Lorsque le président Adly Mansour a déclaré au cours d’un important entretien avec Mohamad Abdel-Hady, rédacteur en chef d’Al-Ahram, que la nouvelle Constitution avait mis fin à la légende du « président pharaon », il parlait en sa qualité d’homme de droit lucide et conscient, et armé d’une profonde expérience constitutionnelle.
La Constitution stipule que le président de la République met en place le cadre de la politique générale de l’Etat avec la collaboration du premier ministre qui représente la majorité élue à la Chambre des députés. Selon la Constitution, c’est le premier ministre qui assure l’intérim en cas d’absence du président qui ne détient plus les prérogatives de le choisir comme bon lui semble : son choix est conditionné par l’approbation de la majorité parlementaire. La Constitution, également, stipule que le président sera traduit en justice s’il viole la Constitution ou commet un crime.
Tout cela empêche le cumul des pouvoirs dans les mains du président comme c’était le cas auparavant, bien qu’il demeure la figure de proue du régime et le représentant du pouvoir politique. L’Egypte, par nature, est un Etat centralisé et elle restera ainsi. Mais ceci ne veut pas dire que son gouverneur soit un pharaon et qu’il la manipule comme bon lui semble.
La Constitution stipule aussi d’adopter un nombre de procédures réalisant une certaine dose de décentralisation, surtout en ce qui concerne les gouvernorats. Mais tout cela s’inscrit dans le cadre d’un régime présidentiel ou semi-présidentiel et non d’un régime parlementaire allant à l’encontre de la spécificité de la réalité politique égyptienne.
D’où émanent donc certaines réserves avec les craintes d’un « régime militaire » ou de « l’accaparement du pouvoir par le prochain président ». Ces considérations, je dirais, sont très loin de la réalité. Les articles de la Constitution dans leur ensemble, et non pas uniquement ceux qui se rapportent à ce sujet, obligent le président à recourir à l’exercice démocratique, qui est une condition sine qua non et irremplaçable pour le peuple. Si nous mettons de côté les articles relatifs aux prérogatives du président, nous verrons que le reste des articles, soit à propos du régime politique, des pouvoirs du Conseil législatif et du reste des institutions étatiques, entravent tous l’usage excessif du pouvoir du chef d’Etat, y compris les articles sur les droits et les libertés qui accordent aux citoyens ce qu’aucun gouverneur ne peut spolier. Reste l’éventualité qu’un président dictateur survienne et tente d’étendre ses pouvoirs sur le reste des institutions étatiques. Mais cela n’est aujourd’hui plus possible, sans la violation flagrante de la loi en vertu de laquelle il sera pénalisé.
Je suis parfaitement conscient que le peuple qui est descendu dans les rues, refusant le pouvoir du pharaon deux fois en moins de 3 ans, ne se soumettra plus. Il n’acceptera plus que sa Constitution soit violée, car elle a été approuvée par une majorité sans précédent, avec le monde entier comme témoin.
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