Les intérêts américains au Moyen-Orient sont aujourd’hui moins importants que dans le passé. Pour autant, les Etats-Unis sont-ils prêts à se retirer de la région ? L’or noir n’a plus le même attrait qu’il avait auparavant ave c un monde qui s’oriente à grande vitesse vers les énergies propres. Aussi, les Etats-Unis sont aujourd’hui le plus grand producteur de pétrole mondial. Israël a gagné plus en force et n’a plus besoin de la protection américaine, la Guerre froide a pris fin et il n’existe plus d’objectifs stratégiques qui sous-tendent les politiques de Washington dans la région. La politique américaine dans la région n’est pas régie par une logique claire qui ferait les liens entre ses différentes composantes.
Malgré tout cela, Washington ne se retirera pas de notre région même s’il le désire. Washington se positionne à l’heure actuelle à mi-chemin. En d’autres termes, il est incapable de renoncer au Moyen-Orient, mais simultanément, il n’est plus en mesure d’assumer le coût de son hégémonie.
Les adversaires des Etats-Unis comprennent très bien que les intérêts de Washington dans la région ne sont plus les mêmes. La détermination de Washington a été soumise à l’épreuve trois fois ces quelques dernières années, et à chaque fois, un échec lui était infligé. Ainsi il a décidé de faire marche arrière au lieu d’assumer le coût de l’escalade.
En 2013, l’ancien président Barack Obama était revenu sur sa menace de sanctionner le régime au pouvoir à Damas s’il utilisait des armes chimiques. Obama avait tracé une ligne rouge et Assad l’avait échappé belle. La crédibilité de l’oppression américaine a alors été sapée. Plus tard, en 2019, des installations pétrolières avaient été la cible d’attaques aériennes. Les enquêtes ont affirmé la responsabilité de l’Iran dans ces attaques. Le monde entier a retenu son souffle pour voir la rétorsion américaine. Mais, il n'en fut rien. Les Etats-Unis n’ont pas frappé les lieux où étaient implantés les missiles ou bien les installations pétrolières iraniennes. Même si un an après, le général iranien Qassem Soleimani a été tué, les infrastructures militaires de l’Iran n’ont pas été touchées.
L’Oncle Sam désire alléger ses engagements au Moyen-Orient, non seulement à cause du changement des priorités de son pays, mais aussi pour d’autres raisons : c’est à partir du Moyen-Orient que l’Amérique a reçu les coups les plus douloureux depuis qu’elle a attaqué Pearl Harbor au Japon.
Les Américains n’ont jamais compris pourquoi ces 19 terroristes sont venus de leur pays lointain pour détruire les tours du World Trade Center à New York et se sont demandé pourquoi ces gens les détestaient. Tout au long de la décennie qui a suivi ce fâcheux événement, les Américains ont mené la guerre en guise de rétorsion à ce terrorisme. Les Etats-Unis ont dépensé des fonds énormes dans les guerres du Moyen-Orient et de nombreux soldats ont trouvé la mort. Mais le bilan était nul parce que Washington menait les guerres erronées et tentait de réaliser des objectifs que l’arsenal militaire américain énorme ne pouvait réaliser. L’armée américaine peut tuer des Afghans et détruire des villes iraqiennes. Mais, elle n’a pas pu transformer l’Afghanistan en une démocratie libérale ou faire de l’Iraq un modèle de liberté.
Dans le passé, la Grande-Bretagne s’était retirée du Moyen-Orient ; pourquoi donc les Etats-Unis ne font pas de même ? Il fut un temps où la Grande-Bretagne avait une hégémonie sur la plupart des pays de la région depuis le Golfe, en passant par l’Iraq et Aden et jusqu’à l’Egypte. Mais, à un moment donné, les Anglais ont décidé de mettre un terme à cette présence.
La présence militaire britannique au Moyen-Orient avait pour objectif essentiellement de protéger les colonies britanniques en Inde. Mais, cette dernière s’est libérée et la présence britannique ne servait plus un objectif et un intérêt clair et déterminé. Le gouvernement britannique ne disposait plus de ressources suffisantes pour assumer les dépenses sur les multiples bases militaires déployées à l’est du Canal de Suez.
Les Etats-Unis n’ont plus d’intérêts au Moyen-Orient, comme il est arrivé avec la Grande-Bretagne dans le passé. Cependant, il faut dire que l’Oncle Sam dispose de moyens matériels et, donc, peut encore assurer certaines dépenses. Et c’est là le point de différence entre les deux superpuissances. En se retirant du Moyen-Orient, la Grande-Bretagne a remis la responsabilité de protéger ses intérêts et ceux de l’Occident aux Etats-Unis, qui sont devenus au lendemain de la Seconde Guerre mondiale les leaders du camp occidental. Cependant, Washington n’a pas d’alternative, à qui léguer cette charge à une étape historique qui voit le retrait de l’Occident face à la montée de civilisations et de forces asiatiques ?
Les Etats-Unis garderont donc leur présence militaire au Moyen-Orient afin de faire l’équilibre face à l’influence des adversaires et de faire entrave aux concurrents russes et iraniens. Mais ils tiendront à éviter l’usage de la force militaire tant que possible. Ils reformuleront leurs engagements défensifs face à leurs alliés au Moyen-Orient. Ils ne seront plus aussi bienveillants dans la défense de la sécurité de leurs alliés, car ils doivent plutôt avoir l’oeil sur leurs gains. La protection américaine manifestée à ses alliés deviendrait la dernière ligne de défense et ne sera pas un bâton pour réprimer les adversaires. Washington n’interviendra qu’en cas d’invasion étrangère manifeste. Une intervention qui sera suspectée si jamais la question se rapporte à la défense des régimes et des élites au pouvoir.
Les Etats-Unis intensifieront leur dépendance sur la diplomatie et feront de la présence militaire le bâton qui apparaîtra le cas échéant afin de tendre l’aide à la diplomatie. Le gouvernement américain persistera dans ses critiques se rapportant aux droits de l’homme en réplique aux groupes locaux de pression, mais non pas dans le cadre d’une stratégie visant à renverser des régimes et à mettre d’autres sur le devant de la scène. Les Etats-Unis rétréciront leurs objectifs au Moyen-Orient et seront satisfaits par des réussites modestes. C’est sous cette version qu’ils continueront à être présents dans la région.
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