Le conflit politique qui fait actuellement rage oppose les groupes d’opposition, toutes tendances confondues, et la confrérie des Frères musulmans avec son parti politique Liberté et justice d’une part, et d’autre part, le régime en place, avec au sommet le Dr Mohamad Morsi, président de la République.
Nous avons de l’autre côté le mouvement Tamarrod (rébellion) qui est, en réalité, l’oeuvre d’un groupe de jeunes révoltés qui veulent s’ériger face au pouvoir de la confrérie des Frères musulmans. Cette dernière a échoué dans sa tentative de résoudre les problèmes de la société. Elle veut s’emparer du processus de prise de décision en excluant toutes les autres forces politiques. Les jeunes ont réussi à aller plus loin que l’opposition traditionnelle qui n’a jamais réussi à se connecter à la rue et qui s’est contentée de quelques communiqués rédigés dans la fraîcheur des salons climatisés.
Plusieurs indices montrent que Tamarrod est devenu un mouvement populaire de large envergure qui a réussi à attirer les citoyens déçus par la piètre performance gouvernementale et l’incapacité des Frères à satisfaire les besoins essentiels des Egyptiens. En effet, les pénuries se multiplient comme celle de l’essence et du gasoil. Ceci sans oublier les coupures fréquentes d’électricité, l’inflation, la hausse des prix et la détérioration des services publics en général.
Face à Tamarrod, les Frères musulmans se sont empressés de lancer un contre-mouvement appelé « Tagarrod » (fait de s’élever au-dessus des intérêts). Son objectif est de défendre la légitimité du Dr Morsi et de faire la propagande de ses réalisations que le citoyen « ne ressent pas ».
Le mouvement Tamarrod doit être encouragé à surmonter cette peur due au fait d’avoir à affronter un régime totalitaire. Les régimes oppressifs utilisent la peur pour soumettre les foules.
Lorsque les jeunes ont appelé leur campagne Tamarrod, ils s’adressaient surtout aux citoyens. Ils les incitaient à se rebeller contre le régime tyrannique en place. Les citoyens ont clairement affiché leur rébellion lorsqu’ils ont apposé leurs signatures sur les formulaires de la pétition. Une manière de dire qu’ils ne craignent pas les conséquences de leur comportement.
Il existe dans le monde de la politique des lignes de démarcation entre rébellion et révolution. La rébellion est un acte politique accompli dans le cadre d’une opposition contre le régime politique au pouvoir. L’objectif étant de renverser les politiques défectueuses d’un régime politique donné. Cependant, si la rébellion dépasse cette ligne qui sépare les deux concepts, et si les foules brandissent le slogan de la chute du régime, cela signifie que nous sommes passés de l’état de rébellion, qui est une pratique acceptée de l’opposition dans n’importe quel régime démocratique, à l’état de révolution.
La signification de la révolution est le renversement d’un régime politique et l’avènement d’un autre sur ses vestiges.
La rébellion est une valeur positive qu’il faut encourager, afin de dresser la population face aux injustices héritées des différentes époques et de s’opposer aux politiques d’oppression et d’exclusion dans le domaine politique.
La rébellion, de mon point de vue, ne représente aucune valeur positive si elle n’est pas menée de manière totalement pacifique, loin de toute violence et à l’écart de toute démolition des propriétés publiques et privées. A tel point qu’il est possible de dire que si ces critères ne sont pas appliqués à la lettre, l’Egypte pourra s’engouffrer dans un état de chaos généralisé, qu’il faut à tout prix éviter.
En effet, la responsabilité du chaos ne retombe pas uniquement sur ceux qui ont appelé à la rébellion, elle incombe aussi aux membres de la confrérie et leurs alliés islamistes. Si ces derniers descendent dans les rues pour contrer les foules de Tamarrod, cela entraînera sans nul doute des heurts sanglant faisant des victimes des deux côtés. Une évolution que ceux qui tiennent aux intérêts du pays ne souhaitent pas.
Nous sommes dans une situation qui nous incite à nous rebeller contre la tyrannie d’un régime au pouvoir en le contraignant à répondre aux revendications populaires. Cependant, nous émettons des réserves quant au transfert spontané de l’état de rébellion à celui de révolution. Aucune révolution ne peut réussir si elle n’a pas d’alternative à la structure tyrannique qu’elle a renversée. Cette alternative doit être plus démocratique et répondre aux revendications populaires légitimes en matière de liberté politique et de justice sociale.
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