Après la Turquie la semaine dernière, frappée par un attentat sanglant au coeur d’Istanbul, qui a fait 10 morts parmi les touristes allemands, ce fut autour de la capitale indonésienne, Jakarta, d’être la cible cette semaine d’une attaque terroriste. Jeudi 14 janvier, des kamikazes ont actionné leurs ceintures d’explosifs à proximité d’un café au centre de la ville. Les cinq assaillants ont été tués lors d’un assaut donné par la police (dont les deux qui se sont fait exploser). L’attentat de Jakarta est une réplique aux attentats de Paris du 13 novembre dernier qui avaient fait 130 morts et des dizaines de blessés.
L’un et l’autre attentat portent les marques de l’Etat Islamique (EI). Celui-ci a d’ailleurs revendiqué l’attaque de Jakarta. Depuis quelques semaines en effet, l’organisation terroriste, sous pression en Iraq et en Syrie, tente d’élargir son champ d’action dans le monde. L’EI, déjà présent en Libye et au Nigeria, cherche à s’établir dans d’autres pays comme le Yémen, la Somalie et l’Afghanistan, en utilisant des méthodes ultra-violentes pour attirer des combattants déçus par d’autres groupes djihadistes.
Le choix de la Turquie et de l’Indonésie n’est pas fortuit. Craignant la formation d’un Etat kurde au sud de ses frontières, Ankara a indirectement soutenu l’EI contre les Kurdes en Iraq et en Syrie, ce qui lui a valu les critiques des Occidentaux, qui l’accusent de complaisance à l’égard de Daech. Soumise à d’intenses pressions, notamment de la part des Américains, la Turquie a dû revenir sur cette politique et a rejoint les rangs de la coalition internationale contre l’EI. L’attentat d’Istanbul est un acte de représailles de la part de Daech contre le gouvernement turc qui a « lâché » l’organisation terroriste. Le choix de la cible, des touristes allemands, n’est pas non plus fortuit. La mort de dix touristes allemands est un moyen pour l’EI de se faire de la publicité dans les médias occidentaux où l’organisation recrute déjà des militants. L’attentat d’Istanbul est le résultat de l’implication directe d’Ankara dans le conflit syrien et ses politiques ambiguës vis-à-vis de ce conflit.
En frappant aussi à Jakarta en Indonésie, l’EI prend pied au sud-est de l’Asie. Le groupe terroriste n’avait jusqu’ici qu’une faible présence dans cette région du monde. Or, l’Indonésie pourrait avoir une valeur stratégique pour l’EI en vue de recruter de nouveaux militants. Plusieurs groupuscules indonésiens auraient rejoint récemment les rangs de l’EI en Syrie et en Iraq.
Ces groupuscules, comme Katibah Nusantara, que les autorités indonésiennes accusent d’être le commanditaire de l’attentat de jeudi, sont issus de la Jamaa Islamiya, la grande organisation terroriste des années 2000 dont l’objectif était de créer un califat en Asie du Sud-Est. Mais ces groupuscules ont été mis en échec par les cellules antiterroristes du gouvernement indonésien. Certains de leurs militants, déçus, cherchent à présent à rejoindre les rangs de l’Etat islamique, médiatiquement beaucoup plus rentable. L’Indonésie a été frappée dans les années 2000 par une vague d’attentats liés à la mouvance djihadiste, dont les deux attentats de Bali, en 2002 et 2005 médiatiquement célèbres.
Au-delà de toutes ces considérations, une chose est certaine, le terrorisme s’internationalise. Vendredi dernier, un attentat a frappé le coeur de Ouagadougou faisant 29 morts. Cet attentat a été attribué à un groupe djihadiste proche d’Al-Qaëda.
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