Un prix Nobel de la paix transformé en chef de guerre et un prix Nobel de la paix qui observe un mutisme complaisant à l’égard des massacres contre les minorités dans son pays. Le Nobel de la paix est-il encore synonyme de paix ?
Le 10 décembre 2019, le premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, recevait le prix Nobel de la paix. Le motif? Il a réussi à conclure la paix avec l’Erythrée, longtemps ennemi juré de l’Ethiopie.
En réalité, le chef du gouvernement éthiopien n’a fait que formaliser une paix qui existait de facto avec son voisin érythréen.
Mais le plus grave allait encore venir. A peine quelques mois après avoir obtenu la prestigieuse distinction, Abiy Ahmed se transforme subitement en chef de guerre. Face aux Tigréens qui contestent son pouvoir, il ordonne à ses généraux d’attaquer le Tigré et de mettre fin à la « rébellion ». Résultat : un conflit qui a fait de nombreux morts et où 2 à 4 millions de personnes sont exposées à la famine.
Trente ans plus tôt, en 1991, l’opposante birmane Aung San Suu Kyi recevait elle aussi le prix Nobel de la paix pour son engagement en faveur de la non-violence.
Cette militante longuement emprisonnée incarnait l’espoir de liberté dans le monde. Mais depuis que les Rohingyas font l’objet de massacres effroyables en Birmanie, Aung San Suu Kyi fait preuve d’un mutisme fort douteux refusant de se prononcer sur ce qui semble être une campagne de nettoyage ethnique.
Le conseiller spécial de l’Onu pour la Birmanie, Vijay Nambiar, l’a invitée à « écouter sa voix intérieure » et à « demander aux Birmans de s’élever au-dessus des appartenances ethniques et religieuses ». Aung San suu Kyi est restée murée dans son silence. Faut-il changer les règles d’attribution du prix Nobel de la paix? Les agissements de certains lauréats du Nobel de la paix portent assurément préjudice à ce prix prestigieux.
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