Alors que la pandémie du coronavirus continue de sévir pour la deuxième année consécutive, nombreuses sont les discussions autour du nouveau monde dont les caractéristiques se forment. Un nouveau monde qui viendra remplacer celui auquel nous nous sommes habitués depuis des décennies. L’objectif n’est pas seulement de contrer les énormes pertes économiques subies à cause de la pandémie, mais aussi et surtout de prédire les mutations radicales qui surviendront et qui touchent la vie de l’homme, d’une part, et les régimes régissant le monde, d’autre part.
Depuis ses débuts, la crise du coronavirus s’est avérée être bien plus qu’une simple crise sanitaire, elle a dévoilé les lacunes de l’époque que nous vivons dans tous les domaines. Dès l’apparition et la propagation du virus de par le monde, une certaine fragilité a été dévoilée avec l’incapacité d’assumer les répercussions de la pandémie et sa persistance. Dans ce contexte, se sont imposées de nombreuses questions autour de l’avenir des relations sociales, de la valeur de la vie humaine, de l’efficacité des systèmes sanitaires et des systèmes d’assurances.
Avec les débuts de la seconde année de la crise sanitaire, plusieurs vaccins ont été mis en vente. Or, les vaccins eux-mêmes suscitent une certaine crainte autour de l’efficacité, de la crédibilité et de la capacité des systèmes économiques et sociaux mondiaux de sauver les peuples en temps de crise. Sans compter les séquelles économiques et sociales de la pandémie. Sans oublier les craintes
Dans son second livre sur la crise du Covid-19 « Pandémie II », le philosophe Slavoj Zizek explique l’ampleur des perturbations survenues aux dynamiques du pouvoir, de la force, des connaissances, des sciences et des capitaux ainsi que les échecs dans l’affrontement efficace de la pandémie, malgré le cri d’alarme lancé par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) relativement précocement. Le fait qui, selon Habermas, le philosophe le plus célèbre de la seconde moitié du XXe siècle, doit nous pousser inéluctablement à réarranger nos priorités dans la vie, aux deux niveaux humain et citoyen. Ceci signifie en contrepartie la nécessité que se crée quelque chose de nouveau aux deux niveaux sociétal et international pour la nouvelle ère post-Covid-19, et partant, la nécessité de nous libérer du principe lancé par Margaret Thatcher et qui a ligoté l’humanité pendant des décennies: Pas d’alternative.
En fait, la pandémie nous a appris de nombreuses leçons. La première leçon est qu’il est devenu impossible que l’humanité continue à avancer sur la même voie, c’est-à-dire qu’il n’est plus possible que persiste le même système socioéconomique avec ses stratégies, ses politiques et ses choix qui ne garantissent pas le développement et l’évolution pour tous. La seconde leçon est que tout le monde sans exception aucune peut contracter la maladie. Selon Zizek, cette pandémie se caractérise par la démocratie. Elle ne fait aucune différence entre riche et pauvre, entre dirigeant et citoyen, et j’ajouterai entre citoyen d’un pays développé ou d’un pays moins développé. Nous sommes tous sur le même navire. La troisième leçon est que cette crise sanitaire fait partie de la crise écologique compliquée qui menace l’avenir de la planète. En effet, en réponse à une question posée au philosophe français contemporain Bruno Latour dans une interview publiée en février dernier dans le magazine « Doha », il a déclaré que la pandémie faisait partie de la crise écologique et que les deux crises étaient étroitement liées. Ces deux crises enchevêtrées ne sont en fait que la concrétisation de la crise complexe relative aux politiques économiques abusives exercées sur la planète et ses habitants.
A la lumière de ces trois importantes leçons, un dialogue sérieux s’est engagé autour de l’importance de trouver ce que l’on peut appeler « une nouvelle alternative historique économique, sociale et politique » basée sur la coopération, le partenariat et la durabilité entre les pays du monde. Une alternative qui représente un changement radical des systèmes actuels, qui ont prouvé leur échec face à la pandémie. Une alternative qui reconstruit l’économie, la politique, la culture, la pédagogie, la loi, les sciences, les modes de civilisation, la préservation de la nature, les relations entre les hommes, etc.
Dans ce contexte, il est impossible par exemple que chaque pays parle seul des politiques sanitaires requises pour affronter la pandémie. De même, il est inacceptable que les compagnies pharmaceutiques entrent en compétition autour des vaccins, considérés comme une simple marchandise. N’est-il pas du droit des habitants de la planète d’être au courant, au fur et à mesure, de toutes les évolutions qui surviennent dans les laboratoires des firmes mondiales qui se sont engagées à trouver des vaccins à ce virus et ses variants? N’est-il pas du droit des habitants de la planète de connaître les réalités autour des différends commerciaux entre ces compagnies, notamment européennes et l’influence de ces différends sur la réalité? Comment est-il possible de corriger les politiques sanitaires pour pouvoir affronter les nouveaux défis relatifs à la santé, à l’environnement, au développement et autres? Toutes ces questions s’étendront, que nous le voulions ou non, aux différents espaces où l’homme/citoyen se déplace aujourd’hui.
Bref, si nous voulons une solution sérieuse, il est nécessaire d’adopter un résonnement collectif qui oeuvre à bâtir une nouvelle alternative historique basée sur de nouveaux critères qui garantisse une réalité plus sûre et plus humaine. Au lieu que chaque pays songe à se bâtir un réseau de protection sanitaire individuel, tous les pays du monde doivent songer ensemble à créer un réseau de sécurité sanitaire transfrontalier au caractère humain qui dépasse les approches économiques et idéologiques. C’est là un exemple des discussions qui préoccupent les penseurs de par le monde .
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