Cinq ans après le 25 janvier 2011, nous devons nous demander ce qui reste de cette révolution et dans quel sens elle a affecté notre vie. Il suffit en fait de reconnaître qu’elle nous a dévoilé l’ampleur des complots qui nous entouraient depuis des années, alors que nous étions résignés à l’injustice, à la corruption et à la dépendance.
Les crises que nous vivons actuellement sont l’accumulation d’années de corruption, une corruption qui a détruit toute opportunité de construction et de progrès. D’ailleurs, il serait totalement erroné d’affirmer que les difficultés que vivent les Egyptiens aujourd’hui sont le résultat de la révolution. La détérioration de l’économie, le déficit budgétaire, les dettes accumulées, les services et l’infrastructure en état de dégradation, les millions d’Egyptiens démunis, de jeunes marginalisés, ne sont guère le fruit de la révolution de janvier, mais plutôt un lourd héritage d’années de corruption.
Durant ces années, le secteur public a été vendu dans des circonstances dont on ne connaît toujours pas les détails, des terrains ont été attribués à des hommes d’affaires dans le cadre de projets non moins opaques, et les dettes étrangères et intérieures ont décuplé. La révolution est-elle responsable de tout cela ?
Le phénomène du terrorisme dont nous souffrons aujourd’hui remonte à des années d’échec dans la gestion des affaires de l’Etat, d’absence de justice sociale et de non-respect du droit élémentaire à une vie décente. Des fantômes ont pourchassé les Egyptiens pendant de longues années et qui sont le produit d’un mariage illégitime du pouvoir avec le capital.
Mais certains s’obstinent à répéter que la révolution de janvier était un complot de l’étranger. Est-ce que la révolution du 30 juin 2013 aurait-elle pu avoir lieu sans la révolution du 25 janvier 2011 ? C’est celle-ci qui, au bout du compte, a renversé l’ancien régime.
Sans le 25 janvier qui a renversé un régime tyrannique et corrompu, était-il possible de démystifier les Frères musulmans qui ont dominé l’esprit de beaucoup d’Egyptiens pendant 80 ans et de mettre fin à leur régime islamiste qui risquait de mettre le pays dans une impasse ? Cette confrérie qui a accédé au pouvoir s’est fait griller après avoir commis des erreurs fatales, amenant les Egyptiens à revendiquer son départ du pouvoir lors de la révolution du 30 juin qui l’a complètement anéantie.
Tous ces tournants historiques que l’Egypte a vécus, y compris la révolution du 30 juin, découlent de la révolution de janvier. Toute tentative de dissociation entre ces deux révolutions serait un crime contre l’Histoire, contre la vérité et contre la patrie.
Au cours des cinq dernières années, l’Egypte s’est débarrassée de tous les symboles de la corruption, y compris ceux des Frères musulmans qui ont causé le recul de l’Egypte et qui représentaient autant de handicaps à son progrès. Toutes les chances pour accéder à la liberté, à la démocratie et à la justice étaient condamnées à l’échec sous le régime du parti unique de Hosni Moubarak, et le régime islamiste d’un groupe ayant choisi le terrorisme comme alternative.
Aujourd’hui cinq ans après, nous devons travailler sur 5 axes :
Premièrement : L’Etat doit exprimer sa reconnaissance de ce moment historique qu’est le 25 janvier, et rendre justice à tous les jeunes qui ont participé à cette révolution.
Deuxièmement : Dissiper toute divergence entre les révolutions du 25 janvier et du 30 juin. Si les symboles du Parti national démocrate n’étaient pas partis, ceux des Frères n’auraient pas été démasqués aussi vite.
Troisièmement : Les jeunes de la révolution de janvier 2011 qui se trouvent derrière les barreaux doivent être immédiatement libérés, et leurs dossiers judiciaires doivent être clos.
Quatrièmement : L’Etat est capable de faire taire ceux qui insistent sur le fait de ternir l’image de la révolution de 2011. Le peuple doit protéger ses révolutions et l’Etat doit faire respecter l’histoire de notre nation en rendant hommage à ces moments de gloire et en mettant un terme aux campagnes de diffamation contre les jeunes du 25 janvier. Mais avant tout, l’Etat doit tenir ses promesses et indemniser les familles qui ont perdu leurs enfants durant cette révolution.
Cinquièmement : Il faut former un comité d’historiens, d’académiciens et d’écrivains pour écrire, en toute intégrité et objectivité, l’histoire documentée de ces deux révolutions historiques. C’est d’ailleurs le droit des héros de ces événements glorieux.
Pour finir, je dirais que sans ces deux révolutions, Abdel-Fattah Al-Sissi ne serait pas devenu président de la République. Cet homme qui assume le lourd héritage de deux époques corrompues et qui essaye de sortir le pays vers d’autres horizons.
Lien court: