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Y a-t-il un espoir en Syrie ?

Dimanche, 28 février 2016

La trêve initiée le 12 février par Moscou et Washington, lors d’une réunion à Munich du groupe international de soutien à la Syrie, est entrée en vigueur cette semaine avec le soutien du Conseil de sécurité de l’Onu. Les Russes et leur allié syrien ont finalement accepté de suspendre leurs raids aériens dans les zones tenues par la rébellion. La trêve est censée permettre l’acheminement de l’aide humanitaire dans les zones assiégées et, peut-être, le lancement, à partir du 7 mars, de nouveaux pourparlers intersyriens après l’échec des précédentes discussions. Faut-il croire à une avancée significative au niveau du conflit syrien ? Loin de là. Rien n’indique en effet que l’on se dirige vers une porte de sortie.

Et les chances de voir la trêve se transformer en cessez-le-feu permanent sont quasi inexistantes. D’abord, parce que la trêve n’englobe pas toutes les forces présentes sur le terrain. Elle s’applique aux Forces Démocratiques Syriennes (SDF) soutenues par les Américains, et au Haut Comité des Négociations (HCN), qui rassemble des groupes-clés de l’opposition et de la rébellion, mais exclut une multitude d’autres groupes comme l’Etat islamique et le Front Al-Nosra qui contrôlent près de la moitié du pays. Moscou a fait clairement savoir qu’il poursuivrait ses bombardements contre Daech et Al-Nosra, mais aussi contre les autres groupes qui opèrent sur le terrain et que Moscou considère comme terroristes, en référence sans doute à Ahrar Al-Cham et Jaych Al-Islam, tous deux soutenus par Ankara. L’entremêlement des forces sur le terrain fait qu’il n’y a pratiquement aucune zone de la rébellion qui soit aujourd’hui à l’abri des bombardements russes.

Pour Moscou et son allié Bachar Al-Assad, la trêve est une opportunité pour convertir leurs récents succès militaires en succès politiques. Tout en « agissant pour la paix », la Russie sera en mesure de continuer les combats contre les groupes qu’elle considère comme terroristes, et négociera uniquement avec l’opposition qu’elle tolère. Il faut savoir que les Russes ont déjà réalisé leurs objectifs en Syrie, à savoir laminer l’opposition (celle-ci est désormais en grande difficulté) et faire en sorte que le départ de Bachar ne soit plus une priorité.

Les Américains, eux, poursuivront leurs raids aériens contre l’Etat islamique. La trêve permet à Washington de « gagner du temps » pour mieux armer la rébellion syrienne « modérée » et éviter un retour en force du régime syrien. Idem pour Riyad et Ankara, autres acteurs importants du conflit, qui soutiennent la rébellion, et qui veulent absolument le départ du régime syrien auquel ils sont farouchement opposés. La Turquie a fait d’ailleurs savoir qu’en dépit de la trêve, elle continuerait à pilonner les positions kurdes au nord d’Alep. Les Turcs craignent en effet que la trêve ne donne un répit aux Kurdes au nord de la Syrie.

La trêve apparaît comme une opportunité pour les acteurs impliqués en Syrie de se repositionner dans un conflit, qui a fait en l’espace de cinq ans plus de 270 000 morts et provoqué le déplacement de millions de citoyens syriens.

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