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La mission impossible de Biden

Mercredi, 03 avril 2024

Certains analystes se sont précipités pour qualifier la tension apparente dans les relations entre l’Administration de Joe Biden et le chef du gouvernement d’Israël d’un revers dans les rapports des deux alliés.

Les analystes ne se sont donnés la peine de réaliser ni les limites de cette tension ni ses motifs réels.

La raison essentielle de cette tension s’articule autour du refus du président américain du plan de Netanyahu d’envahir la ville de Rafah, sur la frontière égyptienne, dans laquelle vivent plus d’un million de réfugiés palestiniens déportés par la force à Gaza. La raison du refus affiché par Biden est que le plan ajoutera des milliers de martyrs et de blessés parmi les civils, de nature à saper ce qui reste de la crédibilité d’Israël auprès de la communauté internationale. En plus, le plan pourrait attiser des dangers au sein de l’armée israélienne et éroder l’harmonie interne en Israël.

Tout ceci nous démontre que le président américain ne s’intéresse pas au sort du peuple palestinien. Il veut garantir de ne plus voir un autre soulèvement palestinien qui pourrait entraîner toutes les séquelles fâcheuses déjà vécues. Biden tient à sauver la face d’Israël et voit que la politique de Netanyahu représente une menace pour l’avenir de Tel-Aviv. Qui est donc le plus attaché à défendre Israël et ses intérêts ? Revenons dans ce contexte à un entretien de Biden à la chaîne MSNBC le 9 mars, où il a déclaré que le premier ministre israélien « porte atteinte à Israël plus qu’il ne lui est bénéfique », ajoutant que Netanyahu a le droit de défendre Israël et de persister dans ses attaques contre le Hamas ; mais il faut qu’il soit prudent en ce qui concerne les victimes innocentes qui perdent leurs vies à cause des représailles. Il a cependant ajouté qu’il ne renoncerait jamais à Israël et que pour son bien-être, il arrêterait ses approvisionnements en armes ; car il y a des lignes rouges et qu’il ne pourrait jamais accepter la mort d’autres 30 000 Palestiniens, mais qu’il y a d’autres moyens pour traiter avec le choc causé par le Hamas.

Ainsi, l’entretien qui a eu lieu entre le secrétaire à la Défense, Lloyd Austin, et le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, était censé chercher des moyens alternatifs pour réaliser l’objectif de saper le Hamas sans entraîner la mort des dizaines de milliers de nouvelles victimes. La dernière chose que Biden souhaiterait c’est de se trouver en confrontation avec Netanyahu à quelques mois de la présidentielle dans laquelle il fera face à l’ex-président, Donald Trump, connu pour être un allié incontournable d’Israël. Celui-ci saisira au vol n’importe quelle erreur commise par Biden pour amener la communauté juive à lui faire barrage dans les bureaux de vote.

Sans nul doute, Joe Biden, qui se vante d’être sioniste plus que juif, ne pourrait songer à défier Israël ou à menacer sa relation avec lui. Tout ce qu’il désire faire, selon ses convictions, c’est de repêcher Israël des catastrophes commises par Netanyahu. La position de Biden n’est pas le fruit du hasard, mais elle était soutenue par des signes précurseurs. A l’instar des déclarations du sénateur démocrate Chuck Schumer, doyen des législateurs de New York et fervent défenseur d’Israël. Juif qui soutient inconditionnellement sa judaïté, Schumer a appelé les Israéliens à tenir de nouvelles élections et à renoncer au gouvernement extrémiste de Netanyahu. Il a accusé Netanyahu d’avoir transformé Israël en un Etat voyou aux yeux du monde et que son gouvernement servait seulement les intérêts d’un segment extrémiste à l’intérieur de la société israélienne.

Le plus important est l’alerte lancée par le professeur israélien Yuval Harari, historien à l’Université hébraïque de Tel-Aviv. Harari a déclaré que « le Hamas est sur le point d’infliger une défaite à Israël. Parce que la campagne à Gaza ne se rapporte pas à celui qui tue le plus, mais à celui qui parvient à réaliser ses objectifs politiques ». Il atteste qu’Israël est capable de gagner toutes les batailles, « mais nous allons perdre la guerre ». La raison, à son sens, est « l’absence d’une perspective politique de guerre ».

Il s’agit là des grandes lignes de la tension américano-israélienne. Biden est impliqué dans cette tension plus que les grands leaders israéliens de l’opposition comme Benny Gantz et Yaïr Lapid, qui estiment que Netanyahu a mal géré la guerre et qu’il faut sauver Israël. Le pire est que Netanyahu croit qu’il est le plus qualifié à réaliser les objectifs d’Israël et défie ainsi Biden en insistant sur le fait d’envahir Rafah. Des évolutions qui prouvent qu’Israël est au bord du précipice et que Biden fait face à une mission impossible.

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