Le projet de Constitution représente le premier pas sur la voie de la reconstruction du régime politique, économique et social de l’Egypte. Il instaure un Etat civil et moderne basé sur les principes de la citoyenneté et l’égalité entre les citoyens sans aucune discrimination confessionnelle, raciale ou sexiste. Il instaure un Etat qui respecte les libertés et les droits de l’homme afin de fonder un régime politique démocratique caractérisé par la séparation et l’équilibre des pouvoirs. Il instaure un système pour les salaires, les impôts, la santé, l’enseignement et la recherche scientifique : un système qui assurera le développement et qui garantira les droits du peuple à un accès aux soins médicaux et éducatifs de manière juste et équitable.
Malgré toutes les remarques avancées sur ce projet et malgré les oppositions contre certaines clauses, nous devons en être fiers. En effet, la différence est énorme entre une Constitution élaborée par une assemblée constituante représentant toute la nation et dont les clauses faisant l’objet de réserves ou de controverses peuvent être amendées à travers le Parlement qui jouira fort probablement d’une certaine diversité et d’un certain équilibre, et entre une Constitution déformée inaugurant une ère obscure menaçant l’avenir, la stabilité et l’union de la nation, prédisant l’instauration d’une dictature octroyant des pouvoirs absolus au président et ne garantissant aucun droit socioéconomique au peuple. Une Constitution imposée par une assemblée constituante, dominée par une seule faction avide qui a empêché la Haute Cour constitutionnelle de trancher sur sa constitutionnalité, ne posait pas les bases d’un avenir serein.
En ce qui concerne les droits socioéconomiques, le projet de Constitution a apporté 7 points importants qui renouvellent l’histoire des Constitutions égyptiennes. Premièrement, le texte de l’article 18 a consacré au moins 3 % du PNB aux dépenses publiques liées à la santé. Ce texte oblige tout gouvernement : sinon son projet de budget public devient non constitutionnel. Ce texte assure ainsi de véritables soins médicaux aux pauvres et à tout le peuple dans les hôpitaux publics, ainsi que le développement des équipements des hôpitaux et des rémunérations équitables au personnel médical, administratif et ouvrier oeuvrant dans le secteur de la santé.
Deuxièmement, les articles 19 et 21 consacrent 4 % du PNB aux dépenses publiques consacrées à l’enseignement et 2 % à l’enseignement supérieur, soit 6 % contre 4 % dans les budgets sous Morsi ou Moubarak. Il s’agit d’un progrès qui permettra un développement du processus éducatif. Ce texte stipule également que l’enseignement est obligatoire jusqu’à la terminale et gratuit dans toutes ses étapes.
Troisièmement, l’article 23 consacre un taux d’au moins 1 % du PNB aux dépenses consacrées à la recherche et au développement scientifique. Ce taux est de 5 à 10 fois plus important que ceux dédiés à cet effet sous Moubarak ou Morsi. Ce taux permettra à l’Egypte de développer ses institutions de recherche et de leur procurer des équipements sophistiqués ainsi que d’offrir des salaires décents aux scientifiques tout en finançant leurs projets.
Quatrièmement, l’abolition de l’exception du salaire maximum des employés de l’Etat dans l’article 27 mettra un terme définitif aux salaires aberrants de certains, salaires qui nuisent à ceux des autres employés. Ce fait permettra une plus grande justice et une plus grande transparence dans la répartition des salaires. La transformation de ce principe constitutionnel en lois concrètes et leur exécution stricte demeureront le principal moyen de réformer le système des salaires.
Cinquièmement, l’article 14 a amendé la proposition du comité des 10 et a confirmé que les postes publics seront répartis selon les compétences exactement comme dans le comité de 2012. Le comité des 10 avait enlevé le critère de compétence se contentant de dire que les postes publics sont accessibles aux citoyens. Cette formule aurait permis de préférer les fils de personnalités importantes au détriment des compétences.
Sixièmement, la Constitution établit le principe de la pluralité des tranches fiscales et leur progressivité. Il s’agit là du fondement essentiel de tout système fiscal équitable qui exonère d’impôts les pauvres et les citoyens à revenus limités et qui accroît l’imposition selon le volume des revenus.
Septièmement, l’article 49 stipule la criminalisation de l’atteinte aux monuments ainsi que leur trafic et la non-prescription de ce crime. L’article du prélude de la Constitution de 2012 ne stipulait pas la criminalisation de ces actes.
Nous aurions aimé que la Constitution renferme d’autres points importants. Citons, l’interdiction que les étrangers s’approprient des terres agricoles en Egypte alors que nous possédons des armées de paysans démunis et de chômeurs diplômés des écoles et des facultés agricoles, la criminalisation sévère de la pollution du Nil et de l’environnement, l’imposition sur l’extraction des ressources naturelles … Cependant, ce sont des choses qui pourront être mises en place par l’Assemblée du peuple ou le prochain président si le peuple vote pour ceux qui présentent des programmes politiques, économiques et sociaux réalisant les intérêts du peuple dans le développement et la justice.
Lien court: