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La politique du désespoir

Lundi, 01 avril 2013

Les événements dramatiques survenus devant le siège des Frères musulmans dans le quartier de Moqattam au Caire sont l’expression flagrante du désespoir qui s’est répandu dans la société égyptienne.

En sciences politiques, on dit que la politique du désespoir envenime l’atmosphère sociale dans les pays qui traversent des crises aiguës. Elle résulte de l’impuissance de l’élite politique au pouvoir à prendre les bonnes décisions au bon moment et de l’impuissance de l’opposition à présenter des alternatives pour remédier à la crise.

De là émanent les sentiments de déception qui mènent à des comportements violents contre le pouvoir, pouvant dégénérer en violences et batailles faisant des dizaines de morts et des centaines de blessés. Dans ce contexte, une question s’impose : quelle est la nature de la crise aiguë que traverse la société après la révolution du 25 janvier ? Il s’agit d’une crise sociale qui englobe toutes les classes de la société pour la simple raison que le peuple a ressenti que la révolution du 25 janvier n’a réalisé aucun de ses objectifs : pain, liberté, égalité sociale. Bien au contraire, les conjonctures économiques, sociales et culturelles se sont détériorées de plus en plus.

Il s’agit d’une crise politique car les jeunes qui ont déclenché la révolution et qui ont réussi à mobiliser des milliers d’Egyptiens ont été violemment écartés de la participation positive au nouveau régime politique. En effet, les erreurs de la phase transitoire auxquelles ont pris part le Conseil suprême des forces armées ainsi que les Frères musulmans ont mené, à travers la manipulation de la conscience du peuple et l’exploitation des slogans religieux, à l’organisation d’élections avant la rédaction de la Constitution.

C’est ainsi que les élections des deux Chambres parlementaires, organisées à la hâte et de manière traditionnelle, ont mené à l’écartement de toutes les coalitions révolutionnaires à cause de leurs faibles relations avec la rue politique et à la victoire des Frères musulmans et des salafistes. Il s’agit aussi d’une crise économique aiguë, car le problème du chômage n’a pas été résolu de manière effective. Bien au contraire, le taux de chômage a augmenté, surtout parmi les diplômés universitaires. Il s’agit également d’une crise sociale engendrée par la scission de la société : les habitants des quartiers résidentiels ayant bénéficié d’une certaine manière de la corruption de l’ancien régime et les habitants des zones sauvages dont le nombre a dépassé les dizaines de milliers vivant dans le désespoir et qui sont privés des fondements d’une vie décente. Ces phénomènes sont accompagnés de l’augmentation du nombre d’enfants de la rue qui sont devenus après la révolution le carburant des manifestations chaotiques organisées, sans aucune responsabilité politique ou éthique par les prétendues factions politiques révolutionnaires ou par les partis politiques traditionnels, y compris le parti des Frères musulmans ou les partis salafistes.

Le peuple égyptien vit des illusions erronées dont la plus dangereuse est incontestablement le droit de manifester n’importe où, n’importe quand sous le slogan trompeur de « Pacifique, pacifique ! », alors qu’il s’est avéré que ce slogan est devenu depuis le début de la révolution « Sanglante, sanglante ».

C’est ainsi que la société s’est scindée entre le front révolutionnaire et libéral et le front religieux, notamment après la déclaration constitutionnelle dictatoriale promulguée par le président Mohamad Morsi. Par ailleurs, en conséquence de l’échec politique flagrant des Frères musulmans dans la gestion de l’Etat, la police a été poussée dans l’affrontement des manifestants. Un fait qui a élargi le fossé entre le peuple et la police.

L’élite politique avec ses différentes factions a commis de graves erreurs, car elle a contribué à accroître la violence en appelant à des manifestations chaotiques.

Partant, il s’avère indispensable que le pouvoir politique prenne plusieurs décisions franches dans les délais les plus brefs, comme la formation d’un comité pour l’amendement de la Constitution, le limogeage du gouvernement de Hicham Qandil, la formation d’un gouvernement de coalition présidé par une personnalité publique non partisane, la suspension du Conseil consultatif, qui ne cesse de promulguer des lois hâtives n’ayant d’autre but que d’ancrer la domination des Frères musulmans, et la promulgation d’une nouvelle loi pour les élections en accord avec tous les partis politiques .

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