Propagé dans plus de 200 pays, le coronavirus est une pandémie mondiale, comme le confirme l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Or, il est surprenant de constater que les taux les plus élevés se concentrent dans les pays développés qui représentent la force motrice de la mondialisation économique. En effet, 80% des cas ont été enregistrés en Chine, aux Etats-Unis, en Italie, en Espagne, en Allemagne, en France, en Suisse et en Grande-Bretagne. Il est donc fort probable que la mondialisation soit aussi victime du coronavirus.
La mondialisation est le phénomène économique et politique le plus important que le monde ait connu au cours des 40 dernières années. Elle a transformé le monde en un marché capitaliste unique. Il y a cependant des pays très peu impliqués dans la mondialisation, ce sont les pays les plus pauvres et les moins influents du point de vue économique. Pendant les 4 dernières décennies, toute réussite économique était étroitement liée à la mondialisation. Car de bons résultats économiques étaient synonymes d’une capacité d’intégration dans les réseaux de production et d’échanges internationaux, mais aussi du passage du protectionnisme à un système économique basé sur la dépendance mutuelle, c’est-à-dire que chaque Etat se concentre sur la production d’un des produits déterminés avec haute compétence, soit d’une des phases de la chaîne de production. Ce concept a tant évolué qu’il n’y a plus aujourd’hui un investisseur ou un pays produisant un article de façon complète. Un seul article peut être divisé en centaines de composants produits par différents pays. Puis ils sont transportés et rassemblés pour achever ainsi une chaîne compliquée et précise de production et de livraison, appelée chaîne de valeur. La pandémie actuelle a donné lieu à un dysfonctionnement de ce système. Avec la suspension de la production dans les usines chinoises, a été rompue la livraison de composants aux usines en Europe, aux Etats-Unis, au Japon et à l’Est de l’Asie. Et quand les usines chinoises ont recommencé à fonctionner, la crise en Europe et aux Etats-Unis a atteint son apogée, les usines y ont été fermées et la livraison et la production ont été stoppées. Résultat : les chaînes de valeur restent incomplètes. La crise du coronavirus a ainsi dévoilé que ce système comprend de nombreux risques. Dans un avenir proche, les investisseurs se trouveront sans doute obligés de renoncer à certaines considérations relatives à la compétence et à la rentabilité afin de remédier aux points faibles et diminuer les dangers inclus dans le système de la mondialisation. Ce qui peut réduire les taux de croissance du commerce et de l’investissement transfrontalier. La pandémie a frappé la mondialisation économique ainsi que le système de la dépendance mutuelle, alors que ce système faisait déjà face aux guerres commerciales entre les Etats-Unis et la Chine d’une part, et celles, plus étroites, entre le Japon et la Corée, et les Etats-Unis et l’Europe d’autre part. En même temps, le coronavirus a frappé le monde à un moment où nombreuses voix dans le monde développé émettaient des doutes sur l’utilité et la justice de ce système. Les succès réalisés par la droite nationaliste populiste aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne et dans nombreux grands pays européens et au Brésil en sont lapreuve.
Ces dernières années, dans les pays développés, il y a eu une certaine remise en cause de la mondialisation, parallèlement à la montée du nationalisme, du populisme et de la défense du protectionnisme. Il s’agit en partie d’une réaction des couches les plus affectées par la mondialisation, qui voient en les modèles contraires, nationalisme et protectionnisme, davantage de bénéfices. En même temps les partisans de la mondialisation, investisseurs et hommes d’affaires, continuaient à défendre avec acharnement ce système basé sur l’échange. Or, on remarque que depuis l’apparition de la crise causée par le coronavirus, certains partisans de ce système ont commencé à perdre confiance pensant qu’ils ne pourront peut-être pas assumer les risques qu’il implique. Ce qui signifie qu’après la crise, il est fort possible que la droite populiste et nationaliste gagne u terrain. Ces évolutions constitueront des défis importants, particulièrement pour les Etats en développement qui n’ont pas pu suivre le rythme de la mondialisation économique ces dernières décennies. Et alors qu’un certain nombre de pays entendaient s’y mettre, dans une tentative de répéter l’expérience de la Chine et des Etats asiatiques, la montée du nationalisme économique et la pandémie changent aujourd’hui la donne.
Un jour ou l’autre, la crise du coronavirus prendra fin, mais le monde ne sera plus le même. Cette crise profonde et sans précédent laissera de graves séquelles sur l’avenir du système mondial. Personne ne peut prétendre avoir la capacité de lire l’avenir, car la vie est beaucoup plus riche que toute notre imagination et ne cesse de nous surprendre par des évolutions et des scénarios imprévus. Cependant, on peut dès aujourd’hui dire que l’avenir sera certainement différent
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