car il s’agit de différends profonds concernant de nombreuses questions : guerre commerciale, taxes réciproques, guerre des puces électroniques, question de Taïwan, militarisation de la mer de Chine méridionale et conflit stratégique sur l’ordre mondial. Tout cela a placé cette relation dans un cadre de concurrence tout en évitant le choc direct et en continuant à privilégier la diplomatie et les canaux de communication ouverts à travers les sommets avec le président Xi Jinping et les visites réciproques des responsables. Le tout se passe dans un contexte de maintien des taxes et tarifs douaniers imposés à la Chine. Harris continuerait donc la politique de la carotte et le bâton que Biden a appliquée au cours des dernières années avec la Chine. L’Administration Biden avait interdit l’exportation des puces électroniques à la Chine, sous prétexte qu’elles étaient utilisées dans des industries militaires chinoises stratégiques, ce qui constituait une menace pour la sécurité nationale américaine.
Quant à Trump, en cas de victoire, sa politique serait un prolongement de celle qu’il avait adoptée pendant son mandat (2017-2021) et qui reposait essentiellement sur une approche de fermeté envers la Chine, ainsi que sur la tentative de réduire le déficit commercial avec elle, qui atteint 400 milliards de dollars, à travers l’imposition de taxes et de tarifs douaniers sur les produits chinois, notamment l’acier. Trump avait tenté de soutenir et de relocaliser les industries américaines à l’étranger, en particulier en Chine.
Cependant, la politique rigoriste de Trump envers la Chine a poussé cette dernière à adopter des méthodes similaires, en imposant également des sanctions et des taxes sur les produits des Etats-Unis, notamment le soja dont ils sont le premier exportateur. Cela a nui aux agriculteurs américains et a contribué à la défaite de Trump face à Biden. Trump envisage d’imposer une augmentation allant jusqu’à 60 % des tarifs douaniers sur les produits chinois et met en garde contre l’invasion des marchés américains par les voitures électriques chinoises.
Quel que soit le vainqueur à la présidentielle américaine, il ne faut pas s’attendre à un changement radical dans la politique américaine envers la Chine. Cette politique restera fondée sur le fait que la Chine est le principal adversaire stratégique, comme l’assure la stratégie de sécurité nationale américaine, tout en évitant un affrontement militaire. Le volume des échanges commerciaux entre les Etats-Unis et la Chine, qui atteint 800 milliards de dollars, les pousse à éviter un affrontement militaire en raison du danger qu’il représente pour le monde entier, et il est difficile de séparer les deux plus grandes économies du monde. Aussi, il n’est pas prévu que les différends en suspens entre les deux superpuissances soient réglés, en particulier la question de Taïwan.
Il est cependant attendu que les deux adversaires tentent de parvenir à une entente pour oeuvrer ensemble sur plusieurs questions telles que les pandémies, les changements climatiques et le libre commerce mondial. Il est prévu que Washington continue à nouer des partenariats et des coalitions avec ses alliés, notamment en Asie, comme le Japon, afin d’empêcher la montée de la Chine.
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